À Rennes, ce n’est pas une, mais deux manifestations qui étaient organisées pour célébrer le 1er-Mai 2023. Le matin, à l’appel de l’intersyndicale, plus de 10 000 personnes ont défilé, dans une ambiance festive et familiale, dans le quartier de Maurepas au nord de la ville. L’après-midi, le même nombre de manifestants a défilé au centre-ville.
À pied, à vélo, en covoiturage… Alors qu’il n’y avait ni bus, ni métro, les manifestants se sont organisés pour être présents à la manifestation à l’appel de l’intersyndicale. Le rendez-vous était donné place Lucie-et-Raymond-Aubrac, au cœur du quartier de Maurepas en pleine mutation. Alors que la place se remplit doucement, vers 10 h, l’intersyndicale qui se serre les coudes, lance : « Ce n’est pas un baroud d’honneur, nous n’allons pas céder ! »
Beaucoup sont venus avec le sac à dos et les sandwichs en prévision du pique-nique. Dans le cortège, des salariés, mais aussi des familles. L’ambiance est bon enfant, festive, musicale, avec des fanfares, des chansons, des pancartes, des slogans. On croise même la marionnette du président Macron, construite par la compagnie Humpty Dumpty de Mordelles. Les forces de police se font très discrètes.
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Le circuit est inédit, biscornu, en raison des nombreux travaux qui ont actuellement lieu dans le quartier. « On est beaucoup, mais on est combien ? On n’a pas nos repères ici », s’interrogent beaucoup de manifestants.
En empruntant l’étroite rue Emile-Cochet, un syndicaliste lance au mégaphone : « La classe ouvrière est partout chez elle, dans les petites rues comme sur les grands boulevards. »
Manifester « là où les travailleurs vivent »
Pour Matis, 22 ans, ouvrier et militant aux jeunesses communistes, « c’est une très bonne chose d’amener la mobilisation là où les gens et les travailleurs vivent. C’est une façon de montrer que la colère qu’ils expriment chez eux, dans la sphère privée, peut aussi s’exprimer collectivement et dans la rue. »
Claude retraité, militant CFDT, partage ce point de vue, « ça donne aussi aux habitants des quartiers, une autre image de la manifestation, bon enfant, familiale. Certains ont pu venir manifester en centre-ville, et en voyant la casse, ils ne sont pas revenus. »
Très vite les syndicats savent que c’est un succès. Plus de 10 000 personnes, annonce Force ouvrière à 11 h 15, puis 15 000, une heure plus tard. « On n’avait pas vu autant de monde un 1er mai depuis 2002, c’est l’expression d’une volonté profonde de justice sociale. »
Le cortège qui ne passe pas inaperçu dans les rues de Maurepas va défiler jusqu’à presque 13 h, sans incident, une marche tranquille, jusqu’au parc des Gayeulles où de nombreux manifestants ont pique-niqué.
Affrontements au centre-ville l’après-midi
Dès 14 h, une partie des manifestants du matin convergent vers la place de Bretagne d’où doit partir la deuxième manifestation rennaise de la journée. Là aussi, les rangs sont compacts. Plus de 10 000 personnes (12 200 selon la Préfecture) s’élancent, pour une boucle dans le centre-ville. « On a fait presque toutes les manifs, et on ne va pas s’arrêter là, clament dix copines lycéennes, venues en bande. À l’école, on nous apprend qu’on a une voix en tant que citoyennes, on veut la faire entendre. »
Alors que l’ambiance est plutôt festive, le défilé commence à tourner à l’affrontement autour de 15 h 30. Des personnes, visage dissimulé et visiblement décidées à en découdre avec les forces de l’ordre, provoquent ces dernières avec des poubelles et des projectiles. La riposte ne tarde pas : à République et quai Lamenais, la police charge au canon à eau et au gaz lacrymogène.
S’ensuit un chaos généralisé, marqué par des heurts musclés pendant plus d’une heure trente, aux abords de la place de la République, place de Bretagne et Colombier. Jusqu’à ce que la tension redescende d’un cran, et que des dizaines de personnes se dirigent vers la place Sainte-Anne, pour poursuivre dans une ambiance musicale et détendue…
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