
Président de la commission médicale d’établissement, lors du recrutement de Joël Le Scouarnec, le témoin a indiqué, ce vendredi 16 mai 2025, devant la cour criminelle du Morbihan, qu’il n’était pas au courant de sa condamnation de 2005. Aux gendarmes charentais, déjà sous serment, il a dit le contraire. Il encourt des poursuites pénales
Par Nicolas EMERIAU.
« Je n’ai jamais été informé, je le jure. » À la barre de la cour criminelle du Morbihan, Henri Sandillon, 73 ans, est catégorique : il « ne savait pas » que Joël Le Scouarnec avait été condamné en 2005 pour détention d’images pédopornographiques.
Le problème, c’est que celui qui était président de la commission médicale d’établissement lors du recrutement du chirurgien, a déclaré l’inverse lors de son audition à la gendarmerie, en 2017. Sous serment déjà, et à deux reprises.
« Je ne pense pas qu’il mente »
Étiez-vous informé de la condamnation de Joël Le Scouarnec ? « Oui, je l’ai appris de sa propre bouche. Il m’a expliqué que les flics avaient trouvé des images sur son ordinateur. Il a minimisé en me disant que c’était une bêtise de sa part. Il m’a appris cela dans les temps qui ont suivi sa titularisation », précise-t-il au gendarme.
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Un peu plus tôt, l’enquêteur lui avait demandé quelle fut sa réaction en apprenant la mise en examen de son confère pour des faits de pédophilie : « J’ai dit : quel con, il a récidivé », répond le témoin.
Joël Le Scouarnec, lui-même, a dit, lors de l’instruction et à l’audience, avoir informé la directrice de l’hôpital de Jonzac et le président de la commission médicale d’établissement de sa condamnation. « Est-ce qu’il ment ? », questionne la présidente Aude Buresi. « Je ne pense pas qu’il mente. Je pense qu’il minimise comme font beaucoup de gens qui ont été condamnés. Il ne m’a absolument pas parlé d’images, il m’a dit bêtise. »
« On aurait dû en parler »
« Et vous n’avez pas demandé d’explications ? », interroge alors la magistrate. « Il m’a dit qu’il avait été absous. Je crois en la bonne foi des gens et en leur possibilité de s’amender ». Questionné de nouveau, le septuagénaire finit par reconnaître que, oui, « maintenant que vous le dites, c’est vrai on aurait dû en parler. »
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Mais, sur le recrutement de Joël Le Scouarnec, il n’avait, assure-t-il, dans le cadre de ses fonctions, « qu’un avis consultatif ». Et l’ancien médecin ORL de Jonzac affirme qu’il n’aurait « pas eu connaissance de son dossier » en rejetant la responsabilité sur « l’ordre des médecins » et sur « la direction de l’hôpital ». « Si je l’avais su, j’aurais mis mon veto. »
Il aurait mal lu sa déposition
Pour tenter d’expliquer ce qui apparaît, a minima comme un revirement, le témoin indique qu’il aurait « mal lu (sa) déposition ». Et s’il a parlé de récidive, à la gendarmerie de Jonzac, ce n’est pas parce qu’il avait eu connaissance de faits antérieurs, mais parce que son épouse, psychiatre, lui aurait dit que ce type de personne « recommence à chaque fois ».
De la présidente de la cour, à une avocate de la partie civile, en passant par l’avocat général, ils sont plusieurs à lui signaler qu’on ne doit pas mentir sous serment. Pour lui redonner une chance de revenir sur ses propos à la barre. La peine encourue (7 ans de prison et 100 000 € d’amende) est rappelée, mais le témoin ne reviendra pas sur sa déposition. Il a donc menti, soit devant les gendarmes, soit devant la cour criminelle. La cour en prend acte, ouvrant la voie à une éventuelle procédure judiciaire à son encontre.
Invité à s’exprimer après cette déposition, Joël Le Scouarnec, qui la veille s’était dit « désolé d’avoir trahi » ses anciens confrères, indique simplement n’avoir « aucune observation à faire »…
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