Sommés d’évacuer, avant la fin de l’année, leurs mobil-homes du camping de Kerolland, à Fouesnant, vendu au groupe Giboire, les résidents ont exprimé leur colère ce samedi 6 avril. Ils ne comptent pas en rester là.
Par Yves MADEC.
À l’heure où les campings peaufinent les derniers préparatifs d’avant saison, l’un d’eux ferme ses portes. Petite structure familiale des années 60, le camping familial de Kerolland, idéalement situé dans la station balnéaire de Beg-Meil, à Fouesnant, est cédé au groupe Giboire qui, après avoir signifié aux résidents qu’ils avaient deux ans pour se retourner, a finalement donné la fin d’année comme date butoir. En cause, selon le groupe immobilier, l’état général du camping.
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Une catastrophe pour les 70 propriétaires de mobil-homes, en majorité des retraités, qui y ont parfois investi les économies d’une vie. Tous étaient mobilisés, ce samedi 6 avril, pour un café citoyen mené par le collectif des usagers qui porte la révolte afin de sauver le camping et qui a déjà recueilli près de 8 000 signatures. Contrairement aux jours précédents, le site était ouvert et un code d’accès avait été envoyé à chacun. Pas de quoi, cependant, faire retomber la colère.
« La facture va être salée »
À la tête du collectif, Paul Savary, ne mâche pas ses mots : « On ne lâche pas, pour les campeurs, les campings-caristes, les gens en caravane, les résidents. La classe moyenne dont nous faisons partie est amenée à disparaître. Nous ne sommes pas assez riches. Cela va être détruit pour faire du béton. L’argent roi nous fout dehors. Et la mairie n’est pas ignorante ». Des élus d’opposition étaient présents, appelant de leurs vœux Giboire à tenir l’engagement de deux ans et la mairie à racheter le site.
Venus spécialement de Normandie, Françoise et Charlie, qui fréquentent les lieux depuis 1980, ne masquaient pas leur désarroi. « Que va-t-on faire en juillet et août ? Nous avions les petits-enfants qui venaient là deux mois. Et maintenant, nous craignons les cambriolages. » Christine, leur belle-fille, qui a un mobil-home près de l’entrée, en veut au vendeur. « Quand il y a eu des bruits de vente l’année dernière, il nous a certifié que non. Il a le droit, ce n’est pas le problème, mais il fallait le dire avant. Nous avons trouvé un camping qui veut bien nous accepter, mais sans le mobil-home. La facture va être salée, rien n’est pris en charge. C’est tout pour nous. »
« C’était notre bonheur »
« C’était notre bonheur de venir ici, avec notre petite-fille. Nous avons des amis, se lamente Olivier Desert, 70 ans, et présent ici depuis dix ans, après avoir dû quitter le camping du Vorlen pour insalubrité. Kerolland, c’était le seul qui prenait avec mobil-home, Maintenant, nous n’avons plus rien. Et pas d’endroit où mettre notre mobil-home, acheté il y a cinq ans. Nous essayons de le vendre, mais à quel prix ? Nous allons perdre de l’argent, dans les 15 000 € je pense ».
Diana, retraitée et résidente depuis quatre ans, peste sur le délai qui leur est laissé. « Et on nous a coupé l’eau et l’électricité. Ils ont tous les droits. Mais nous avons le droit de rester ici. Le camping ne serait pas aux normes ? Cela ne nous a pas été justifié. Et notre contrat de location n’a pas été dénoncé dans les formes par lettre recommandée. Il faut continuer le combat. »
Maryvonne Youinou de Logonna-Daoulas, a acheté un mobil-home avec son compagnon Martial en juin dernier. 10 000 €. « Un investissement important. Et on nous a laissés refaire la terrasse pour 2 500 €. Nous sommes déçus. Nous avons vraiment l’impression d’avoir été trompés. C’était un petit paradis pour nous. Là, ça devient l’enfer. »
« Je vais vivre ici, je n’ai pas le choix »
En retrait, Valérie, 52 ans, est dans une situation différente. Ce camping, c’est son lieu de vie, pas de vacances. « J’y suis six mois dans l’année depuis deux ans, lâche-t-elle, effondrée. Je n’ai pas eu le choix : suite à un divorce toujours pas terminé, je me suis retrouvée à la rue. Il a fallu que je me débrouille. C’est 1 000 à 1 200 € le loyer dans le coin, je ne peux pas. Je travaille à l’hôpital de Quimper. Par chance, mon père avait ce chalet. Je pensais que j’avais deux ans devant moi. Tant pis, je vais vivre ici, je n’ai pas le choix. Sans eau ni électricité. Toutes mes affaires sont ici. Et j’ai mon fils de 14 ans une semaine sur deux, qui ne veut pas venir. Ça va être la boule au ventre tous les jours. C’est le drame. J’ai fait tous les campings du secteur. Il n’y a aucune possibilité. Et je ne sais pas quoi faire du mobil-home actuel. C’est triste d’être mis dehors comme ça. J’espère que je ne vais pas rester seule tout l’été, je ne vais pas être rassurée. »
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