Après le 10 septembre, le mouvement cherche sa stratégie pour durer (Reporterre-11/09/25)

Mobilisation devant gare du Nord, à Paris, le 10 septembre 2025. – © NnoMan Cadoret/Reporterre

Faire la grève générale ? S’inspirer des Gilets jaunes ? Des milliers de militants du mouvement du 10 septembre ont tenté de préparer la suite, à Paris, pour durer dans le temps.

Par Justine GUITTON-BOUSSION et NnoMan CADORET (photographies)

Paris, reportage

Comment poursuivre le mouvement « Bloquons tout » dans la durée ? La question était sur toutes les lèvres, le 10 septembre en fin d’après-midi. Partout en France, 175 000 personnes ont manifesté, selon le ministère de l’Intérieur — 250 000 d’après la CGT. À Paris, la journée, émaillée de manifestations sauvages et de tentatives de blocage du périphérique, s’est achevée sous la pluie, mais dans une ambiance jeune et festive, sur la place des Fêtes, dans le 19e arrondissement. Des milliers de personnes se sont rassemblées pour célébrer et envisager la suite.

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Quand on lui pose la question, abrité sous la tonnelle d’un commerce, Aymeric [*] réfléchit, puis dit simplement : « Il faut la grève générale. » Au centre de la place, sous un parapluie, Selma développe davantage. Elle explique espérer que le mouvement « Bloquons tout » devienne un moment récurrent. « Les Gilets jaunes, c’était tous les samedis, tout le monde le savait, et c’est ça qui a permis de durer dans le temps, pense-t-elle. Il faut que ce mouvement soit récurrent, et pas forcément dès demain ou toute la semaine. »

Selon elle, le fait qu’un appel à la grève nationale ait déjà été lancé le 18 septembre permet justement d’anticiper et de « maintenir la détermination ». Un avis partagé par Pierre, plus loin sur la place : « Les Gilets jaunes ont eu plus d’impact, ils ont été plus entendus que les grèves sur une journée. Il faut continuer dans la durée. »

Plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées place des Fêtes, à Paris, pour préparer la suite. © NnoMan Cadoret/Reporterre

Pour maintenir la pression, Mariane estime aussi qu’un travail de communication doit être poursuivi. « Il faut continuer d’informer et de s’informer sur les réseaux, affirme-t-elle. Il faut maintenir cet énervement, comme on l’a fait pendant les élections législatives [de 2024] par exemple. »

Autre suggestion : continuer de multiplier les modes d’action. Aux côtés de Selma et Mariane, Anissa raconte ne pas pouvoir systématiquement faire grève à son travail. « Il faut que chaque Français ancre dans sa tête que tout est important. Même les jours où on ne peut pas faire grève ou on ne peut pas aller manifester, il y a d’autres moyens d’agir, comme ne pas utiliser sa carte bleue, ou ne pas consommer », argue-t-elle. Selon elle, se rappeler cela permettra d’inscrire le mouvement dans la durée.

Manon et Pierre ont participé au rassemblement place des Fêtes, à Paris. © NnoMan Cadoret/Reporterre

Inclure de nouvelles personnes

À Paris, plusieurs personnes ont déploré que le mouvement n’ait pas attiré de nouveaux militants. « Ce sont surtout des jeunes de cet arrondissement qui sont là aujourd’hui sur la place des Fêtes. C’est cool, mais on aimerait que ce soit plus diversifié, plus représentatif de la population », avance Lily [*], à l’abri des gouttes de pluie sous un préau.

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Pour faire venir davantage de personnes dans les manifestations et les actions de blocage, elle suggère d’associer des artistes au mouvement, plus « modernes » que le rappeur HK — dont le concert gratuit, donné en fin de journée sur la place des Fêtes, a toutefois revigoré la foule. « C’est stratégique, tous les moyens sont bons pour attirer les personnes qui ne sont pas militantes de base », poursuit-elle.

Le rappeur HK a joué «  On lâche rien  » sous une pluie battante, place des Fêtes, à Paris. © NnoMan Cadoret/Reporterre

« Beaucoup de gens sont d’accord avec les revendications du mouvement, mais ils décident de se battre dans leur coin. Il faut leur faire comprendre qu’il faut une solution collective », abonde William, quelques mètres plus loin. Son amie Elsa approuve et prédit : « Plus de gens doivent se sentir concernés et doivent rejoindre le mouvement pour que politiquement ça suive. »

Reste à voir si cela pourra advenir avant le 18 septembre, journée d’appel à la grève portée par l’ensemble des syndicats.

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Source: https://reporterre.net/Apres-le-10-septembre-le-mouvement-cherche-sa-strategie-pour-durer

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