
Les ministres de l’Economie et des Comptes publics ont annoncé leur intention de supprimer l’abattement fiscal de 10 % pour les retraités.
Par Nicole BERNARD.
Au fin fond de l’impopularité, le gouvernement Bayrou-Retailleau veut aller le plus loin possible dans l’attaque contre notre « modèle social ».
Passons sur les déclarations ridicules du président du Medef jugeant « contre nature » l’exonération pour « frais professionnels » des retraités ! Ou bien il sait pertinemment que ce n’est pas pour cela que les retraités se voient appliquer une baisse de 10 % sur leurs revenus imposables, des revenus en forte baisse par rapport à leurs revenus d’activité… Ou bien il ne cherche même pas à le savoir ! « J’ai le plus grand respect pour les retraités » assure Patrice Martin. Bien sûr !
La CFDT n’est pas contre : « La question des 10 % se regarde », selon sa secrétaire générale, Marylise Léon. Cela nous rappelle d’autres temps : en 1995, le Premier ministre de l’époque, Alain Juppé, avait trouvé dans Nicole Notat, alors dirigeante de la CFDT, une alliée pour faire passer ses ordonnances. Des ordonnances dont nous payons encore les conséquences au prix fort.
Il est vrai que la CFDT est pour fiscaliser le financement de la Sécurité sociale comme le demande, depuis toujours, le patronat. Arrêtons-nous, par contre, un instant, sur l’argumentation de la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin : « Je pense, à titre personnel, qu’on ne peut pas indéfiniment, mettre à contribution les actifs pour financer les nouvelles dépenses sociales liées au vieillissement. »
C’est au nom de ce principe que les retraités sont redevables, depuis 2013, de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie (Casa).
La ministre du Travail complète en précisant que tous les retraités ne seraient pas mis à contribution mais « seulement ceux qui peuvent se le permettre ». C’est-à-dire ? Les retraités percevant plus de 2 000 euros. On le voit, ce sont les riches qui paieraient ! De qui se moque-t-on ?
La Sécurité sociale, c’est l’inverse
La ministre du Travail redonne le fond de l’affaire : « La protection sociale incombe trop aux entreprises et aux travailleurs, explique Astrid Panosyan-Bouvet. Il faut que cette charge soit mieux répartie sur l’ensemble de la population surtout pour un risque qui est celui de la dépendance qui concerne très principalement les personnes âgées. »
Il faut donc que les vieux payent pour les vieux. Et les malades pour les malades. D’où le développement des franchises et l’augmentation du ticket modérateur (1) que Barnier voulait imposer, avant que le vote de la censure ne l’en empêche.
La Sécurité sociale, c’est l’inverse. Notre salaire net n’est qu’une partie de notre salaire.
L’autre partie, le salaire socialisé, finance les droits de tous les bénéficiaires de la Sécurité sociale, retraités, actifs, familles, chômeurs, pour garantir la solidarité avec tous ceux qui ont besoin de prestations. Et ce, quel que soit leur âge.
Au moment où le patronat et le gouvernement veulent introduire la capitalisation dans les retraites
(lire ci-dessous), contre laquelle la Sécu a été fondée en 1945, la taxation des retraités doit être rejetée énergiquement.
« Chacun cotise selon ses moyens et perçoit selon ses besoins » : c’est cela la définition de la Sécurité sociale.
C’est pour cela que nous serons dans la rue le 1er Mai.
(1) Le « ticket modérateur » est la partie non prise en charge par la Sécurité sociale. C’était 20 % en 1945. C’est 30 % aujourd’hui auxquels s’ajoutent les franchises. Les grands malades sont exonérés du ticket modérateur. C’est le 100 %.
LA RETRAITE PAR CAPITALISATION A L’ORDRE DU JOUR DU CONCLAVE Bayrou avait obtenu l’engagement du PS de ne pas le censurer en contrepartie de la « négociation » entre les syndicats et le patronat sur l’avenir de la réforme Macron contre les retraites. Jeudi 24 avril, le « conclave » a discuté de… l’introduction de la capitalisation dans la Sécurité sociale par le biais d’un éventuel accord national interprofessionnel !Il est vrai qu’il ne reste plus, dans ce « conclave », que le Medef, la CPME (1), la CFDT et la Confédération générale des cadres. Ils envisagent d’ailleurs, d’après la presse, un accord possible !La capitalisation, c’est-à-dire le financement par chacun de sa pension au moyen du marché financier, a été sortie de la Sécurité sociale en 1945. « Absolument pas tabou » Oui, mais… le Medef, Macron et plus largement la droite, veulent, maintenant, l’imposer, pour deux raisons.– par le salaire socialisé. Les entreprises n’auraient plus à payer.– La capitalisation fournit de l’argent frais à la Bourse. L’argent mis de côté par les salariés pour leur retraite permettra d’augmenter les profits des capitalistes.La ministre du travail, Astrid Panosyan-Bouvet déclare : « On a 15 millions de Français aujourd’hui qui font de la capitalisation… Ce n’est absolument pas tabou » (cité par Le Figaro, 24 avril).Est-ce vrai ? Évidemment non. D’après ce qui a été confirmé au conclave même, les dispositifs de retraite supplémentaire ne représenteraient que 5 % des cotisants et 2 % des prestations (Liaisons Sociales, 28 avril).Contrairement à ce que pense la ministre du Travail, les Français ne sont pas idiots !D’après un sondage Ifop, seulement 29 % des Français seraient favorables à ce financement des retraites par le marché. L’exemple des États-Unis où des millions de retraités ont été ruinés par la crise des subprimes en 2008 est encore dans toutes les mémoires.C’est pourquoi tous ceux qui veulent imposer la capitalisation prennent la précaution de dire qu’ils ne toucheraient pas à la retraite actuelle ! Les salariés auraient donc les deux. Quelle générosité !Enfin, c’est ce qu’on nous dit. Tout le monde comprend que si le patronat réussissait à imposer une retraite, même partiellement, par capitalisation, il n’y aurait plus d’argent pour la répartition. Plus un centime.La capitalisation pourrait-elle être facultative ? C’est le cas maintenant. On a vu avec quel résultat lamentable en nombre de cotisants et de bénéficiaires !Pour le patronat, c’est clair : la capitalisation doit remplacer, même partiellement, la répartition.Remplacer la répartition ? Certes les pensions sont faibles, trop faibles. Mais quand même ! Il existe un régime par capitalisation pour la prise en compte des primes des fonctionnaires qui n’entrent pas dans le calcul de la pension. En 2023, ce régime a redonné, en moyenne, une rente de 36,50 euros par mois !Avec cet aspect à ne surtout pas oublier : une fois que les fonds mis de côté pour la retraite sont sur le marché, ils peuvent servir à des tas de choses. C’est ainsi que le fonds de pension Calpers ( California Public Employees Retirement System – système de retraite des employées des services publics de Californie) a participé, comme investisseur, à des fermetures d’entreprises. L’argent de nos retraites devrait servir à licencier nos enfants ? C’est, assurément, une autre logique N. B. (1) Confédération des petites et moyennes entreprises. |
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Source: https://infos-ouvrieres.fr/2025/05/03/les-vieux-devraient-ils-payer-pour-les-vieux/
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