
C’était symbolique, les urgentistes du CHU de Rennes, comme leurs collègues des autres services d’urgences, ont observé une journée de grève qui s’achève ce mardi 4 juillet 2023 à 8 h. Ils s’inquiètent de leurs conditions de travail qui s’annoncent très compliquées cet été et de la prise en charge des patients.
« Aujourd’hui, en nous mettant en grève, nous voulons exprimer notre mécontentement devant l’absence d’avancées des négociations » explique le professeur Louis Soulat, chef du service des urgences du CHU de Rennes et aussi chef du Samu 35.
Un mouvement de grève qui a été lancé, au niveau national, par le syndicat Samu-Urgences de France et qui a débuté ce lundi 3 juillet 2023 à 8 h et doit s’achever ce mardi 4 juillet à 8 h. Et même si elle a été très symbolique car les médecins ont été réquisitionnés, les blouses blanches ont tenu à marquer le coup.
« L’enjeu c’est d’améliorer l’attractivité des urgences et revaloriser les gardes de nuit. Que des collègues médecins ne décident pas, fatigués et désabusés, de ne plus y travailler. » Cette tendance met en danger les services d’urgences du CHU de Rennes et les autres établissements de l’hexagone.
« Tous les jours on commence nos journées avec 20 à 30, voir 40 patients pour lesquels on ne trouve pas de lit d’hospitalisation. Ça entraîne une surcharge d’activité qui ne correspond pas à notre cœur de métier. » Sans compter sur un flux de patient qui avoisine quotidiennement les 200 entrées jours pour un service taillé, initialement, pour 150 patients quotidiens.
Fermeture des urgences périphériques
Un été qui, selon les urgentistes, s’annonce particulièrement compliqué et encore plus que les années précédentes. « Notamment en raison de la fermeture des autres services d’urgences périphériques qui ferment la nuit », constate le professeur Soulat. En Ille-et-Vilaine ceux de Vitré, Redon et Fougères. Mais aussi ceux de Mayenne et de la Manche. « Une activité qui se reporte donc sur nos urgences qui sont déjà saturées. » A cette réalité s’ajoute la fermeture de services du CHU, vacances oblige et aussi par pénurie de moyens humains.
Jeune urgentiste, la Dr Adeline Boeffard dit tenir « grâce au travail d’équipe et à l’esprit de solidarité qui règne aux urgences ». Mais elle aussi se pose des questions sur son avenir et sur sa charge de travail qui ne cesse d’augmenter. Tout comme son collègue, le Dr Julien Lazat, qui exerce aux urgences depuis près de 15 ans.
« Comme mes collègues, j’aime beaucoup mon travail. Mais je vois aussi les conditions de travail qui se dégradent et ça devient de plus en plus compliqué d’année en année. On soigne forcément moins bien quand on doit gérer 40 à 50 patients en même temps. » Là encore une réalité implacable et qui s’impose aux équipes.
Donner envie aux urgentistes de rester
« Le plus grave serait aussi que l’on habitue la population à ces conditions de prise en charge et à se retrouver sur des brancards dans les couloirs, s’inquiète le professeur Soulat. Or selon une étude récente de la société française de médecine d’urgence, passer plus de 12 h la nuit aux urgences sur un brancard, augmente la mortalité de 70 %. Et même devant ces résultats évidents, on ne voit pas d’avancées pour ce qui est de l’amélioration des conditions de prise en charge. »
La priorité reste donc bien là. « Donner envie aux urgentistes de rester et qu’on ne fasse que ce que l’on ne peut pas faire aux urgences. Alors, bien sûr, ça passe par la prise en charge des urgences vitales, mais c’est surtout améliorer la grille salariale. »
Auteur : Samuel Nohra
URL de cet article : Aux urgences du CHU de Rennes. « On ne doit pas s’habituer aux brancards dans les couloirs » ( OF.fr – 03/07/23 ) – L’Hermine Rouge (lherminerouge.fr)