Qui sont les défenseurs de l’hôpital de Carhaix convoqués en garde à vue ? (LT.fr-5/06/24)

Depuis le 14 mai 2024, des défenseurs de l‘hôpital de Carhaix sont convoqués en garde à vue au commissariat de Quimper, après une action dans les locaux de l’Agence régionale de santé, à Quimper, en septembre dernier. (Visuel Le Télégramme/Archive Le Télégramme)

Depuis trois semaines, des défenseurs de l’hôpital sont régulièrement placés en garde à vue à Quimper. Nous avons cherché à connaître leur profil. Une vingtaine de personnes a déjà été convoquée ; parmi elles une majorité de femmes.

Par Raphaël RUFFLE-MARJOT.

Derrière les titres annonçant des « défenseurs de l’hôpital de Carhaix convoqués » se trouvent des vies qui ont basculé. Depuis mi-mai, ils sont plusieurs à avoir été placés en garde à vue au commissariat de Quimper aux motifs de « séquestration » et de « violence en réunion sur personne chargée d’une mission de service public ». À la suite de ces convocations récurrentes, nous nous sommes interrogés : qui sont ces personnes entendues par la justice ?

Absence de communication officielle

Jusqu’ici difficile d’établir un décompte précis des convocations en l’absence de communication officielle. Contactée, la Préfecture du Finistère n’a pas souhaité apporter « d’information ou de commentaires s‘agissant d’une affaire judiciaire en cours ».

Certains « convoqués » acceptent de témoigner à visage découvert, comme Cathy Quiltu. Ancienne infirmière à l’hôpital de Carhaix et encartée CFDT, elle ne décolère pas. « J’ai des hauts et des bas. Certains pensent qu’on va à un simple rendez-vous mais on est fatigués d’aller « se promener » à Quimper. On est trois à être passés en cellule », rappelle celle qui figurait parmi les premiers gardés à vue.

En soutien à l’hôpital de Carhaix, de nombreuses manifestations ont eu lieu à Quimper ces derniers mois.
En soutien à l’hôpital de Carhaix, de nombreuses manifestations ont eu lieu à Quimper ces derniers mois. (Archives Le Télégramme/Benjamin Pontis)

Une surreprésentation de femmes

Selon nos informations, 20 personnes ont été convoquées dans ce dossier (trois doivent encore être auditionnées mercredi 12 juin). Parmi eux, seize femmes et quatre hommes. Les plus jeunes sont quadragénaires alors que la plus ancienne a 64 ans. En dehors de Matthieu Guillemot, porte-parole du comité de vigilance de l’hôpital et commerçant, toutes et tous travaillent sur le site hospitalier carhaisien ou brestois, ou en sont retraités : infirmiers, aides-soignants, manipulatrice radio, ergothérapeute, ainsi qu’une ancienne secrétaire médicale. L’engagement syndical d’une grande majorité ressort également aux trois couleurs de la CGT, de la CFDT et de Sud santé sociaux.

Mardi, l’une des convoquées a pleuré à son entrée et à sa sortie de garde à vue.

Concernant la surreprésentation féminine, Matthieu Guillemot dit ressentir que « les femmes sont ciblées » et explique se souvenir d’« une certaine parité » lors de l’action à l’Agence régionale de santé (ARS). « Mardi [4 juin], l’une des convoquées a pleuré à son entrée et à sa sortie de garde à vue », confie-t-il.

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« Pourquoi retenir cette action ? »

Cette fameuse « action à l’ARS », menée par les défenseurs de l’hôpital le 14 septembre 2023, semble être le point commun qui réunit tous les gardés à vue (même si la Préfecture ne confirme pas cette information). Ce jour-là, une centaine de manifestants effectuent le déplacement à Quimper pour réclamer la réouverture 24 h/24 des urgences de Carhaix. Après réception d’une délégation de l’hôpital au siège départemental de l’Agence régionale de santé (ARS), une partie des manifestants avait occupé ces mêmes locaux pendant près de cinq heures. Ils auraient empêché, entre autres, la directrice générale de l’ARS Bretagne et la directrice du CHRU, de quitter les lieux.

Une accusation réfutée par les convoqués interrogés. « Nous avons fait tellement d’actions au cours de ces semaines-là. Pourquoi retenir celle-ci plus qu’une autre ?, s’interroge Anne-Marie Lucas, secrétaire adjointe du comité de défense et de développement de l’hôpital. Personne ne s’attendait à finir en garde à vue. » Quelques jours plus tard, le CHRU de Brest-Carhaix relatait que des plaintes avaient été déposées.

Le 14 septembre 2023, en début de matinée, certains manifestants avaient tenté d’allumer un feu de pneus, devant le siège départemental de l’ARS. Manifestants stoppés net par les policiers présents sur place. Le ton était alors monté d’un cran.
Le 14 septembre 2023, en début de matinée, certains manifestants avaient tenté d’allumer un feu de pneus, devant le siège départemental de l’ARS. Manifestants stoppés net par les policiers présents sur place. Le ton était alors monté d’un cran. (Archive Le Télégramme/Sophie Benoit)
Le 14 septembre 2023, le ton était monté lorsque les manifestants étaient entrés dans la salle où se trouvaient notamment la directrice générale de l’ARS Bretagne et la directrice du CHRU Brest-Carhaix. (Matthieu Guillemot, porte-parole du comité de vigilance de l’hôpital de Carhaix, au premier plan, à droite).
Le 14 septembre 2023, le ton était monté lorsque les manifestants étaient entrés dans la salle où se trouvaient notamment la directrice générale de l’ARS Bretagne et la directrice du CHRU Brest-Carhaix. (Matthieu Guillemot, porte-parole du comité de vigilance de l’hôpital de Carhaix, au premier plan, à droite). (Archive Le Télégramme/Sophie Benoit)

Des soignants désormais fichés

« Choquant », « sidéré », « en position de criminels ». Les termes ne manquent pas dans la bouche des convoqués pour qualifier une situation unanimement mal vécue. Et c’est notamment les prélèvements d’empreintes digitales et d’ADN qui marquent. « À l’origine, nous sommes des soignants. Nous avons défendu un bien commun et maintenant on se retrouve fichés », regrette Caroline Tromeur, secrétaire générale de la CGT du site.

Dans les rangs des militants, on s’attend à de nouveaux placements en garde à vue durant les prochaines semaines. Avec un total qui pourrait alors atteindre les 30 à 40 convocations.

À noter

La municipalité de Carhaix a annoncé qu’elle remettrait, samedi 8 juin, une médaille d’honneur de la Ville à chaque gardé à vue.

À lire sur le sujet « La judiciarisation de l’expression syndicale n’est pas acceptable ! » : la députée Mélanie Thomin s’inquiète de la garde à vue de défenseurs de l’hôpital de Carhaix

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Source: https://www.letelegramme.fr/finistere/carhaix-29270/qui-sont-les-defenseurs-de-lhopital-de-carhaix-convoques-en-garde-a-vue-6598196.php

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