À Vannes, « fermer nos cabinets médicaux nous fait de la peine, mais la colère est là »(LT.fr-30/11/22)

Un appel à la grève des médecins généralistes est lancé ce jeudi 1er décembre.
À Vannes, une partie des médecins généralistes de ville débrayent ce jeudi 1er décembre. Une mobilisation rare, pour défendre un métier qu’ils craignent de voir disparaître et qu’ils estiment totalement méprisé.

À Ménimur, le cabinet médical de la place Auffret sera désert, ce jeudi 1er décembre. Les patients ont été avertis en amont que les trois généralistes et leur remplaçante débrayaient, par une affiche de Médecins pour demain, à l’initiative du mouvement, placardée dans la salle d’attente. Le collectif est suivi par au moins 500 médecins dans le Morbihan et les Côtes d’Armor. Tous se retrouvent sur ce constat : le métier ne fait plus envie, d’où le manque criant de généralistes libéraux. « C’est un mouvement parti de la base et il compte beaucoup de jeunes médecins », constate le Dr Didier Le Vaguerès, doyen du cabinet.

Rongés par l’administratif

« Remplir le dossier médical partagé, gérer les affections de longue durée, etc., ça me prend une journée par semaine, explique Dr Ronan Le Mer, son associé. Les arrêts de travail de moins de trois jours, les certificats médicaux, on pourrait arrêter de les faire ». À cela s’ajoute le temps passé sur la « rémunération sur objectifs de santé publique », partie immergée de l’iceberg sur lequel s’échouent les médecins. « On a des primes à l’objectif comme dans une entreprise. En santé, c’est inacceptable, s’insurge le Dr Nicolas Ambroselli, à Surzur. On fait une moyenne des prises de sang de nos patients diabétiques et si la glycémie est meilleure de tant, on a une prime. On peut être persuasif sur le traitement, mais après ça dépend du patient. La médecine n’est pas une science exacte ». À Ménimur, le Dr Le Mer abonde : « On nous demande de faire des prescriptions qui ne sont pas forcément adaptées au patient, pour remplir un objectif ».

Revaloriser l’acte

Pour mettre fin à « ce chantage aux primes », les médecins grévistes réclament la hausse de l’acte, actuellement de 25 €, à 50 €, pour rejoindre la moyenne européenne. En échange, le collectif Médecins pour demain est prêt « à renoncer à des subventions et forfaits (…) qui n’ont jamais fait la preuve de leur utilité médicale ». « Il faut revaloriser l’acte, ça nous recentre sur le patient », souligne Mathieu Osselin, gréviste mais réquisitionné par SOS Médecins pour les visites en soirée. Cela permettrait aussi aux cabinets d’embaucher des secrétaires et assistants médicaux, un luxe que ne peut pas se permettre, par exemple, le trio du cabinet de Ménimur. « Et on est nombreux à s’équiper d’échographes, précise le Dr Ambroselli, ça coûte cher. Il faut que la consultation soit indexée sur l’inflation ».

Le dernier bout du saucisson

Autre grand motif d’inquiétude pour ces praticiens, la délégation des tâches aux infirmiers, aux kinés, aux pharmaciens, etc. « Ça peut sembler une bonne idée, mais on va passer plus de temps pour rattraper des prescriptions. Il n’y a pas de petit acte. Une infection urinaire peut cacher une colique néphrétique. Ça va encore être le médecin généraliste qui va coordonner ». « L’État saucissonne les soins, et le médecin n’a pas envie d’être le dernier bout du saucisson », résume le Dr Ambroselli. La grève n’aurait pas pu tomber plus mal, en pleines épidémies de grippe et de bronchiolite, cette dernière ayant justifié le déclenchement du plan blanc, mercredi, au CHBA de Vannes. « Fermer nos cabinets nous fait de la peine, car on aime notre métier passionnément. Mais la colère est là ».

Caroline LAFARGUE

source: https://www.letelegramme.fr/morbihan/vannes/a-vannes-fermer-nos-cabinets-medicaux-nous-fait-de-la-peine-mais-la-colere-est-la-30-11-2022-13231833.php

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