
À l’ouverture de son procès à Vannes (Morbihan), Joël Le Scouarnec a reconnu ce lundi 24 février qu’il reconnaissait « la plupart » des violences sexuelles commises sur les 299 victimes. Mais les questions restent nombreuses.
Par Pierrick BAUDAIS et Yvan DUVIVIER.
Au sein de sa famille, qui savait que Joël Le Scouarnec, chirurgien, était un pédocriminel, ayant notamment agressé plusieurs de ses nièces ? Que savait précisément son ex-femme qui devrait être entendue ce mardi par la cour criminelle départementale du Morbihan, où Joël Le Scouarnec est jugé depuis ce lundi 24 février pour des violences sexuelles commises sur 299 personnes ? Et pour quelles raisons l’Ordre des médecins n’a-t-il pris aucune sanction après qu’il fut condamné, en 2005, à quatre mois de prison avec sursis pour avoir téléchargé des images pédopornographiques ? Ce chirurgien qui opérait nombre d’enfants de l’appendicite, a encore pu continuer à exercer durant douze ans…
Revivez la première journée d’audience du procès de Joël Le Scouarnec
« J’espère que les langues vont se délier »
Quels ont donc été ces dysfonctionnements qui ont permis que Joël Le Scouarnec, aujourd’hui âgé de 74 ans, viole ou agresse sexuellement des enfants durant environ trente ans ? Beaucoup d’articles de presse ont déjà été publiés. « Je forme le vœu que les quatre mois d’audience nous convainquent que les débats judiciaires ont encore leur utilité », a néanmoins insisté Aude Buresi, la présidente de la cour criminelle, lors de l’ouverture du procès ce lundi à Vannes.
Pour cette affaire hors normes, les questions sont en effet nombreuses. Et l’attente des victimes est forte. « On aurait pu l’arrêter. J’espère que les langues vont se délier », soupire une femme, victime du chirurgien alors qu’elle avait été opérée à Loches (Indre-et-Loire) en 1991. Devant le tribunal, les médias sont nombreux à tendre les micros. Mais peu de victimes s’expriment encore. À midi, à l’appel de plusieurs organisations (dont le Syndicat de la médecine générale et Nous toutes Vannes), plusieurs dizaines de personnes dénoncent la passivité de l’Ordre des médecins
. Et dans la salle d’audience, lorsque le conseil départemental de l’ordre des médecins (CDOM) du Morbihan annonce se constituer partie civile, des avocats s’y opposent immédiatement. « C’est moralement indécent et juridiquement contestable », s’indigne Me Frédéric Benoît pour l’association La voix de l’enfant. Dans un communiqué, le CDOM indique, lui, que le Dr Le Scouarnec a été inscrit dans le Morbihan de mai 1994 à octobre 2004 : « Pendant cette période, le CDOM 56 n’a été destinataire d’aucune information le concernant. Aucune plainte. Aucun signalement. »
Un accusé très à l’écoute
Dans cette ambiance quelque peu retenue, en cette première journée d’un procès peu commun, on en oublierait presque l’accusé. Vêtu d’un blouson noir, conservant quelques cheveux blancs et chaussant de fines lunettes, il s’est montré très attentif à la mise en place du procès. « J’ai commis des actes odieux. Je comprends la souffrance que j’ai pu provoquer […] Je leur dois d’assumer la responsabilité de mes actes », a-t-il déclaré, en fin de journée, de manière posée. Ses actes, mais rien de plus. L’accusé a aussi rappelé que, lors de l’instruction, s’il s’était efforcé de reconnaître les violences sexuelles qu’il avait commises, il avait aussi précisé au juge d’instruction ceux de ces viols qui n’en étaient pas à mes yeux
.
De son côté, la présidente de la cour a précisé, de manière peu coutumière, qu’elle n’entendait laisser aucune victime sur le bord du procès. Y compris celles dont les faits sont prescrits. Ces victimes-là, « celles qui le souhaitent, pourront être entendues par la cour… », a-t-elle précisé.
°°°
URL de cet article: https://lherminerouge.fr/au-premier-jour-du-proces-le-scouarnec-des-aveux-mais-de-nombreuses-interrogations-of-fr-24-02-25/