Par Régis de CASTELNAU.

Dans un article précédent, j’ai tenté de démontrer que le Parti socialiste dans son histoire, n’avait jamais été « de gauche ». La sociologie de ses directions, ses modes d’organisation, et sa pratique du pouvoir dans une république de démocratie représentative, permet d’aboutir à cette conclusion. Cependant, si tant est que l’on retienne (à juste titre jusqu’à une période récente) le caractère opératoire du clivage droite-gauche, comme nous l’avons rappelé dans l’article précité, le Parti socialiste est toujours arrivé au pouvoir grâce à des alliances. Ce fut parfois avec la droite, mais plus souvent avec d’autres forces de gauche. Et en particulier, le Parti communiste souvent promoteur de ces stratégies d’union, et qui à chaque fois lui ont coûté très cher, jusqu’à sa disparition. Au détriment bien sûr des forces qu’il représentait, mais pas seulement. Toutes les trahisons mises en œuvre par le Parti socialiste ont porté préjudice à la majorité du peuple français, qu’il a fini par enfermer dans un néolibéralisme destructeur pour le pays. Il faut toujours rappeler que l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron en 2017 est le fruit d’une opération assimilable à un coup d’État dont le PS fut l’un des principaux organisateurs.

On ne reviendra pas en détail sur les différentes catastrophes politiques générées par « l’union des forces de gauche », mais il convient quand même de se rappeler le catalogue.

L’union de la gauche de catastrophes en catastrophes

Aux élections législatives de 1924, alors que le Parti communiste occupé à sa « bolchevisation » s’était enfermé dans la marginalité, on assiste à la mise en place du « Cartel des gauches » qui se coucha prestement devant le « mur de l’argent » pour passer les manettes à Raymond Poincaré chargé de mettre en œuvre les pires politiques d’austérité. Il y eut ensuite, le « Front populaire » de 1936 que Léon Blum, après avoir trahi l’Espagne républicaine, abandonna au bout d’un an pour laisser le pouvoir à une alliance avec le centre-droit. Qui approuva bien sûr les monstrueux accords de Munich. En attendant l’interdiction du PCF en septembre 1939, avec la peine de mort pour ses distributeurs de tracts et l’installation de Pétain le 10 juillet 1940 lorsque la grande majorité du groupe socialiste lui vota les pleins pouvoirs en actant la fin de la République. Encore bravo !

Il y eut ensuite l’alliance tripartite de l’immédiat après-guerre à laquelle le Parti socialiste mis fin en 1947 pour installer avec l’aide de la droite la domination américaine sur l’Hexagone. Léon Blum ayant repris du service pour y veiller. Le nom du socialiste qui se détache à ce moment est celui de Jules Moch féroce briseur de grève qui laissera des souvenirs cuisants chez les mineurs de fond.

En 1956, le PS (SFIO) remporte les élections législatives sur la base d’un programme de paix en Algérie. Que le PCF entend soutenir en votant « les pleins pouvoirs » au gouvernement Guy Mollet. Celui-ci trahit immédiatement ses engagements, nomme Robert Lacoste proconsul en Algérie qui donne les pouvoirs de police et une partie des pouvoirs civils à l’armée ! Qui mettra en œuvre une répression sans mesure à base de torture, de disparitions et d’exécutions sommaires. Englué dans sa trahison, le parti socialiste sera incapable de s’opposer au délitement de l’État et à l’installation d’une situation de guerre civile. Que l’opération politique virtuose de Charles de Gaulle en mai juin 1958 évitera à la France.

À partir de son ralliement à la candidature de François Mitterrand à la présidentielle de 1965, le PCF se lancera à corps perdu dans la construction de « l’Union de la gauche » comme alternative au pouvoir gaulliste. Cette stratégie mortifère aboutira à la signature d’un programme commun en 1972 offrant à cette union des perspectives d’arrivée au pouvoir. La dynamique politique illusoire créée à cette occasion permettra l’arrivée de François Mitterrand à la présidence de la république en 1981. Tous les engagements furent rapidement remis en cause, scandé par le fameux tournant néolibéral austéritaire de 1983 sur fond d’abandon progressif de la souveraineté nationale au profit de l’Union européenne en construction. Le tout accompagné par l’effondrement du PCF, faisant ainsi perdre à la classe ouvrière son principal outil politique. En 1997, nouvelle union de la gauche, « plurielle » cette fois-ci, avec l’arrivée de Lionel Jospin au poste de Premier ministre de cohabitation avec Jacques Chirac. Dont le gouvernement, néolibéralisme européen oblige, sera le plus grand privatiseur de l’histoire de France. Les lambeaux du PCF se contentant d’apporter son écot à la catastrophe politique et économique dont la défaite de Lionel Jospin à la présidentielle de 2002 fut l’épisode normal. Qui eut au moins un mérite, celui de nous éviter la honte du soutien de l’agression américaine en Irak en 2003. Dont chacun sait que Jospin aurait été, comme son camarade Tony Blair, l’acteur empressé. Rappelons au passage la honteuse démarche qu’il demanda à Pierre Moscovici et François Hollande auprès de l’ambassade des États-Unis pour dire son désaccord avec le refus gaulliste de Chirac de participer à ce crime.

Hollande parrain de Macron

Et en 2012 « L’union de la gauche » de se rassembler à nouveau, derrière François Hollande cette fois-ci ! On allait voir ce qu’on allait voir, puisque « son ennemi était la finance » et qu’Emmanuel Todd nous annonçait « le hollandisme révolutionnaire ». Ce mandat tout de trahisons, de laideurs et de lâchetés fut une épreuve pénible. De l’ectoplasme Jean-Marc Ayrault au nervi politique Manuel Valls, en passant par Cahuzac, Moscovici, Jouyet, Macron (déjà) et tant d’autres nullités corrompues, nous avons dû tout supporter. L’évidence que François Hollande allait être, selon l’expression d’Emmanuel Todd, comme vomi par le pays, les grands intérêts dont le Parti socialiste était l’instrument durent trouver une solution. Ce fut Emmanuel Macron, qui fut choisi par la haute fonction publique socialiste décidée à conserver ses sinécures et ses possibilités de pantouflage juteux. Proposé aux oligarques ceux-ci décidèrent de l’installer à l’Élysée. Tous les dirigeants significatifs du PS se mobilisèrent et lui apportèrent son soutien. Macron devenant le véritable candidat de ce parti. Prétendre que c’était Benoît Hamon est absolument grotesque. Par conséquent, macronisme destructeur que nous supportons depuis maintenant huit ans est le fruit empoisonné de l’union de la gauche qui avait porté François Hollande au pouvoir. Dont il faut rappeler qu’elle disposait lors de son avènement de tous les pouvoirs de la république, présidence, Assemblée nationale, Sénat, hégémonie dans les collectivités locales.

Avec la bouffonnerie de la candidature Hidalgo, aurait pu espérer en 2022 que le PS officiel était enfin ramené à la situation d’un groupuscule,. Avec obstination, et après avoir appelé à voter Macron, Mélenchon nous infligea ensuite une autre forme d’union de la gauche avec sa NUPES, dont il s’est imaginé qu’elle pourrait lui permettre d’accéder à Matignon (!!!). Peine perdue, et de nouveau tous les mauvais coups du gouvernement de la socialiste Élisabeth Borne, et notamment la réforme des retraites, furent perpétrés par des socialistes ralliés. Le patron de LFI d’abandonna pas pour autant cette obstination et pour les législatives, n’hésita pas à nous servir dans la vieille soupière de 1936 un « Nouveau Front Populaire » dont le premier mérite fut de requinquer le PS, de faire élire François Hollande pourtant en difficulté électorale, de sauver une partie conséquente des députés macronistes, et une fois de plus le locataire de l’Élysée au passage. La ridicule candidature au poste de Premier ministre de Lucie Castets, caricature de haut fonctionnaire socialo-macroniste donnait déjà un avant-goût du brouet contenu dans la soupière. Et ça n’a pas raté, la fameuse « union de la gauche » est aussi indigeste que les précédentes.

Un mélange d’éléphants socialistes survivants d’un troupeau étique surtout soucieux de conserver quelques gamelles, de jeunes loups installés là par les Américains, d’écologistes allumés recyclés dans le bellicisme russophobe, de faux communistes groupusculaires, s’est acharné à soutenir la diabolisation de LFI et de son chef. Avant, pour la partie socialiste, de rallier explicitement Macron avec l’incroyable mot d’ordre : « surtout ne pas surtout donner la parole au peuple ! Ni dissolution, ni démission ou destitution de Macron. Une majorité avec les macronistes et une partie de la droite pour garder nos fauteuils ». Cette monstruosité démocratique où l’on revendique de refuser au peuple l’exercice de sa souveraineté est le produit direct de « l’union de la gauche ».

L’Histoire nous avait pourtant appris que tant qu’existera un parti socialiste vivant, elle ne pourra enfanter rien d’autre.

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Source: https://regisdecastelnau.substack.com/p/avec-le-ps-lunion-de-la-gauche-ne

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