Diwan : ces militants investis mais essoufflés. (LT.fr – 13/10/24)

Par Thierry Charpentier

Diwan communiquera, jeudi, sur l’élan de solidarité qui va combler, peu ou prou, son déficit de 500 000 euros. Mais l’épisode laisse des traces chez les parents militants et les élus. Tous appellent le réseau à une introspection lucide.

Le SOS date du 5 septembre. Diwan, dans le rouge de 500 000 €, lançait un appel aux dons. Des collectivités, conseils départementaux du Finistère et du Morbihan en tête, ont fait diligence (50 000 euros de subvention exceptionnelle chacun). Le conseil régional a débloqué 200 000 euros. Les maires de Plouhinec et Gouesnou (29), Yvan Moullec et Stéphane Roudaut, veulent faire boule de neige en proposant que chaque commune vote l’attribution d’une subvention de 10 centimes par habitant.

« En off, tout le monde est d’accord »

L’union sacrée, donc ? Pas tout à fait. Les budgets des collectivités, sous la menace du PLF (projet de loi de finances), sont de plus en plus contraints. Le consensus se lézarde. Stéphane Hervoir, maire de Pencran (29), refuse de verser le forfait scolaire. Christian Coail, président du Département des Côtes-d’Armor, ou Loïg Chesnais-Girard, le président de la Région,appellent le réseau à une mise à jour de son logiciel. Cette mise à jour, des membres des AEP (Associations d’éducation populaire) du réseau Diwan l’appellent aussi de leurs vœux. Sous couvert d’anonymat – « il ne faut surtout pas l’ouvrir ou d’emblée, tu es anti-langue bretonne » -, ils ont accepté d’en faire part, « parce qu’en off, tout le monde est d’accord ».

« Pour les parents, c’est dur ! »

D’accord sur quoi ? « Le problème est que chaque école du réseau Diwan est complètement autonome », commence un parent d’élève. Il poursuit : « Chaque école qui s’est créée a dû tout faire, et, notamment, trouver son équilibre budgétaire. Or, ce sont des parents d’élèves ! Avec un peu de chance, ils avaient un comptable parmi eux, mais c‘est très rare… ».

Des parents corroborent : « Quand tu ouvres une école, tu n’as pas d’accompagnement. Tu es isolé, esseulé. Il faut tout faire pour ouvrir, mais derrière, tu n’as ni intendance, ni logistique… Pour les parents qui portent ça, pour les enseignants, en fait, c’est dur ! Pour toute aide, on a : on espère que ça se passera bien pour vous ».

« C’est complètement opaque »

Un père de famille résume : « Le fonctionnement associatif n’est plus adapté à la situation. Le réseau est trop grand. Sauf qu’il ne faut rien dire, sinon ça fait le jeu de l’ennemi, le jeu de l’État français. Il faut tout cacher, on a l’impression d’être chez les écolos quand il y a des histoires de cul ! ».

Il décrit des pratiques approximatives : « Chaque association doit reverser une partie de ses gains à la coordination Diwan Breizh, alors qu’elles ont été peu accompagnées, ou trois fois rien ». Au final, « des associations du réseau versent, d’autres pas. Certaines sont relancées, d’autres pas. C’est complètement opaque », déplore le membre d’un bureau. Un père de famille raconte : « On versait vraiment une grosse somme à Diwan Breizh pour un retour absolument ridicule, juste une présence à l’assemblée générale, sans que cette personne intervienne sur le fond ».

« Le week-end, tu aimerais faire autre chose »

Certains remettent en cause le principe de la gratuité de l’enseignement. « Elle a été érigée en dogme. Pourtant, tu demandes entre zéro et 30 euros par mois et par enfant selon les revenus de la famille et le problème est résolu. C’est sur dix mois, en plus ! Diwan attire l’attention sur une difficulté qui pourrait être résolue en interne. »

Ce père de famille est fatigué d’entendre parler de « commando Krampouzh » pour vendre des crêpes, de jardinage dans la cour d’école ou de coups de main pour faire les peintures d’une salle de classe. « Le week-end, tu aimerais faire autre chose. Ce fonctionnement est hérité des années 70. Autrefois, les gens étaient plus tournés vers le bénévolat. Les choses ont évolué. »

« Vendre le modèle Diwan, quitte à dire des énormités »

D’autres sont plus lapidaires encore : « Il y a un énorme problème de démocratie associative chez Diwan. La coordination n’a même pas pu donner la liste de ses membres à la chambre régionale des comptes (*) ! ». Pour cet enseignant, « rien n’est clair. Et il n’y a aucune stratégie au long cours ». Une mère tempère : « J’ai un recul de 20 ans. L’enseignement tient la route. La difficulté, c’est de trouver des gens capables de s’investir énormément. Or, Diwan attire les bobos. Ils veulent que leur enfant soit scolarisé dans une école qui a les meilleurs résultats au brevet et au bac mais ils sont vite fatigués ». Un père le répète : « En off, tout le monde est d’accord, mais dès qu’on parle du monde bretonnant en dehors, on vend le modèle Diwan, quitte à dire des énormités ».

Source : https://www.letelegramme.fr/bretagne/diwan-ces-militants-investis-mais-essouffles-6681405.php

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