
« Stop à la loi du silence ». C’est le message que l’on pouvait lire devant le palais de Justice de Vannes, hier (mardi 22 avril) au procès de Joël Le Scouarnec. L’ancien chirurgien accusé de viols et d’agressions sexuelles sur 299 patients. Plusieurs associations se sont mobilisées pour dénoncer l’inaction des institutions médicales pendant des années.
Par Dolorès CHARLES.
Au procès de Joël Le Scouarnec, la cour criminelle du Morbihan s’intéresse maintenant aux responsabilités des instances médicales que certaines associations accusent d’avoir, par leur silence ou leur inaction, permis au chirurgien de poursuivre son métier, alors qu’il faisait pourtant l’objet d’une condamnation à 4 mois de prison avec sursis dès 2005 pour détention d’images pédopornographiques. Une condamnation non assortie d’une interdiction d’exercer.
J’avais des besoins de recrutement, mais pas à n’importe quel prix !
Il faut dire qu’un tel spécialiste est aussi rare que précieux dans un hôpital… mais Jean-Pierre Dupont McLean qui dirigeait l’Hôpital de Pontivy à l’époque, lui, n’a pas hésité à refuser d’engager le chirurgien en 2007 après avoir appris ses penchants pédophiles. « On est dans un pays qui est en pleine crise de désertification, et de voir arriver un chef de clinique comme ça, parce qu’à l’époque, ils ne connaissaient pas la condamnation, ils ont vu arriver le messie. J’avais des besoins de recrutement, mais pas à n’importe quel prix. Je n’étais pas favorable au recrutement dans mon établissement d’un type qui consultait des vidéos pédopornographiques. Aujourd’hui, c’est toujours la même situation, les hôpitaux galèrent, et en particulier les établissements de ville petite ou moyenne… »
Dans les hôpitaux de province, est-on moins regardant encore aujourd’hui ? « Lorsque l’on voit arriver un chef de clinique autorisé à poursuivre son exercice professionnel par la justice, je crois que cette décision a dû servir à tous comme prétexte à ne rien faire… »
Ces embauches après condamnation sont une faille, selon l’association L’Enfant Bleu. Son avocat Jean-Christophe Bouyer, s’interroge surtout sur le comportement de l’ordre des médecins du Finistère qui, alerté sur les penchants du praticien dès 2006, n’a réclamé aucune sanction.
La responsabilité des ordres interpelle
« La question interpelle qu’un Conseil départemental du Finistère puisse décider, à l’unanimité, qu’il n’y a pas de raison de saisir la chambre disciplinaire… Le conseil Départemental ne juge pas, il avait le pouvoir de saisir la juridiction disciplinaire pour savoir s’il y avait une faute, et eux ont décidé en amont qu’ils n’avaient même pas de quoi saisir la chambre disciplinaire, donc une telle unanimité interpelle.
On verra au fur et à mesure des débats et en fonction des débats, mais je sais que mon association et d’autres associations se réservent la possibilité d’engager des poursuites ou des mises en jeu de responsabilité contre des ordres pour lesquels on estimerait qu’ils auraient failli. A ce moment-là, on sollicitera les juridictions compétentes qui nous diront si nos actions étaient légitimes ou pas. »
Les anciens présidents de l’ordre des médecins du Finistère et de Charente-Maritime, dont dépend l’Hôpital de Jonzac où Joël Le Scouarnec a atterri en 2008 pour y finir sa carrière, doivent témoigner au procès du Morbihan, le 19 mai prochain.
Le procès de Joël Le Scouarnec, accusé de viols et d’agressions sexuelles sur 299 patients, doit s’achever en juin.
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Source: https://hitwest.ouest-france.fr/proces-le-scouarnec-les-instances-medicales-mises-en-cause
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