
Trois navires de la Compagnie française du thon océanique (CFTO) devraient être vendus à Oman, tout en restant gérés depuis Concarneau (Finistère). Les équipages français et la commercialisation des prises continueront d’être gérés par la société bretonne. Ce projet de vente s’inscrit dans le contexte de la compétition mondiale pour le thon tropical.
Par Stéphanie HANCQ.
Solution pérenne ou signe d’une aggravation de la crise de la pêche au thon tropical française ? La Compagnie française du thon océanique (CFTO), basée à Concarneau (Finistère), songerait à vendre trois de ses bateaux à une société omanaise. C’est le sens d’un courrier diffusé en interne la semaine dernière, faisant suite à la tenue d’un CSE (Comité social et économique) extraordinaire le 2 décembre 2024, et que Ouest-France a pu consulter. Contactée, la direction ne souhaite pas s’exprimer, expliquant que « ce n’est qu’un projet non contractualisé ».
Selon ce document interne, les navires Glenan, Trevignon et Drennec changeraient ainsi de pavillon. Une information confortée par des messages partagés par un responsable de la gestion opérationnelle d’une flotte de navires spécialisés dans la pêche pélagique et la pêche au thon à Oman, Muath Al Nadabi, évoquant un projet à horizon 2025. « Un autre changement qui concernerait deux autres navires vers un autre pavillon, dans l’océan Indien, est également à l’étude », peut-on encore lire dans ce courrier, sans que cet autre pays ne soit précisé.
CFTO resterait gestionnaire des trois navires omanais avec, à son bord, les mêmes équipages. « Les navires resteraient gérés techniquement par la CFTO et le fruit de la pêche serait commercialisé par le service commercial de Concarneau », est-il écrit. Dans le cadre de ce contrat de gestion, la société française pourrait prendre le management de deux thoniers supplémentaires sous pavillon omanais. « Chaque marin resterait lié à CFTO via son contrat de travail actuel », précise encore le courrier.
Il pourrait donc s’agir d’une bonne nouvelle pour la société confrontée à un plan d’économies, en raison « de difficultés historiques » qui « ont durement et durablement impacté l’entreprise ». Avec 15 navires, dont un battant pavillon italien, la CFTO est le premier armement pour la pêche au thon tropical en Europe qui compte 260 salariés, dont une majorité en Finistère.
L’avantage pour la société serait double : celui de se séparer de son capital matériel (entretien des bateaux, etc.), qui lui coûte, mais surtout de récupérer des quotas de pêche et donc assurer sa survie. Car les thons de l’océan indien représentent un marché considérable, mais les captures sont limitées par ces quotas, en forte baisse pour 2026.
Dans une étude de juin 2017, l’Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI) évaluait le chiffre d’affaires de la pêche au thon à plus de 2,6 milliards d’euros par an : un thon sur quatre pêché dans le monde l’est dans l’océan Indien. Des poissons que l’on retrouve dans les assiettes européennes.
Le thon est, en effet, le poisson le plus consommé en France avec 4 kg/an et par habitant (selon les données de France Agri Mer 2022). Conséquence, de plus en plus de pays, notamment asiatiques, s’y intéressent. Et désormais, la guerre au thon fait rage dans l’océan indien.
En battant pavillon omanais, « cela nous permettrait un accès à la ressource libéré de la contrainte forte actuelle du quota pour les autres navires battant pavillon français », explique le courrier interne à la CFTO.
De son côté, le sultanat d’Oman – qui a déjà un projet de port avec Lorient (Morbihan) baptisé Keroman, – se donnerait les moyens de créer des emplois et d’augmenter ses revenus en devenant une plaque-tournante de la pêche au thon.
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