Arrestation de 11 leaders indépendantistes (L’Huma-20/06/24)

Christian Téin, l’un des dirigeants politiques de L’UC et de la CCAT

Tandis que l’hexagone détourne les yeux, la répression militaire et judiciaire se déchaîne contre les militants. Ces derniers appellent à nouveau au calme malgré une énième provocation.

Par Benjamin KOENIG.

Affairés en métropole à légitimer l’extrême droite, le chef de l’état et le gouvernement poursuivent en Kanaky – Nouvellecalédonie leur répression coloniale. Aux 3 000 policiers et militaires déployés, aux colonnes de blindés Centaure qui sillonnent les routes, s’ajoute une répression judiciaire féroce, avec près de 1 000 arrestations depuis 38 jours et le début des révoltes sur le territoire.

Un nouveau palier a été franchi ce 19 juin, avec l’arrestation de personnalités politiques. Onze militants de la Cellule de coordination des actions de terrain, la fameuse CCAT, ont été arrêtés au matin, juste avant un point de presse. «Les principaux responsables de la CCAT ont été interpellés alors qu’ils se rendaient à l’avenir (le siège du parti l’union calédonienne, une des composantes principales du FLNKS – NDLR) pour la conférence de presse prévue ce matin, dont notre commissaire général M. Bichou Téin», a réagi l’union calédonienne (UC). Bichou Téin n’est autre que Christian Téin, l’un des dirigeants politiques de L’UC et de la CCAT. Cette dernière en est d’ailleurs une émanation, organe politique de mobilisation créé en novembre 2023, avec d’autres partis et des syndicats, le plus important étant l’union syndicale des travailleurs kanak et des exploités (Ustke).

Le procureur de la République, Yves Dupas, s’est félicité de ces arrestations dans le cadre de l’enquête menée par la gendarmerie de Nouméa avec le concours de « la sous-direction antiterroriste ». Peu surprenant quand on sait que Gérald Darmanin, le ministre de l’intérieur, avait ciblé la CCAT en parlant d’un groupe « mafieux ».

LES DANGERS DE L’ORDRE COLONIAL

Les chefs d’accusation sont lourds: «Association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un crime ou d’un délit, vols avec arme et en bande organisée, destruction de biens par incendie en bande organisée, complicité par instigation de crimes de meurtre et tentative de meurtre sur personne dépositaire de l’autorité publique. »

Comme il est prévu par la loi pour des crimes potentiels, la garde à vue peut durer jusqu’à 96 heures. « Comme on s’en doutait, l’état français persiste dans ses manoeuvres d’intimidation. Ces arrestations étaient prévisibles», indique L’UC, qui dénonce des « arrestations abusives », alors que le procureur semble plus occupé à poursuivre des dirigeants politiques indépendantistes qu’à rechercher les auteurs des meurtres de jeunes Kanak. L’UC évoque le sujet en ces termes : « Des responsables locaux anti-indépendantistes et des miliciens criminels se pavanent en toute liberté. » Avant d’appeler la jeunesse au calme, « tant sur le terrain que sur les réseaux sociaux », car « l’ordre et la justice coloniale sont dangereux ».

La CCAT a aussi publié un communiqué qui s’adresse en priorité à ses militants, « préparés à cette éventualité ». Des centaines d’indépendantistes sont déjà passés derrière les barreaux ou tombés sous les balles françaises depuis plus de quarante ans. « Cela fait partie de l’engagement de chacun de nous», écrit la CCAT, qui exhorte « l’ensemble des militants indépendantistes à ne pas répondre à cette nouvelle provocation ». Depuis le 14 mai, neuf personnes ont été tuées, dont sept jeunes Kanak.

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Source: L’Humanité du 20 juin 2024-page 12

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