
Le Secours populaire du Finistère tire la sonnette d’alarme. Le nombre de personnes qui sollicitent l’association à Brest est en constante augmentation, créant une certaine tension pour les bénévoles.
Par Isabelle JAFFRE.
« On veut tirer la sonnette d’alarme car il y a une invisibilité, une banalisation de la pauvreté aujourd’hui », s’indigne Thierry Cloâtre, secrétaire général du Secours populaire du Finistère. Alors que l’association lance sa campagne annuelle « Pauvreté Précarité », ses bénévoles témoignent de demandes d’aide toujours plus nombreuses. « Cet été, il y a eu un jour où 80 personnes faisaient la queue dès 8 h pour avoir un rendez-vous d’aide alimentaire. Le bureau n’ouvre qu’à 9 h », relate ainsi le secrétaire général.
Toujours plus de bénéficiaires
Au niveau national, selon l’étude Ipsos commandée par le Secours populaire, 62 % des Français disent avoir connu une situation de pauvreté, un chiffre en hausse de 4 points par rapport à 2023. « Ces chiffres reflètent aussi ce qui se passe à Brest », note Thierry Cloâtre. « Il y a 15-20 ans, on a vu arriver les premiers retraités. Il y a 10 ans, les premiers étudiants. Aujourd’hui c’est un raz de marée… »
C’est dur moralement de devoir dire que l’on n’a plus de place. C’est un sentiment d’impuissance assez désespérant
« Avant j’avais tout, je me retrouve sans rien », témoigne par exemple Paulette, 65 ans. En tant que salariée dans la grande distribution, tout allait bien pour elle jusqu’à ce que la maladie la touche. « J’ai été hospitalisée longuement. Et puis mise en invalidité, mais sur un contrat de 30 heures hebdomadaire, cela ne fait pas grand-chose. » Aujourd’hui retraitée, elle dépend du Secours populaire depuis plus de 20 ans pour s’en sortir.
Le nombre croissant de bénéficiaires (12 124 personnes rencontrées en 2023 contre 11 897 en 2022 à Brest), créé aussi une certaine tension pour les bénévoles. « C’est dur moralement de devoir dire que l’on n’a plus de place. C’est un sentiment d’impuissance assez désespérant », ajoute Thierry Cloâtre.
Des actions qui fonctionnent
Pourtant le secrétaire général ne veut pas céder à l’abattement. « En moyenne, les gens viennent 3,4 fois par an chez nous. Cela veut dire que des gens s’en sortent. C’est possible ! », insiste-t-il. Le Secours populaire 29 affiche un budget de 11 M€ par an, dont 9 M€ sont la valorisation du temps des bénévoles, des dons reçus, notamment matériels. La solidarité fonctionne d’autant mieux que même des bénéficiaires s’impliquent. C’est le cas de Ndongala Raison. Arrivé en France en mai 2023 avec sa famille, c’est l’aide d’un bénévole d’Utopia à Paris qui lui a donné envie de s’investir à son tour. « Quand je suis arrivé à Brest, j’ai décidé de faire ça. Ça m’aide aussi à gérer mon stress, j’apprends des choses, je rencontre des gens. Ici c’est comme une famille avec du respect et de l’amour », explique-t-il.
Pour étendre son action au-delà de Brest, le Secours populaire a également mis en place en janvier un « Solidaribus » pour atteindre les zones rurales en commençant par le secteur de Huelgoat. 15 familles y sont suivies. L’objectif est désormais d’aller voir ailleurs : Cap-Sizun, la côte nord du Finistère, etc. « La mise en place demande du temps pour gagner la confiance des gens », constate Bastien Caban, l’animateur départemental de l’association.
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