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Ce jeudi 23 octobre, un cabinet indépendant a rendu son verdict concernant une expertise menée à France Télévisions. Discriminations, maltraitances managériales, souffrances répétées… Pour les salariés, des mesures concrètes doivent être prises.
Par Margot BONNERY.
Un nouveau coup de massue s’abat sur France Télévisions. Suite à une alerte de la Société des journalistes (SDJ) de France 3 Rédaction Nationale, le CSE du siège de France Télévisions a décidé de recourir à une expertise pour risque grave.
Pendant plusieurs mois, le cabinet indépendant CEDAET a enquêté : discriminations, placardisations, maltraitances managériales… Les experts ont notamment fait appel à la sociologue du travail Danièle Linhart, directrice de recherche au CNRS. Le constat est sans équivoque : l’état de la rédaction est alarmant et des mesures doivent être prises.
En novembre 2024, la SDJ a publié 24 témoignages sur les souffrances au travail répétées dans la rédaction. Du jour au lendemain, les missions des journalistes ont été remodelées sans consulter les salariés et sans prendre en compte leurs compétences.
Des inégalités de traitement entre les journalistes
S’ajoutent à cela des mises à l’écart et des humiliations. « Dès le départ, nous l’avons dénoncé en CSE, dans les instances de proximité, dans des tracts… Nous avons alerté la direction, en vain », martèle au téléphone George Pinol, délégué syndical central du SNJ-CGT de France Télévisions.
Dans le rapport de 160 pages, le cabinet explique avoir perçu des inégalités de traitement entre salariés, en fonction de leur âge, mais avant tout en fonction de leur rédaction d’origine. « On constate une organisation élitiste de la rédaction : seul un petit groupe de journalistes s’occupe des éditions phares », poursuit le syndicaliste. Les tâches subalternes sont confiées aux autres, comme les reportages qu’ils jugent ingrats et peu visibles à l’antenne.
« Beaucoup ont souffert, poursuit le syndicaliste qui déplore un management autoritaire. Les arrêts de travail ont été multipliés à cause des problèmes de santé mentale et physique. » En interne, un mépris de la direction se fait ressentir. Le cabinet appelle ainsi la direction à « revaloriser les carrières et harmoniser les rémunérations » et à s’attarder au travail « visible » et « invisible ».
Dans un communiqué du 22 octobre, la CGT dénonce un « appauvrissement éditorial, l’unicité des points de vue et de traitement dans les éditions nationales des sujets. » De leur côté, les experts qui ont construit ce rapport parlent d’un « entre-soi élitiste ».
Obstruction à l’enquête des experts
Le rapport dénonce aussi une obstruction de l’enquête lors de la collecte d’informations. Lors de la réunion tripartite, la direction a indiqué au cabinet ne pas pouvoir fournir un badge d’accès pour la durée de l’expertise, « comme cela avait pu être le cas dans toutes les autres expertises réalisées par le CEDAET à France Télévisions ».
De même, pour la mise à disposition d’une salle pour recevoir les salariés pour les entretiens, « la direction a renvoyé (les experts) aux élus et à la salle dont ils disposent en rez-de-chaussée du bâtiment ». Malgré cela, le cabinet estime avoir pu constater les nombreux risques psychosociaux, marqués par la perte de sens et la dégradation des rapports avec la hiérarchie.
La présidente de France Télévisions, Delphine Ernotte-Cunci, n’en est pas à son coup d’essai. Chez l’opérateur téléphonique Orange entre 1989 et 2015, elle avait la réputation d’être « omniprésente », de « se mêler de tout », confiait Pierre Mouchel, délégué central SNRT CGT de France Télévisions, à l’Humanité au mois de juin. Sauf du « management par la terreur », qui a provoqué 35 suicides de salariés en 2008 et 2009. Bien que la situation ne soit pas la même, les méthodes de management à France Télévisions laissent un goût amer et font craindre de nouveaux départs.
Le constat est posé. Et maintenant ? « Il faut agir et aller au fond des choses », appuie le SNJ-CGT. « Refonder et réformer l’information nationale dans sa structure et dans son fonctionnement est nécessaire, ajoute George Pinol. Nous ne laisserons pas d’autres choix s’appliquer, on se battra. » Pour le syndicat, l’indépendance éditoriale et la liberté des journalistes doivent être rétablies et non la reconstruction d’un système vertical et de contrôle.
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