
Des dizaines de camions vides en attente, un dépôt pétrolier qui ferme puis rouvre, quelques bateaux de soja qui accostent. Que se passe-t-il vraiment sur le premier port de la façade atlantique ?
Site stratégique pour l’économie du pays, le quatrième port français reste fortement touché par la contestation de la réforme des retraites. « Le trafic était complètement à l’arrêt mercredi et jeudi pendant les deux jours port mort et il reste très perturbé ce vendredi 24 mars », rapporte une source bien placée du Grand port maritime Nantes Saint-Nazaire.
Un seul trafic fait exception : « Les tourteaux de soja importés du Brésil, qui doivent être déchargés pour nourrir les animaux d’élevage, notamment dans l’Ouest. La filière agroalimentaire a peu de capacité de stockage et quelques navires sont autorisés à passer. » Vendredi matin, quand les accès aux terminaux ont été libérés, des dizaines de camions étaient déjà en attente, prêts à charger la marchandise.
Pour les autres trafics, en revanche, c’est compliqué. Sur ces quais entre Nantes et Saint-Nazaire, trente millions de tonnes de marchandises arrivent chaque année : nos chaussures, smartphones ou bibelots ; les Dacia ou Peugeot commandées dans nos concessions ; ou encore le gaz pour chauffer les maisons.
Grève reconduite chez Total
Il n’y a quasiment plus de navires entrant pour ces marchandises. Les syndiqués CGT ports et docks (qui travaillent à terre) se relaient avec ceux qui sont à bord des navires de service (remorquage, dragage, amarrage des navires…). Les premiers ont dressé des barrages enflammés avec blocs de pierre sur tous les ronds-points d’accès aux terminaux toute la nuit de jeudi à vendredi.
Les seconds ont pris le relais. « Grève de 24 heures jusqu’à samedi, 6 h, confirme le représentant CGT des marins. Il n’y aura pas beaucoup de bateaux à monter. » On débraye ou on poursuit aussi la grève dans d’autres d’entreprises du port.
Pour les importations de gaz, ce sont les syndiqués CGT mines énergies qui sont à la manœuvre. La réforme va affecter le régime particulier des salariés. « Aucun navire n’a pu décharger au terminal méthanier de Montoir depuis le 6 mars, informe Julien Guillaud, de la CGT Elengy. Il n’y a pas d’injection de gaz sur le réseau national. » Grève illimitée aussi à la centrale électrique voisine, la Spem, qui fonctionne au gaz et vient d’entrer en arrêt technique jusqu’au 30 août.
À l’autre bout du port, à Donges, un chapelet de camions-citernes a pu pénétrer sur le dépôt pétrolier SFDM, vendredi, à 10 h 30. Les grévistes avaient fermé les accès par des blocs et des feux durant la nuit. En période normale, 250 camions viennent ici s’approvisionner pour les stations de l’Ouest.
À la raffinerie TotalEnergie, enfin, la grève a été reconduite vendredi jusqu’au « retrait de la réforme ». Les installations sont entièrement stoppées. Six salariés sont réquisitionnés mais un problème technique empêche provisoirement de ravitailler le dépôt de Vern (Ille-et-Vilaine) par pipeline.
Aux différents points de blocage, le discours des grévistes reste très déterminé. « J’ai perdu quatorze jours de salaires depuis le début de l’année, résume l’un d’eux. Plus question de s’arrêter. On ira jusqu’au bout, jusqu’à ce que cette réforme soit retirée. »
Thierry HAMEAU
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