
L’inflation pèse de plus en plus sur les porte-monnaie. Aux Restos du cœur, on le constate autant au niveau des approvisionnements que des bénéficiaires. La situation est compliquée, mais ici, on fait face.
Inflation. Ce mot est partout. Dans les journaux, à la radio, la télé, sur les réseaux ou au comptoir du bistrot du coin. Mais derrière ce mot : des gens, de plus en plus nombreux à se retrouver dans la galère. Au 2, rue des Prunus, à Dinan, on ne le sait que trop. En première ligne face à la précarité, les Restos constatent les effets de cette inflation galopante. Le révélateur le plus parlant : le nombre d’inscriptions.
Pas de livres, trop chers…
En ce jeudi 8 décembre, à 11 h, quand Danièle Quirino-Chaves, la responsable des lieux, nous reçoit dans son bureau chauffé par un mini-radiateur mobile, les enfants de Coluche dinannais comptabilisent déjà près de 340 inscriptions « alors que la campagne d’hiver débute tout juste ». Une 339e famille vient de s’inscrire ce matin. « C’est beaucoup pour un début de campagne. À titre de comparaison, à la fin de celle d’été, qui s’étend de mi-mars à fin novembre, on en était à 640 familles. Là, déjà 339 donc », nous explique Danièle.

Assise à son bureau, la responsable de l’antenne des Restos est un peu inquiète. « Le problème, c’est qu’on va recevoir de plus en plus de monde, alors qu’on reçoit de moins en moins de marchandises de Paris ». C’est en effet de la capitale que les Restos approvisionnent ensuite les départements. Et les camions sont un peu moins chargés semble-t-il. Car tout est cher aujourd’hui. « Oui, c’est à cause de l’inflation tout ça je pense », confie Danièle. Elle enchaîne alors. La voix plus grave : « cette année, aux Restos, on ne va pas pouvoir offrir de livres aux 13-15 ans à Noël, parce que ça coûte trop cher ». La distribution de jouets aux plus petits a été sauvée, ainsi que le goûter de Noël du 17 décembre. C’est déjà ça.

Ne pas dépasser
Le ton est amer, mais pas question de s’apitoyer. Ici, un sourire chasse vite les idées grises. « On sait que ça va être problématique les prochaines semaines, mais on va faire face », ne doute pas un instant Danièle. Outre les camions de Paris, la campagne nationale au printemps, l’antenne de Dinan peut compter sur ses ramasses hebdos dans des grandes surfaces ou commerces du coin. Les gars de la ramasse, « Luc, Étienne, Jean-Luc et compagnie?», rapportent des produits frais comme des légumes, des fruits, des yaourts… Ça fait du bien.
Et lors des distributions, la trentaine de bénévoles, tous retraités, à se relayer les mercredis et jeudis dans les locaux de la rue des Prunus, font aussi plus attention aux paniers des bénéficiaires. « Je dis aux bénévoles de faire très attention à ce qu’ils donnent, de ne pas dépasser tel nombre de conserves par personne. On doit vraiment faire très attention, on n’a pas le choix », glisse Danièle.

Une coiffeuse ou un coiffeur espéré
Le contexte économique et social est dur. Très dur. « Chez nos bénéficiaires, certains, avec l’inflation, ne peuvent même plus s’acheter un paquet de pâtes… Beaucoup ne peuvent plus faire face à leurs charges d’électricité notamment. Il y a beaucoup de surendettement. On croise même des gens qui dorment dans leur voiture, dont une personne qui travaille pourtant… » Il y a quand même des bonnes nouvelles comme la réouverture prochaine de la bibliothèque tenue par Monique, fidèle bénévole, fermée depuis la covid. Car ici, on ne remplit pas que les ventres. On peut aussi lire, trouver une écoute, bénéficier de cours de français, d’un accompagnement scolaire, etc. « On fait le maximum pour les gens », sourit Danièle Quirino-Chaves. Un point la chagrine toutefois. « On n’a plus de coiffeuse… Alors on lance un appel aux volontaires ».
Pratique
Restos du cœur, à Dinan, 2, rue des Prunus. Tél. 02 96 87 32 15. Mail : ad22.dinan@restosducoeur.org

Auteur : Arnaud Le Hir