Au procès du RN, Marine Le Pen nie être le « cerveau d’un système » (H.fr-5/11/24)

Marine Le Pen arrive au palais de justice de Paris, le 5 novembre 2024.
© STEPHANE DE SAKUTIN / AFP

La députée d’extrême droite a été interrogée, ce mardi 5 novembre, pour la deuxième fois depuis le début de ce procès, cette fois en tant qu’ex-présidente du parti. Désabusée, elle a cherché à balayer les éléments prouvant, selon l’accusation, qu’elle a organisé un « système centralisé de détournement de fonds publics ».

Par Florent Le DU & Emma MEULENYSER.

Une marche pour l’échafaud ? En sortant de l’ascenseur, au deuxième étage du palais de justice de Paris, l’élue d’extrême droite se dirige vers les journalistes, la mine défaite. Loin de la confiance affichée il y a un mois, au début du procès des assistants parlementaires des eurodéputés FN/RN, Marine Le Pen apparaît désabusée. « J’ai le sentiment que le tribunal a du mal à entendre nos arguments », reconnaît celle qui est poursuivie pour détournement de fonds publics et complicité de ce même délit.

À défaut de bien se défendre, Marine Le Pen est lucide. Alors que les auditions touchent à leur fin, en cette sixième semaine d’audience, tous les axes avancés par les prévenus – la mutualisation des assistants parlementaires, la faute au Parlement européen qui n’a « pas prévenu », l’idée qu’ils « faisaient de la politique » – ont été discutés par le tribunal, qui devrait les balayer.

« Nous n’avons jamais eu la moindre remontrance de la part du Parlement »

Cela n’a pas empêché l’ancienne candidate à la présidentielle de les réutiliser, ce mercredi, pour son deuxième passage à la barre – elle est la seule dans ce cas. Après avoir été interrogée sur plusieurs contrats la liant à ses anciens collaborateurs, il y a trois semaines, la prévenue était cette fois entendue, ce mardi 5 novembre, en tant qu’ancienne présidente du Rassemblement national.

Avec une question : était-elle le « cerveau » d’un système ayant permis au FN/RN de payer des personnes travaillant pour le parti en les déclarant comme des assistants parlementaires ? L’intéressée dément l’existence même d’un « système », si ce n’est « dans le cadre de notre fonctionnement en pool” pour que certains collaborateurs puissent être utiles à tous les députés ».

« Nous n’avons jamais eu la moindre remontrance de la part du Parlement, jamais ! J’ai le sentiment qu’on juge hier avec la vision qu’on en a aujourd’hui. Les règles soit n’existaient pas, soit étaient beaucoup plus souples ! » s’est encore écriée Marine Le Pen à la barre, reprenant un de ses axes de défense principaux depuis le début du procès.

Certains éléments accablants ont été présentés un peu plus tôt dans l’après-midi à l’ancien trésorier du FN/RN, Wallerand de Saint-Just. Celui-ci a notamment bégayé – littéralement – quand s’est affiché un tableau, modifié par un certain « Wallerand » (ils sont peu nombreux à porter ce prénom), listant les salariés du FN et les assistants parlementaires.

Pour ces derniers, à la colonne « pas payés par le RN », la mention « Europe » y est écrite, tandis qu’à la colonne « service », ce sont bien des fonctions liées au parti qui sont indiquées : « garde du corps » pour Thierry Légier, « secrétaire de Marine Le Pen » pour Catherine Griset… Des éléments factuels précieux pour le parquet. Mais pas pour Wallerand de Saint-Just : « Je ne vois pas en quoi ce tableau montrerait qu’on a participé à quelque chose d’irrégulier », tente-t-il.

« Dans la culture du RN »

Sur le banc des prévenus, Marine Le Pen fulmine, s’énerve, commente à voix haute l’audition. Enfin, à la barre, elle s’attache à répondre sur la « centralisation » qui interroge le tribunal : presque tous les eurodéputés ont confié une procuration à Charles Van Houtte, le comptable du Front national au Parlement européen, lui permettant de gérer pour eux leur enveloppe parlementaire. « Cette centralisation est dans la culture du RN. C’est assez différent des autres partis, oui, mais ça n’a pas démarré à l’élection 2014, ça existe depuis trente ans ! » répond-elle.

Bien plus à l’aise et préparée que l’ensemble des autres prévenus dans cette affaire, Marine Le Pen est aussi revenue, comme lors de sa première audition, sur le manque de preuves– puisque, selon elle, les documents présentés sont mal interprétés et les témoignages malhonnêtes – qui valideraient la thèse d’un « système centralisé de détournement de fonds publics ». « J’ai le sentiment qu’on tourne autour d’une dizaine de mails et de SMS dont on considère qu’ils sont mal rédigés, suspects, maladroits… Mais cela reste une dizaine de mails sur des dizaines de milliers », a-t-elle ajouté à la barre.

L’enjeu est de taille pour elle : si le tribunal estime qu’elle était bien au centre d’un « système », ce rôle de décideuse pourrait sérieusement alourdir la peine à laquelle la députée RN pourrait être condamnée, en particulier une peine d’inéligibilité.

« Vu le mois et demi que nous venons de passer, plus rien ne nous paraît invraisemblable », peste Marine Le Pen en boucle sur l’attitude du tribunal, qu’elle juge « partial ». La députée en saura plus mercredi 13 novembre, avec les réquisitions du parquet. À entendre les procureurs, elles promettent d’être lourdes.

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Source: https://www.humanite.fr/politique/marine-le-pen/au-proces-du-rn-marine-le-pen-nie-etre-le-cerveau-dun-systeme

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