
Seine-Saint-Denis : Face aux conditions indignes faites par le gouvernement aux enfants handicapés, parents, enseignants, AESH, personnels de santé, syndicats… cherchent à se regrouper pour agir !
Par correspondant IO
Mardi 20 mai, à l’initiative du député FI Jérôme Legavre, mais organisée conjointement avec plusieurs parents d’élèves dont une responsable FCPE et une responsable d’une association de parents d’enfants handicapés, s’est tenue à Clichy-sous-Bois (93) une réunion consacrée
aux conditions inacceptables de scolarisation et de prise en charge faites aux enfants en situation de handicap.
Ainsi, se sont rassemblées 70 personnes, parmi lesquelles des parents, des AESH, des enseignants et leurs syndicats (Snudi FO – FSU – CGT), deux infirmières scolaires syndicalistes, l’une à FO l’autre à la FSU, des psychomotricien.ne.s, ergothérapeutes, ou éducateurs, une assistante sociale, des personnels communaux dont un responsable CGT, des avocats membres du SAF, un conseiller départemental FI, un élu d’opposition de la mairie de Clichy-sous-Bois, et des militants de la France insoumise.
La discussion a démontré que nombreux sont ceux qui cherchent les moyens d’agir pour que cesse la situation inadmissible qui est actuellement faite à ces enfants, à leurs familles et aux personnels… Et différentes propositions se sont dégagées de la discussion, à commencer par le besoin de se regrouper pour agir, ouvrant la voie au fait de se constituer en collectif. Avec pour objectif : aider au rassemblement le plus large contre ce gouvernement, pour aider à ce que les revendications dont ont tellement besoin les enfants, leurs familles et les personnels l’emportent.
Entendu dans la discussion
Une responsable de la FCPE 93
« Le format de cette réunion aujourd’hui est pour nous fondamental et d’ailleurs pas suffisamment utilisé à mon sens sur cette question. (…) Ce que nous constatons, au fil de nos discussions avec les parents et la communauté éducative, c’est que la pénurie de moyens devient massive, et elle frappe en premier lieu les enfants en situation de handicap.
Malgré une forte mobilisation pour un plan d’urgence pour la Seine-Saint-Denis en 2024 où les syndicats avaient pu évaluer (…) qu’il manquait 2 200 postes d’AESH dans le 93. Nous n’avons pas été entendus. (…) 2 500 enfants sont en attente d’une place d’IME1. La rentrée 2025 s’annonce particulièrement inquiétante. Ce qui nous est annoncé pour la rentrée prochaine, ce sont : 105 suppressions de classes, 12 postes d’infirmières en moins, Et dernièrement nous avons appris que 781 postes d’enseignants et de CPE contractuels n’allaient pas être renouvelés.
Alors on peut se dire quel est le lien avec la question des conditions de scolarisation des enfants en situation de handicap ? Les enfants en situation de handicap vont être les premières victimes.
Car les suppressions de classes, c’est quoi ? Ce sont des classes surchargées, où l’enseignant va avoir encore plus de difficultés pour s’occuper des élèves à besoins particuliers.
Moins d’infirmières, c’est moins de suivi, moins de soins. Les AESH non remplacés, ce sont des élèves laissés sans accompagnement. Un exemple dans ma ville, une maman s’est vu la semaine dernière refuser la sortie scolaire de sa fille en situation de handicap le jour de l’évènement. Pourquoi ? Parce que l’AESH était absente et non remplacée.
C’est ça, la réalité. Les humiliations du quotidien. D’un côté, un fort sentiment d’injustice du côté parent et du côté de la communauté éducative : ils nous disent une impuissance à assurer un service public de qualité. Nos enfants paient le prix de cette dégradation du service public d’éducation, et surtout les plus fragiles d’entre eux.
Donc comme je le disais, cette réunion vient à point nommé (…) elle va permettre de faire des constats de la situation, pour construire ensemble des actions collectives, à l’échelle du département. (…)
Mais je tiens à vous annoncer deux prochaines dates importantes, portées par la FCPE 93, qui, si ce n’est pas exclusivement sur la question de l’inclusion scolaire, visent à interpeller sur le manque de moyens dans l’école publique.
La FCPE 93 appelle à une mobilisation le 10 juin à 17 h 30 devant l’inspection académique, et devant les établissements scolaires le matin autour d’une pétition que nous avons écrite. De nombreux autres départements feront de même à cette date du 10 juin.
Le 11 juin à Paris, à 14 h 30, nous appelons à rejoindre un rassemblement qui réunira toute la France par l’intermédiaire d’un collectif qui s’appelle comité national de défense de l’école publique car cette dégradation des services publics d’éducation ne se situe pas seulement à l’échelle de la Seine-Saint-Denis. Depuis plusieurs mois, dans toute la France, des parents d’élèves et personnels de l’Éducation nationale, ensemble, manifestent contre les suppressions de classes et de postes. »
Une maman
« On entend souvent parler d’inclusion scolaire, mais en réalité on assiste à une discrimination scolaire : par le manque de structures spécialisées, par le manque de moyens et de formation des enseignants, il y a transformation de “l’école de l’inclusion” en “garderie”.
Quand le diagnostic du handicap tombe, les parents se retrouvent sans rien, livrés à eux-mêmes. Les enfants ont le droit, légalement, à des structures adaptées, mais les places manquent. Il n’y a par exemple aucun établissement (IME ou autre) à Clichy-sous-Bois, les infrastructures locales n’ont aucun aménagement, les animateurs n’ont pas de formation… J’ai alerté la mairie à différentes reprises, sans retour et sans effet.
Il est urgent de permettre que les enfants en situation de handicap, et tous les enfants, soient reconnus, et que leurs DROITS soient respectés.
Je me permets d’évoquer un exemple personnel : mon neveu a été diagnostiqué autiste, et il est non verbal. Il a sept ans aujourd’hui, et se retrouve – faute de place dans un IME – contraint de redoubler et demeurer en maternelle.
Quelle aide et quel bénéfice pour lui dans cette situation ? Pour son enseignant, pour les enfants de sa classe ? Avec ses parents, nous avons sollicité une multitude d’établissements : pas de place. Nous allons continuer à nous battre. »
Une AESH, déléguée régionale de l’association « AESH en lumière »
« On m’impose par exemple de m’occuper de cinq élèves en classe de 2de, alors que je n’ai jamais eu de formation sur ce niveau. Donc, en même temps que nous nous occupons des enfants, nous devons d’une part apprendre ce qui est au programme mais par ailleurs nous creuser la tête tous les jours pour trouver nous-mêmes le meilleur moyen de permettre aux enfants dont nous avons la charge, d’apprendre dans les meilleures conditions.
Car, non, nous ne pouvons pas “reformuler un énoncé” (selon les textes officiels) pour qu’un enfant comprenne si nous ne comprenons pas nous-mêmes l’énoncé, ni ne connaissons suffisamment le trouble dont souffre l’enfant pour trouver la meilleure reformulation à même de permettre à l’enfant de comprendre.
Avant, on s’occupait d’un enfant, durant toute sa scolarité. Aujourd’hui, nous devons suivre plusieurs élèves en même temps dans différents niveaux.
Des fois, ils sont de même niveau d’ailleurs ; mais alors, parmi les quatre élèves de 3e dont je m’occupe, à la fin de l’année je dois en « choisir » un pour l’accompagner dans le brevet.
Et d’autres personnes devront comprendre le jour même de leur examen, comment fonctionner avec chacun des trois autres enfants ? C’est d’une violence inouïe, pour les enfants, pour nous… »
Jérôme Legavre, dans sa conclusion
« Je retiens une proposition par-dessus tout : s’organiser, se coordonner, qu’on reste en lien et qu’on agisse ensemble. C’est fondamental. Et entendons-nous bien : se coordonner – constituer un collectif, oui – n’a pas vocation à se substituer au travail des organisations syndicales, à ce que font les associations, etc. J’ai tendance également à considérer qu’ensemble, on est plus forts. Partant de là, je suis à fond pour ce qui a été proposé : regroupons nos idées, nos énergies, nos forces, pour avancer.
Évidemment, tout cela recoupe des questions financières, budgétaires. Mais je vous rappelle que, depuis trois ans, aucun budget n’a été voté à l’Assemblée nationale, tous sont passés en force, à coups de 49.3. Et d’ores et déjà, le gouvernement prépare le budget 2026 avec en ligne de mire 40 milliards supplémentaires de coupes. Et on sait dans quoi il veut couper : l’hôpital public, le logement, l’école publique.
Sans organisation collective, sans action collective, on n’a rien
J’appuie à fond les initiatives qui ont été évoquées, le 10 juin à l’inspection académique 93, et le 11 juin au ministère de l’Éducation nationale.
Et je suis pour qu’on se coordonne pour aider au succès de ces initiatives, que tous ceux et toutes celles qui le souhaitent et sont présents aujourd’hui, fassent savoir s’ils en sont d’accord que nous fassions bloc.
(…) Lors de la discussion d’une proposition de loi intitulée “Renforcer le parcours inclusif des élèves en situation de handicap”, j’ai accroché la ministre Élisabeth Borne (grande spécialiste du 49.3) sur un point : le fait que la majeure partie des enfants ne se voient pas attribuer les heures notifiées.
Elle m’a répondu que “depuis que c’est mutualisé, il y a plus de notifications”. Elle ment, mais elle s’en moque ; un député, ça ne lui pose pas trop de problèmes. Mais ça peut être plus compliqué pour elle, face à des centaines ou des milliers qui s’organisent.
Et je veux que les responsables entendent tout ce qui a été dit dans notre réunion, qu’on leur mette la réalité sous le nez. Par exemple, et parce qu’il s’agit de la représentation de l’État dans le département, je verse au débat la possibilité de se rendre en masse, en faisant bloc, devant la préfecture. Je le soumets à votre réflexion (…).
Je verse ces éléments au débat, mais le plus important selon moi est bien que cette réunion ait des suites, et que nous restions tous en lien pour pouvoir agir pratiquement. »
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Source: https://infos-ouvrieres.fr/2025/06/06/enfants-en-situation-de-handicap-leurs-conditions-de-scolarisation-sont-inacceptables/
URL de cet article: https://lherminerouge.fr/enfants-en-situation-de-handicap-leurs-conditions-de-scolarisation-sont-inacceptables-io-fr-6-06-25/