
Jamais autant de footballeurs n’avaient adhéré à l’Union nationale des footballeurs professionnels (UNFP) que cette année. Mais quelles sont les raisons de cet engagement et qu’est-ce que cela leur apporte ?
Par Thomas ROIGNANT.
Brendan Chardonnet est un défenseur engagé sur le terrain, mais pas seulement. Capitaine du Stade Brestois, il en est aussi le représentant syndical. Si c’est à lui que revient la tâche de désigner les trois meilleurs joueurs du mois pour Brest, le Conquétois fait surtout le lien entre le club finistérien et l’Union nationale des footballeurs professionnels (UNFP), syndicat des joueurs en France, auquel il a adhéré en 2012. « Le footballeur est loin d’être bête », s’exclame Chardonnet. « Oui, nous avons de bonnes conditions salariales, mais nous avons aussi des problèmes. Le footballeur attache une grande importance à ses droits. À tout moment, notre situation peut changer. L’UNFP nous représente dans toutes les réunions avec la Ligue. Notre façon de les aider, c’est d’adhérer. »
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« La baisse des salaires va s’accentuer »
Comme lui, 94,89 % des joueurs de Ligue 1, de Ligue 2 et de National adhèrent à l’UNFP cette année. Du jamais-vu. Au Stade Brestois, seul un joueur n’est pas syndiqué (sur 26), soit 96 % comme au Stade Rennais, tandis que le taux d’engagement est légèrement inférieur à la moyenne nationale, aussi bien à Lorient (87 %) qu’à Guingamp (86 %). Mais en Bretagne, c’est l’US Concarneau le meilleur élève : la totalité du groupe est affiliée à l’UNFP.
Cette augmentation s’explique principalement par les turbulences traversées par le football français (1). « Bien sûr que la situation nous préoccupe », souffle Chardonnet. « S’il n’y a plus de diffuseur, il va manquer de l’argent. Nous, si on n’est pas payé pendant un mois, on va s’en sortir. Mais il faut penser aux 110 salariés que compte le Stade Brestois. » À la tête du syndicat depuis octobre 2024, David Terrier craint même « une diminution des salaires des footballeurs ».
« En France, on s’aperçoit qu’il y a un championnat à deux vitesses, poursuit le président. Avec les clubs qui jouent les Coupes européennes et les autres. La répartition des revenus va toujours en direction des plus gros. Montpellier, par exemple, qui ne joue pas suffisamment, se retrouve en difficulté. S’il n’y a aucune réforme mise en place, et que les droits TV domestiques continuent de baisser, cette baisse des salaires va s’accentuer. C’est une crainte chez les joueurs. »
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Gestion de conflits, pécule de fin de carrière…
En plus de dix ans de carrière professionnelle, Brendan Chardonnet avoue n’avoir jamais eu besoin de faire appel aux services de l’UNFP pour gérer un quelconque désaccord avec son club. Mais c’est loin d’être le cas de tout le monde. David Terrier observe même une large augmentation des conflits entre les joueurs et les clubs.
Le service juridique de l’UNFP, bien que déjà composé de cinq personnes à plein-temps, tourne « en flux tendu ». « Les clubs sont dans une situation d’urgence. Certains se demandent même s’ils vont arriver à payer les salaires de mars. Donc les situations se tendent et la tension augmente. Certains clubs essaient même de contourner la convention du football », explique le dirigeant, dont le syndicat intervient aussi dans des domaines comme la reconversion. « Beaucoup de joueurs ont eu une mauvaise gestion financière pendant leur carrière. Ils se retrouvent en difficulté 5-10 ans après avoir raccroché les crampons. Certains se retrouvent également, à 30-32 ans, sur le marché du travail sans préparation. On est là pour ça : les préparer à l’avenir, les conseiller et les aider. »
Depuis les années 60, un pécule de fin de carrière a ainsi été mis en place par l’UNFP. Un fonds indépendant alimenté à la fois par les joueurs, qui cotisent à hauteur de 4 % de leur salaire chaque mois, mais aussi par les clubs, qui redistribuent 2,5 % du salaire de chaque joueur adhérent. Au final, un joueur qui raccrochera en 2025 et qui a joué au moins 48 mois sur le territoire français se verra attribuer 9 500 euros bruts multipliés par le nombre d’années de contrats en France, quel que soit son niveau. Loin d’être négligeable, surtout pour un joueur de Ligue 2 ou de National.
1) Droits TV en baisse, DAZN qui avait menacé de ne pas payer son échéance de février, avant de s’y résoudre
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