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Écologistes, communistes et insoumis sont prêts à voter une motion de censure dès jeudi après le discours de politique générale de François Bayrou qui refuse de suspendre la réforme des retraites et maintient le cap de l’austérité. Le PS, qui n’exclut pas de se joindre au reste du Nouveau Front populaire, n’a pas encore tranché.
Par Julia HAMLAOUI
Rien, ou si peu. François Bayrou, sous les airs qu’il aime à se donner de Premier ministre ouvert, ne lâche rien des percepts qui ont prévalu ces sept dernières années. Le « conclave » entre « partenaires sociaux » sur les retraites annoncé lors de son discours de politique générale mardi 14 janvier ? Un enfumage quand le Medef pourra tranquillement faire échouer les négociations afin que la réforme Borne et les 64 ans continuent de s’appliquer ainsi que l’a promis le locataire de Matignon en cas d’absence d’accord à l’issue des pourparlers.
La mise à contribution des plus riches et des grandes entreprises ? Il ne faut pas tuer « la poule aux œufs d’or », prétend Bayrou quand le CAC 40 a distribué près de 100 milliards à ses actionnaires en 2024, battant un nouveau record. Au programme donc, pas de suspension de la réforme des retraites, mais une austérité déjà prévue dans le projet de budget Barnier. « C’est le plus grand effort de baisse de dépenses depuis 25 ans », se targue d’ailleurs, ce mercredi 15 janvier sur TF1, la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, annonçant que le gouvernement prévoit « plus de 30 milliards » d’euros d’économies.
Quelques ajustements sont bien prévus ici ou là comme sur le montant du financement de la santé, la réduction du nombre de postes supprimés dans l’Éducation… Des miettes à destination de la gauche, dont une partie a joué le jeu de la négociation ces derniers jours, qui sont loin d’avoir convaincu.
Une motion de censure soumise au vote jeudi
Les communistes et les écologistes ont annoncé qu’ils voteront, en l’état, avec les insoumis une motion de censure dès jeudi. « Toutes ces heures de discussions, ces journées de négociations pour ça. Le compte n’y est pas du tout. Il y a de fortes attentes sur le pouvoir d’achat, les salaires et aucune annonce là-dessus. Sur les retraites, il renvoie à une négociation où on sait très bien que le Medef va s’opposer à la réduction de l’âge de départ », a expliqué, sur BFM TV mardi soir, le secrétaire national du PCF Fabien Roussel, soulignant, sur ce dernier point, que le « conclave » dans la forme annoncée par le Premier ministre aboutirait au maintien de la réforme actuelle.
« Même si on ne s’attendait pas à grand-chose, nous avons quand même été déçus », avait déjà réagi, plus tôt dans la journée, dans l’hémicycle le député communiste Stéphane Peu rappelant que « c’est d’un changement majeur de cap politique dont notre pays a besoin ».
« Les écologistes censureront ce gouvernement. Entre autres choses, la faiblesse de ce discours de politique générale en termes d’écologie est une provocation. Ils n’ont aucune excuse. Aucun alibi. Ils avaient entre les mains nos propositions », a également fait savoir la secrétaire nationale des Écologistes Marine Tondelier, dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux à l’issue de la prise de parole de François Bayrou.
La présidente du groupe écologiste, Cyrielle Chatelain, a de son côté notamment mis en garde contre la tentation du gouvernement d’accompagner les « relents xénophobes les plus vils de l’extrême droite » alors que le Premier ministre a repris la thèse de la « submersion » chère au RN en prétendant que les immigrés mettent « en péril, par leur nombre, la cohésion de la nation ».
Le PS attend de voir sans exclure la censure
« En décidant de reprendre le budget présenté par Michel Barnier, le gouvernement assume de perdre des recettes, de bloquer toute nouvelle mesure fiscale ambitieuse et de rehausser le niveau de l’austérité à 50 milliards d’euros. Le budget de François Bayrou sera celui de Michel Barnier, en pire », ajoute la motion de censure présentée par la cheffe de file des insoumis à l’Assemblée, Mathilde Panot et 57 autres députés dont des élus du groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR) et du groupe Écologiste et Social. « Avec Michel Barnier, pas plus qu’avec François Bayrou, il n’existe de majorité à l’Assemblée nationale pour prolonger le macronisme », résument les signataires.
Quant au PS, il semble encore espérer que le gouvernement fasse quelques pas supplémentaires d’ici le vote de la motion sans exclure de se prononcer pour. « Ce que je demande au premier ministre », c’est « qu’il dise que, qu’il y ait accord ou pas accord, le Parlement sera saisi de la question des retraites sur la base des propositions qui auront été faites par les uns et par les autres », a expliqué le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, sur le plateau du 20 heures de TF1, avant de prévenir : « Nous censurons, sauf si nous avons une réponse claire » à ce sujet.
« Où sont vos engagements ? Où sont vos compromis ? », avait en amont lancé à François Bayrou dans l’hémicycle le chef des députés socialistes Boris Vallaud, qui doit se réunir à nouveau avec ses collègues ce mercredi matin.
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