
Ce lundi 19 mai 2025, la cour criminelle du Morbihan se penchait sur l’absence de sanctions disciplinaires à l’encontre de Joël Le Scouarnec après sa condamnation en 2005. L’ancien président du conseil de l’ordre départemental des médecins du Finistère s’est longuement expliqué, sans vraiment convaincre.
Par Mélanie BÉCOGNÉE.
Sa venue s’est jouée à pas grand-chose. La présidente de la cour criminelle du Morbihan a bien fait d’insister, avec une nouvelle invitation à comparaître au procès de l’ancien chirurgien Joël Le Scouarnec pour les viols et agressions sexuelles de 299 victimes. Malgré un certificat médical excusant son absence de ce lundi 19 mai 2025, l’ancien président du Conseil départemental de l’ordre des médecins (CDOM) du Finistère, François Simon, s’est finalement présenté à la barre du tribunal de Vannes, en fin de journée. Un témoignage attendu, mais sans surprise. Lui aussi aurait fait sa part. Lui aussi ne serait pas responsable. Lui aussi renvoie la balle.

Son audition avait pourtant commencé par un élément très clair : le 13 juin 2006. C’est ce jour-là que celui qui était depuis peu à la tête de l’Ordre a appris la condamnation de Joël Le Scouarnec en 2005. « C’est parfaitement inscrit dans ma mémoire. » Là, il décrit l’appel d’un médecin de Quimperlé. Mais aussi les questions qu’il aurait posées au « lanceur d’alerte ». Et les solutions proposées : « Qu’il se rapproche de sa direction ou de la Direction départementale des affaires sanitaires et sociales (Ddass). » L’ancien médecin indique alors avoir reçu une copie du courrier envoyé à la direction à peine trois jours plus tard.
« Du temps a passé »
Des propos qui font preuve d’une certaine réactivité. Du moins, au début. « Du temps a passé », reconnaît l’ancien médecin. C’est en novembre 2006 que le jugement est transmis au CDOM 29, qui le transmet à la Ddass. « On a peut-être l’impression comme ça qu’on se décharge », concède François Simon. Lui et deux autres médecins ont bien eu un entretien le 22 novembre 2006 avec Joël Le Scouarnec à la suite de ces révélations. L’accusé travaillait alors à l’hôpital de Quimperlé. « Il a exprimé une gêne, des difficultés familiales. Il était parfois alcoolisé et c’est à cette époque-là qu’il avait consulté accidentellement des sites pornographiques. » Du tac au tac, la présidente de la cour Aude Burési lui demande : « Ou pédopornographique ? » Lui répond qu’il n’a pas « retenu la nuance ». La présidente lui rappelle alors qu’« on n’est pas dans la nuance ».
Un vote sur la déontologie
Les suites données sont plus compliquées à expliquer. L’ancien président du CDOM 29 assure que « le conseil de l’ordre n’avait aucun pouvoir à l’intérieur de l’hôpital. Notre interlocuteur est la Ddass ». Oui, il leur avait bien écrit pour signaler cette situation. « Le courrier a été fait, mais est-ce que j’ai parlé de plainte… Je ne sais pas. »
À plusieurs reprises, François Simon souligne la légèreté du jugement du tribunal de Vannes en 2005. Mais, il peine à expliquer l’inertie qui a suivi les premières actions. « Je comprends que vous n’avez pas porté plainte de peur d’être irrecevable », tente de clarifier Aude Burési. Le cas Le Scouarnec a pourtant été évoqué au sein du CDOM 29. Il a même fait l’objet d’un vote sur son infraction à l’article 3 du code de déontologie. En décembre 2006, dix-neuf de ses confrères ont eu à s’exprimer sur sa moralité et sa probité après sa condamnation de 2005. Dix-huit ont voté en faveur du chirurgien condamné pour détention et visionnage d’images pédopornographiques. Un seul vote blanc. Le sien, finit par révéler François Simon.
« Ce n’est un succès pour personne »
Pour autant, quand il a fallu transmettre le dossier de Joël Le Scouarnec à ses homologues de Charente-Maritime, il n’a pas décroché son téléphone. « Je ne pense pas que cela a été fait. Je ne me souviens pas. » Il assure avoir des regrets. « Ce n’est un succès pour personne quand on voit l’évolution à postériori. »
Interrogé par l’avocat de la défense, cet ancien médecin n’en démord pas. « Y a-t-il eu oui ou non un dysfonctionnement », lui demande maître Maxime Tessier. « Je n’en sais rien. Je ne peux pas parler de dysfonctionnement. Par contre, je le regrette car il y a eu incompréhension dans un contexte pas très clair à plusieurs niveaux et j’essaie de l’éclaircir. Je regrette évidemment ces agissements. »
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