Les États-Unis & Israël ont fait alliance avec le nouveau président syrien pour massacrer les Druzes. (SOFS – 29/07/25)

Illustration © The Cradle

Israël a utilisé une tactique mafieuse, se présentant comme le sauveur d’une crise qu’il a contribué à créer pour légitimer son occupation & redessiner la carte du sud de la Syrie à son avantage.

👁‍🗨 Les États-Unis & Israël ont fait alliance avec le nouveau président syrien pour massacrer les Druzes

Par le correspondant de The Cradle en Syrie, le 27 juillet 2025

Grâce à une campagne calibrée de massacres sectaires à Soueïda, le nouveau président syrien soutenu par les États-Unis et Israël a mis en œuvre une stratégie plus large visant à pousser les Druzes vers la protection d’Israël et à fragmenter l’intégrité territoriale de la Syrie.


Alors que des vidéos dévoilant d’horribles atrocités commises dans la province de Soueïda, en Syrie, se sont propagées sur les réseaux sociaux, des preuves indiquent que le massacre de la minorité druze, perpétré par le gouvernement syrien, a été orchestré par les États-Unis et Israël.

Ces massacres relèvent d’une tentative plus large pour forcer les Druzes à chercher la protection d’Israël, donnant ainsi à l’État hébreu un prétexte pour occuper plus largement le sud de la Syrie, établir le couloir de David et maintenir le pays dans un état de vulnérabilité et de division.

Le président syrien Ahmad al-Sharaa, ancien chef de l’État islamique et longtemps préparé par les États-Unis et le Royaume-Uni à prendre le pouvoir à Damas, s’est avéré être l’allié idéal pour exécuter ce plan.

L’offensive contre les Druzes

Les violences ont commencé le dimanche 13 juillet à Soueïda, lorsque des Bédouins ont kidnappé un vendeur de fruits druze sur la route entre Soueïda et Damas. La situation s’est rapidement envenimée, débouchant sur des affrontements entre milices bédouines et factions druzes armées.

Le mardi 15 juillet, le ministre de l’Intérieur, Mohammad al-Shaar, a ordonné le déploiement de l’armée syrienne et des forces de sécurité intérieure dans la région, sous prétexte de mettre fin aux affrontements et de rétablir la sécurité et la paix civile.

Cependant, au lieu de chercher à mettre fin aux combats, les forces de Sharaa se sont ralliées aux groupes armés bédouins. Affirmant qu’elles étaient venues combattre les Druzes, les forces syriennes ont commis un massacre effroyable, tuant des centaines de civils druzes, s’en prenant à des symboles culturels druzes et pillant et incendiant systématiquement des habitations druzes.

“Mardi matin, des troupes des ministères syriens de la Défense et de l’Intérieur ont pris d’assaut la ville de Soueïda, invoquant des mesures pour mettre fin à une flambée de violence communautaire. Mais ce qui a suivi n’a pas été qu’une flambée de violence”, a rapporté Media Line.

“Après l’arrivée des forces gouvernementales, les affrontements ont pris une tournure plus violente”,

ont également rapporté des journalistes de Reuters, citant des habitants de Soueïda selon lesquels les meurtres auraient été commis par des soldats syriens “identifiés à leurs treillis et à leurs insignes”.

Les partisans du gouvernement ont également reconnu que les forces de sécurité de Sharaa avaient été envoyées pour participer au massacre plutôt que pour y mettre fin.

Saleh al-Hamwi, l’ancien chef du Front al-Nosra, a critiqué M. Sharaa, affirmant que ses hommes n’étaient pas intervenus pour mettre fin aux affrontements entre les “groupes hors-la-loi” druzes et les Bédouins.

“Ce n’est pas vrai”, a écrit M. Hamwi sur X“Les autorités sont intervenues avec leur armée et leurs forces de sécurité pour soutenir les milices du chef spirituel druze Hikmat al-Hijri”.

Massacres confessionnels

Des milliers de témoignages, de photos et de vidéos circulent désormais en ligne, montrant des civils druzes exécutés, décapités, enlevés et humiliés par des combattants gouvernementaux et tribaux.

Les vidéos et les photos montrant des combattants gouvernementaux et tribaux humilier des hommes druzes capturés en rasant leur moustache traditionnelle et en les assassinant ont rapidement été suivies par des vidéos encore plus choquantes. Les troupes syriennes se sont filmées en train de découper des cadavres à l’aide de couteaux, d’exécuter des hommes druzes non armés dans la rue après les avoir interrogés sur leur religion, de massacrer des familles entières dans leurs maisons et d’enlever des femmes pour les réduire en esclavage.

Un homme a été attaché à une chaise et brûlé vif, tandis qu’un autre a été tué avec sa famille alors qu’il était assis chez lui, paralysé, dans son fauteuil roulant.

Une vidéo choquante diffusée en ligne montre les cadavres de quinze Druzes non armés dans la maison de la famille Al-Radwan, une famille influente.

Maan Radwan, dont des proches ont été tués lors de la fusillade, a déclaré au Guardian :

“Ils étaient assis là, en train de boire un café, quand des hommes armés sont entrés et ont commencé à tirer. Les armes sont interdites ici, ce n’est pas une base militaire”.

Une vidéo montre des dizaines de corps de Druzes massacrés à l’hôpital national de la ville de Soueïda.

Le journaliste palestinien Wael Essam, qui a couvert la guerre de quatorze ans en Syrie pour le journal Al-Quds al-Arabi, a rapporté que, selon des sources proches du gouvernement syrien, le massacre a été perpétré par des membres d’une faction liée au gouvernement, Ansar al-Tawhid (Division 82), contre des miliciens druzes blessés et les civils qui les accompagnaient.

Intervention d’Israël

Prétendant défendre les Druzes, Israël a mené une opération spectaculaire le mercredi 16 juillet, bombardant des bâtiments gouvernementaux au cœur de Damas, notamment le ministère de la Défense et les environs du palais présidentiel.

La première bombe a atteint sa cible alors qu’un journal télévisé en direct était diffusé depuis un studio de télévision surplombant la place des Omeyyades.

L’État hébreu a également bombardé des chars syriens déployés à Suwayda.

Al-Sharaa mobilise les clans

Malgré l’intervention israélienne, quelque 500 Druzes ont été tués dans la seule matinée du jeudi 17 juillet à Soueïda, dont la plupart étaient des civils assassinés chez eux, rapporte Al-Daraj.

Le site note également qu’une campagne médiatique a été orchestrée pour affirmer que les Druzes sont responsables de ces massacres. Cette campagne comprenait la diffusion de photomontages montrant prétendument des atrocités commises par les Druzes sur des Bédouins locaux.

Presque immédiatement, les troupes syriennes ont été rejointes à Souweida par 7 000 à 10 000 combattants arabes des tribus Al-Oqaydat et Al-Nu’aim, venus de Deir Ezzor, à plus de 1000 km de là, pour se venger des Druzes, alors que ces tribus n’avaient aucun lien avec les tribus arabes de Soueïda.

Selon Al-Daraj, des combattants tribaux sont arrivés depuis des zones de Deir Ezzor contrôlées non seulement par Hayat Tahrir al-Sham (HTS) de Sharaa, mais aussi par les Forces démocratiques syriennes (FDS), soutenues par les États-Unis et sous commandement kurde. Ils ont pu aisément franchir les checkpoints contrôlés par les deux groupes.

Cette mobilisation a été menée par des membres éminents du gouvernement syrien issus de chaque tribu, dont Mohammed al-Jassim, dit “Abu Amsha”, un haut gradé du ministère de la Défense qui a dirigé les massacres de civils alaouites sur la côte syrienne en mars, Hussein al-Salameh, ministre syrien des Services de renseignement, et Youssef al-Hajr, un haut gradé de HTS.

“Le plan de mobilisation tribale, le mode de déplacement des combattants et leur passage rapide des checkpoints de sécurité et militaires montrent qu’il ne s’agissait pas d’une réaction spontanée ou d’une riposte, mais d’un plan alternatif bien élaboré, mis en œuvre immédiatement après l’échec de la première attaque contre Souweida”, conclut Al-Daraj.

Alors que les FDS, alliées des États-Unis et d’Israël, ont laissé les combattants tribaux traverser leurs checkpoints, l’armée de l’air israélienne n’a pris aucune mesure pour bombarder leurs convois alors qu’ils traversaient le désert syrien à découvert pendant des heures.

Le rôle des États-Unis et d’Israël

Wael Essam a également rapporté que l’offensive du gouvernement syrien sur Souweida a été planifiée à l’avance.

Le 17 juillet, il a écrit que

“les forces gouvernementales se préparaient depuis une semaine à attaquer Soueïda sous prétexte de l’histoire des Bédouins”.

Selon des sources gouvernementales, Mukhtar al-Turki et Abu al-Hassan al-Urduni supervisaient les préparatifs de l’attaque, sous la direction de Sharaa.

Non seulement l’assaut contre Soueïda a été prémédité, mais Sharaa et ses commandants militaires ont également été encouragés à engager l’offensive par des responsables américains.

“L’appareil sécuritaire a reçu de fausses informations de sources proches des Américains, selon lesquelles les Israéliens n’interviendraient pas, quoi qu’il arrive à Soueïda. Le ministère de la Défense a poursuivi ses opérations, contrairement à l’accord préalablement conclu avec les Américains et les Israéliens”, a rapporté Wael Essam.

Selon lui, Sharaa n’aurait jamais lancé l’attaque contre Soueïda sans l’autorisation des États-Unis et d’Israël, car le Premier ministre Benjamin Netanyahu avait précédemment promis de défendre les Druzes de Soueïda et exigé que le sud de la Syrie reste une “zone démilitarisée”.

De plus, le bombardement par Israël du ministère de la Défense, situé près de la place des Omeyyades, a été coordonné avec les services de renseignement turcs afin de s’assurer qu’aucun responsable militaire syrien important ne soit tué.

“Avant de bombarder le quartier général de l’état-major, les Turcs ont informé un certain nombre de responsables gouvernementaux de l’urgence de quitter leurs postes et d’évacuer leurs familles de Damas”, a ajouté Essam.

Le “feu vert” donné à Sharaa

Deux jours plus tard, des détails supplémentaires ont émergé, indiquant que les États-Unis et Israël avaient poussé Sharaa à attaquer Soueïda.

“Damas pensait avoir reçu le feu vert des États-Unis et d’Israël pour envoyer ses forces dans le sud, malgré les avertissements réitérés d’Israël lui demandant de ne pas le faire”, a rapporté Reuters le 19 juillet.

“Le gouvernement syrien a mal interprété la réponse d’Israël au déploiement de ses troupes dans le sud du pays cette semaine-là, sous l’influence de messages américains selon lesquels la Syrie devrait être gouvernée comme un État centralisé”, ont déclaré à Reuters huit sources proches du dossier.

L’agence de presse a expliqué que cette interprétation se basait sur des commentaires “publics et privés” de l’envoyé spécial américain pour la Syrie, Thomas Barrack, ainsi que sur les “premiers pourparlers de sécurité” avec Israël en Azerbaïdjan.

Il est toutefois très improbable que Sharaa et son état-major aient “mal interprété” ou “mal compris” les messages américains et israéliens. Comme le souligne Reuters, les responsables syriens et israéliens étaient en contact direct dans le cadre de pourparlers de sécurité en cours à Bakou, en Azerbaïdjan.

Ces négociations ont “abouti à un accord sur le déploiement de troupes dans le sud de la Syrie afin de placer Soueïda sous contrôle gouvernemental”, a ajouté Reuters, indiquant une fois de plus que les préparatifs pour attaquer et prendre le contrôle de Soueïda étaient en cours depuis une semaine, et que le conflit entre Druzes et Bédouins n’était qu’un prétexte.

De plus, les autorités syriennes ont directement coordonné le déploiement de chars à Soueïda avec leurs homologues israéliens.

Mercredi 16 juillet, Axios a rapporté qu’un responsable américain a déclaré que

“la Syrie a informé Israël à l’avance de l’envoi des chars et a déclaré que sa réponse ne concernait pas Israël”.

Malgré cette coordination évidente, l’armée israélienne a bombardé les chars, affirmant dans un communiqué qu’ils étaient entrés dans une zone dont Israël exigeait la démilitarisation et

qu’“Israël ne permettrait pas un massacre des Druzes en Syrie”.

Cette explication est peu probable, compte tenu de la coordination étroite entre les deux pays et de la volonté manifeste de Sharaa de ne pas combattre les troupes d’occupation israéliennes.

Nouveau “feu vert” d’Israël

Deux jours plus tard, le vendredi 18 juin, alors que les Druzes terrifiés continuaient d’attendre en vain qu’Israël et les États-Unis interviennent pour mettre fin au massacre, Israël a laissé commettre de nouveaux massacres en autorisant “la présence limitée” des forces syriennes à Soueïda pendant “48 heures”.

Cette nuit-là, Sharaa a annoncé le déploiement de troupes dans le sud pour mettre fin aux affrontements, a rapporté Reuters, répétant le mensonge selon lequel le président syrien et ancien commandant de l’État islamique tentait de mettre fin aux massacres.

Reuters a renouvelé cette affirmation, alors qu’il était largement admis, y compris dans les reportages précédents de l’agence, que les combattants du ministère de la Défense et de la Sécurité intérieure étaient à l’origine des massacres.

Le feu vert israélien autorisant les forces affiliées au gouvernement syrien à entrer de nouveau à Soueïda et à perpétrer de nouveaux massacres est révélé dans le même article.

L’agence rapporte que ses reporters ont observé un convoi de combattants de la Sécurité générale syrienne arrêté sur une route de la province de Deraa, “attendant le feu vert ultime pour entrer à Soueïda”.

“Mais des milliers de combattants bédouins ont continué d’affluer à Soueïda vendredi”, ont déclaré les journalistes de Reuters“faisant craindre aux habitants que les violences ne se poursuivent”.

Des combattants “tribaux” ?

Le lendemain matin, samedi 18 juillet, un nouveau cessez-le-feu a été annoncé à l’issue de réunions entre le chef spirituel druze, Hikmat al-Hijri, et des responsables américains, syriens et jordaniens à Amman.

Cependant, un journaliste syrien qui s’est rendu dans plusieurs villages autour de Soueïda le dimanche 19 juillet a déclaré au site d’information The Cradle que les forces de sécurité syriennes continuaient de laisser passer les combattants tribaux arabes et les pillards bédouins par leurs checkpoints pour entrer dans les villages druzes et dans la ville de Soueïda.

Certains des combattants arabes tribaux avec lesquels il s’est entretenu se vantaient d’être employés par le ministère de la Défense, sans pour autant porter leur uniforme.

Tout en combattant de manière informelle au sein de milices tribales, ils utilisaient des armes distribuées par ce ministère, notamment des drones, des mitrailleuses lourdes, des missiles Grad et des fusils de précision.

Comme le confirment des vidéos en ligne, a-t-il déclaré, beaucoup portaient des insignes de l’État islamique, y compris un membre de la Sécurité générale qu’il a réussi à photographier. Ils ont exprimé leur admiration pour l’ancien chef de l’organisation terroriste, Abou Bakr al-Baghdadi, et leur désir de détruire les Druzes au nom de l’islam.

Quelle est la stratégie d’Israël ?

Malgré les déclarations des responsables syriens, israéliens et américains affirmant vouloir protéger les Druzes, on veut nous faire croire que les puissances mondiales ont été incapables d’empêcher les tribus arabes et bédouines d’entrer à Soueïda pour poursuivre le pillage et les massacres.

En réalité, Israël et les États-Unis ont non seulement permis le massacre à Soueïda, mais ils l’ont même orchestré en coordination avec le régime syrien.

Face à l’horreur des massacres, de plus en plus de Druzes estiment désormais qu’ils n’ont d’autre choix que de se tourner vers Israël, dans l’espoir que l’État hébreu les protège des forces liées à l’État islamique qui dirigent Damas.

Plus les Druzes se tournent vers Israël, plus ils sont perçus comme des “traîtres” par de nombreux sunnites syriens, alimentant ainsi les divisions communautaires dans le pays.

Israël est désormais en mesure d’utiliser sa prétendue “protection” des Druzes comme prétexte pour étendre son occupation du sud de la Syrie, y compris Soueïda, et pour établir le “couloir de David”, un corridor reliant le plateau du Golan occupé par Israël à la base militaire américaine d’Al-Tanf, en passant par les zones contrôlées par les FDS, alliés kurdes d’Israël, dans le nord-est de la Syrie, et jusqu’en Irak.

Alors qu’elle évoque le feu vert initial donné par Israël, l’agence de presse Reuters souligne elle-même que les massacres de Druzes à Soueïda serviront bientôt les objectifs de longue date d’Israël.

“Avec davantage de sang versé et la méfiance des minorités à l’égard du gouvernement de Sharaa, on peut craindre que la Syrie ne se fragmente en plusieurs mini-États”, a écrit l’agence, citant un haut responsable du Golfe, qui partage l’objectif d’Israël de maintenir la Syrie “affaiblie et décentralisée”.

En bref, Israël a utilisé une tactique mafieuse vieille comme le monde. Tout comme un chef de gang qui envoie ses hommes de main terroriser un commerçant avant de lui demander de payer pour sa “protection”, Israël se présente désormais comme le sauveur d’une crise qu’il a contribué à créer, utilisant le bain de sang de Soueïda pour légitimer son occupation permanente et redessiner la carte du sud de la Syrie à son avantage.


Source originale en anglais :

https://thecradle.co/articles/how-the-us-and-israel-partnered-with-syrias-new-president-to-massacre-the-druze

Source en français : https://ssofidelis.substack.com/p/les-etats-unis-and-israel-ont-fait

URL de cet article : https://lherminerouge.fr/les-etats-unis-israel-ont-fait-alliance-avec-le-nouveau-president-syrien-pour-massacrer-les-druzes-sofs-29-07-25/

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