Racisme au sommet du pouvoir : un drame en trois actes (CA.net-16/04/25)

Le déni du racisme et le soutien à la droite extrême ne protègent pas du racisme

On entend souvent, dans le débat politique, cette formule un peu vieillotte : «Dieu se rit des créatures qui déplorent des effets dont elles continuent de chérir les causes.» Elle s’applique dans le cas de ce drame en trois actes, avec Naïma Moutchou, députée du parti Horizon d’Édouard Philippe, membre de la coalition macroniste au pouvoir.

Acte 1

Le 18 janvier dernier, Naïma Moutchou donne une interview à l’hebdo de droite Le Point. Elle se vante : «Je suis l’ennemie numéro un de LFI». Alors que personne ne la connait. Elle poursuit : «Ils ne supportent pas que je dénonce leur instrumentalisation. Mélenchon joue sur le ressentiment d’une partie de la communauté musulmane. Il leur martèle toute la journée que la France est raciste, que l’État et ses institutions sont racistes, dans un système organisé contre eux. Il les enferme dans une posture victimaire et leur dit : ‘Surtout, restez à votre place, ne vous émancipez pas !’»

Dans l’exercice habituel d’inversion du réel, cette macroniste accuse celles et ceux qui dénoncent le racisme d’être les responsables du racisme. Et plus grave, elle opère un déni total du racisme alors que l’extrême droite n’a jamais été aussi forte, que les agressions racistes se multiplient et que le gouvernement qu’elle soutient applique des pans entiers du programme du RN.

Acte 2

Le 14 avril, Le Figaro révèle que la députée Naïma Moutchou est personnellement victime de racisme : elle a reçu, à l’Assemblée Nationale, un courrier écrit à la main sur un article qui lui était consacré, comportant un vomi de propos haineux. «Vous avez une gueule d’arabe – vous n’avez rien à faire dans ce pays qui ramasse tous les déchets du monde – vous prenez le pain des Français. Dégagez vite !» ou encore «Nous avons la nausée quand on voit votre gueule enfarinée. Vous détruisez notre pays, les Arabes égorgent nos enfants. Ras le bol, nous sommes en colère devant ces crimes barbares dont vous faites partie !»

Un message ultra-violent, qui a provoqué un «nœud au ventre» et «une colère froide» à la députée de droite, selon ses propres mots. Il faut bien évidemment soutenir toutes les victimes du racisme. On peut tout de même se demander si Naïma Moutchou arrive à connecter l’agression qu’elle vient de subir avec les politiques islamophobes et le climat détestable provoqués par ses prises de positions, son parti et son gouvernement dans le pays ?

Dans le même parti que Naïma Moutchou, on trouve Thierry Solère, un homme au cœur de la machine macroniste : ancien député LR, proche d’Édouard Philippe, conseiller politique à l’Élysée… Ce dernier a organisé des repas en compagnie de Marine Le Pen, Jordan Bardella et des représentants du camp Macron pendant des semaines en 2024. Libération révélait que «la dernière fois que Jordan Bardella a été vu dans la rue où réside Thierry Solère remontait au 12 juin, soit trois jours après la dissolution». Avec le recul, il apparaît évident que les macronistes tendance Horizon et les néofascistes préparaient ensemble la transition vers une coalition d’extrême droite à l’issue des élections. De quoi avoir des «nœuds au ventre», en effet.

Acte 3

Le racisme au sommet de l’État : Libération fait une révélation sidérante le 15 avril. La ministre de l’agriculture, Annie Genevard, par ailleurs amie du lobby de l’agro-industrie, est intervenue en dernière minute pour modifier un clip destiné à promouvoir l’agriculture sans pesticide.

Le cabinet de la ministre a réclamé des modifications dans la réalisation : concernant une scène avec un adolescent préparant de la mayonnaise, il a réclamé de «choisir un casting caucasien». En clair, de «blanchir» le clip, d’en exclure un acteur non blanc. Du racisme biologique assumé. Pour une scène représentant un repas en famille, le cabinet a demandé à «remplacer le «couscous» par du «cassoulet avec canard». Le couscous est régulièrement cité comme étant le plat préféré des français, mais il ne faudrait surtout pas donner un sentiment de « diversité ». Une source proche du dossier se dit «choquée» par les demandes ministérielles «assez racistes».

Résumé : une macroniste dénonce l’antiracisme de LFI, avant d’être elle-même victime d’attaques racistes, et alors que sa collègue ministre, depuis le sommet de l’État, donne des consignes racistes pour un clip gouvernemental. Cela pourrait faire une belle fable, si ça n’était pas dramatique.

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Source: https://contre-attaque.net/2025/04/16/racisme-au-sommet-du-pouvoir-un-drame-en-trois-actes/

URL de cet article: https://lherminerouge.fr/racisme-au-sommet-du-pouvoir-un-drame-en-trois-actes-ca-net-16-04-25/

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