
Par Kate STENT
Silencieux dans les médias depuis l’annonce de sa démission, le maire de Saint-Brevin parle, dans Ouest-France, du tourbillon dans lequel il est plongé depuis deux jours.
Aux yeux des Français, le maire de Saint-Brevin (Loire-Atlantique), Yannick Morez, ne s’est pas fait connaître sous son meilleur jour. L’image de lui, hagard et emmitouflé dans un duffle-coat près de ses voitures carbonisées et de sa maison noircie par les flammes, a fait le tour des médias. C’était le 22 mars au petit matin ; la France connaissait l’une de ses plus grosses journées de mobilisation contre la réforme des retraites, et le maire de Saint-Brevin venait de subir un incendie criminel provoqué par le jet d’un engin explosif.
En ce vendredi 12 mai, à la sortie d’une réunion, ce sexagénaire coquet a opté pour l’une des chemises à motifs qu’il affectionne. Deux jours après l’annonce, dans Ouest-France, de sa démission, Yannick Morez respecte son agenda comme si de rien n’était. Alors, qu’en vrai, il n’y a plus rien d’ordinaire dans le quotidien de ce médecin généraliste de 62 ans. « Je ne m’attendais pas du tout à un tel emballement, mais alors pas du tout, lâche-t-il tout de go. J’ai choisi de ne répondre à aucun média hier, j’ai été assailli dès 5 h 45, jeudi 11 mai. Des journalistes sont restés devant la maison jusqu’à la nuit. » En plus des appels des médias, son téléphone portable sature de messages de soutien venus de toutes parts.
« Je me suis senti démuni »
En quelques heures, Yannick Morez est devenu un symbole à géométrie variable, selon les croyances de chacun. Symbole de la détresse des élus, pour les uns. Symbole d’une France ouverte aux migrants. Symbole, en tant que victime, du « mépris » de l’État pour d’autres. « Je pense que si l’annonce de ma démission a pris une telle ampleur, c’est parce qu’il y en a eu tellement durant ce mandat. C’est peut-être la goutte d’eau qui fera déborder le vase, sourit Yannick Morez. Si ça peut faire bouger les choses, tant mieux ! »
Si on devine une forme de soulagement, en plus d’un étourdissement certain, la colère du maire de Saint-Brevin est toujours palpable. « Face au projet de transfert du Centre d’accueil de demandeurs d’asile (Cada), voulu par l’État, je me suis senti démuni, isolé et laissé sans aide », lâche-t-il.
Des témoignages spontanés d’élus
Car, si aujourd’hui, ce sont les messages de soutien qui pleuvent, durant les semaines précédant l’attaque de son domicile, Yannick Morez et son équipe ont essuyé des messages particulièrement haineux sur les sites internet de l’extrême droite. « Si ma démission devait servir à une chose, je voudrais que ce soit le rapprochement des services de l’État avec les élus locaux. Aujourd’hui, on a l’impression de vivre dans deux mondes opposés. »
À la mairie de Saint-Brevin, les messages de soutien continuent d’arriver par centaines. Dont beaucoup provenant d’élus locaux. « C’est touchant, évidemment, glisse l’un des cadres de la mairie. D’autant que beaucoup y vont de leurs témoignages, comme un espace d’expression. Ils y racontent des difficultés auxquelles ils ont été confrontés. » Il y a, aussi, quelques messages haineux. Mais c’est une toute petite minorité.
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