80 ans de la libération de Paris : au cœur du PC Rol-Tanguy (H.fr-22/08/24)

Inscription d’époque indiquant le bureau du Colonel Rol Tanguy. 
© Nicolas Cleuet / Le Pictorium

C’est dans ce bunker sous la place Denfert-Rochereau, dans le 14e arrondissement, que le communiste, chef des Forces françaises de l’intérieur (FFI) d’Île-de-France, a coordonné les actions populaires de libération de la capitale.

Par Naïm SAKHI.

Il faut d’abord pousser une porte en fer, installée dans la seconde moitié du XXe siècle pour empêcher les intrusions des cataphiles. Puis descendre un long escalier d’une centaine de marches, d’époque celui-ci. Là, dans ce bunker, sous la place Denfert-Rochereau, le colonel Henri Rol-Tanguy a coordonné, du 20 au 26 août 1944, la libération de Paris.

Depuis le 14 juillet, Paris est effervescent : plus de 100 000 personnes, en région parisienne, ont défilé sous la protection des Forces françaises de l’intérieur (FFI), sans que la police intervienne. Dès le 10 août, une série de grèves est lancée, impulsée par les cheminots, et touche divers corps de métier : aux PTT, dans le métro, dans la métallurgie, dans les imprimeries… Ils sont rejoints le 15 août par plus de 21 000 policiers jusque-là bras armé de la collaboration.

« Les FFI sont organisées comme un état-major, avec plusieurs directions. Cela pose la question de la coordination. Henri Rol-Tanguy, chef des FFI de l’Île-de-France, était en planque dans la banlieue sud, explique Sylvie Zaidman, conservatrice générale et directrice du musée de la Libération de Paris. À l’approche de la Libération, les têtes de la Résistance se rapprochent de Paris. C’est un général résistant, d’abord installé rue de Meaux, qui parle à Rol-Tanguy de ce bunker. »

Un bunker construit pour la défense passive de Paris

Situé sous l’un des deux bâtiments jumeaux de la place, construits en 1787 par l’architecte Claude-Nicolas Ledoux, (l’autre étant aujourd’hui l’entrée des catacombes) ; le lieu est pensé en 1935 pour la « défense passive » de la capitale. « Les pouvoirs publics se posent la question de la protection des populations contre les gaz toxiques et les bombardements. Probablement au début de l’année 1939, on aménage ici un espace pour les services techniques (eau, voirie, éclairage – NDLR) de la préfecture de la Seine », poursuit l’historienne.

Les bombardements sur Paris seront limités. Le lieu, qui peut accueillir jusqu’à 130 personnes, est connu des Allemands. Il restera vide durant l’Occupation. Jusqu’au 20 août 1944. Ce matin-là, comme tous les autres, la Kommandantur appelle pour vérifier que l’endroit est sécurisé. « RAS » (rien à signaler), répond le gardien. Il s’agissait en réalité de l’ingénieur Tavès, un compagnon d’armes de Rol-Tanguy.

« Une demi-douzaine de personnes, durant une semaine entière, traiteront les informations collectées et diffuseront les consignes sur les terrains aux 30 000 FFI de la région parisienne, allant même jusqu’à suivre, en temps réel, l’avancée de la 2e division blindée du général Leclerc, précise Sylvie Zaidman. Le colonel Rol-Tanguy, communiste, était très fin. Il agissait en chef des FFI et non au nom de son étiquette politique. C’est lui qui pousse à l’insurrection, contre l’avis des gaullistes. »

Cécile Rol-Tanguy obtient le transfert du musée de la Libération de Paris

Paradoxalement, bien que coordinateur de la libération de la capitale, Rol-Tanguy ne s’est pas terré une semaine durant dans son PC de commandement. Le chef des FFI multipliait les allers-retours entre l’Hôtel de Ville et la préfecture de police, aux mains des résistants. À la différence de son épouse, Cécile, sa secrétaire particulière. C’est d’ailleurs la résistante qui plaida pour le transfert du musée de Montparnasse – où a été signée la reddition de Von Choltitz le 25 août – au bâtiment du XVIIIe siècle au-dessus du PC Rol-Tanguy. Une requête acceptée par la maire de Paris, Anne Hidalgo, et effective depuis 2019.

Dans l’entrée du Bunker, à 26 mètres sous terre, derrière une grande porte rouillée protégeant des explosions, des vestiges de cette époque sont visibles. On peut apercevoir l’inscription « PC Rol », au-dessus d’une flèche, dans le couloir. Au bout, deux bureaux mitoyens, ceux du directeur général et ceux du secrétariat, occupés par le couple de résistants.

Cyclo-pédaleur et armoire téléphonique

Le lieu a depuis été adapté aux visites du public. Dans les pièces d’expositions aménagées au cœur du bunker, on peut apercevoir un cyclo-pédaleur semblable à celui mis à disposition des résistants. « Cela permettait d’actionner un générateur de secours en cas de panne pour filtrer l’air », détaille la conservatrice. Tout comme une armoire téléphonique gérée par une opératrice. « Le PC disposait de deux téléphones, un à fiche et un interne à la préfecture de Paris. Plus utilisé par les résistants car plus difficile à espionner. Mais les résistants usaient avant tout des messages manuscrits », note-t-elle encore.

En remontant les marches, derrière les vitres de l’exposition permanente, on peut apercevoir une carte des catacombes. Remise par Cécile Rol-Tanguy au musée, elle permettait à la Résistance de circuler discrètement dans les souterrains parisiens. Le document est l’œuvre d’un interne en médecine, René Suttel. Le cataphile l’avait remis à un certain « M. Morel ». De son vrai nom Henri Rol-Tanguy.

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Source: https://www.humanite.fr/histoire/cecile-rol-tanguy/80-ans-de-la-liberation-de-paris-au-coeur-du-pc-rol-tanguy

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