La « traite » d’humains dans le ramassage de volailles devant le tribunal de Brest (LT.fr-23/05/24)

(Photo Vincent Le Guern/Le Télégramme)

Ce jeudi 23 mai 2024, le tribunal de Brest a condamné le patron d’une société de ramassage de volailles du Nord-Finistère, à six mois de prison avec sursis et à payer des dommages et intérêts à ses 27 salariés étrangers.

Convoqué ce jeudi devant la chambre correctionnelle de Brest, un homme de 57 ans devait répondre des délits d’emploi d’étrangers dépourvus d’autorisation de travail, de mise en danger d’autrui et de menace sur des victimes afin qu’elles ne portent pas plainte. Seule la première de ces trois infractions, commise à Landivisiau entre le 1er janvier 2018 et le 17 novembre 2020, a été jugée, l’autre partie du dossier ayant été renvoyé au 12 décembre 2024, faute d’être complète.

27 salariés dépourvus d’une autorisation de travail

Salarié dans la filière du « ramassage de volailles » depuis 2000, le mis en cause crée sa société dans ce secteur en 2015. Lors d’un contrôle fait le 17 novembre 2020, les inspecteurs du travail constatent dans l’entreprise avicole huit salariés étrangers sans autorisation de travail. Derrière eux dix-neuf autres personnes venant de pays extra-européens sont dans la même situation irrégulière. Une fermeture administrative de trois mois est alors prononcée à l’encontre de l’entité agricole qui mène à sa liquidation, en avril 2021. Les vingt-sept salariés sont aussitôt licenciés sans indemnisation, vu leur situation au regard du droit français. À la barre sans avocat, le quinquagénaire reconnaît, à mi-mot, sa responsabilité en indiquant « les salariés disaient qu’ils faisaient des démarches pour régulariser leur situation ». Il invoque, en outre, la pénurie de travailleurs français dans ce domaine. « On ne trouve pas de main-d’œuvre autochtone, déclare-t-il avant de rappeler, ils avaient tous des contrats de travail et des bulletins de salaire déclarés à la MSA ». « C’étaient des cotisations à fonds perdus ! » corrige le président Xavier Jublin qui résume : « Bref, vous avez fermé les yeux pour faire fonctionner votre entreprise ». Le prévenu l’admet, en tentant de se justifier : « Je leur ai dit que je ferai tout pour les aider ».

« Un climat de brimade et raciste »

Si tous les intervenants au procès sont unanimes pour admettre la pénibilité du travail dans ce domaine avicole, le ton change avec les avocats des parties civiles. D’abord, le conseil de la CGT qui, pointant « un secteur brutal », dénonce « la misère qui exploite la misère dans une banalisation du mal ». La représentante des vingt-sept parties civiles va plus loin en insistant sur « un climat de brimade et raciste » dans lequel cette main-d’œuvre « travaillait parfois 48 heures d’affilée » sous la coupe du prévenu qui ne « pensait qu’à son bénéfice propre ». L’argument est repris par la voix du parquet qui retient « un choix économique » tout en relevant « une gestion comptable désastreuse (laissant) une dette sociale de plusieurs milliers d’euros ».

Au terme de ces débats, l’ex-gérant sur la sellette, sans casier judiciaire, est condamné à une peine de prison de six mois assortis d’un sursis simple et à une interdiction de gérer une entreprise pendant cinq ans. Sur le plan civil, l’homme qui est désormais salarié devra régler, au titre des dommages et intérêts, les sommes de 2 700 € à la CGT et 1 000 € pour chacun de ses anciens employés.

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Source: https://www.letelegramme.fr/finistere/brest-29200/la-traite-dhumains-dans-le-ramassage-de-volailles-devant-le-tribunal-de-brest-6589444.php

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