Stéphane Bidault, 55 ans, raconte avoir été victime d’agressions sexuelles en 1977 et 1978, alors qu’il était élève dans une école privée de Douarnenez. Il témoigne à visage découvert et a déposé plainte le 4 mars.
Par Dimitri L’HOURS.
Stéphane Bidault le sait : les faits qu’ils relatent sont prescrits et ne donneront lieu à aucune condamnation judiciaire. Le 4 mars 2025, toutefois, il a déposé une plainte auprès de la procureure de la République de Quimper. Cet habitant de Gourlizon (29), 55 ans, affirme avoir été victime d’agressions sexuelles en 1977 et 1978, alors qu’il était élève en CE2 à l’école Saint-Jean, à Douarnenez.
Il accuse spécifiquement un enseignant, le frère J., aujourd’hui décédé. « Sa technique était toujours la même : garder l’élève après les cours, lui passer un savon, le terrifier jusqu’à provoquer des pleurs. Ensuite, il prenait l’enfant dans ses bras pour lui accorder son pardon et en profitait pour balader ses mains sur les fesses, le sexe », expose Stéphane Bidault. « Il était assez petit et je sentais quelque chose de dur contre moi. J’étais trop petit à l’époque pour comprendre que c’était une érection », poursuit-il.
« Je souhaite aussi lutter contre le fameux « pas de vagues » »
Longtemps, Stéphane Bidault a gardé ses souvenirs enfouis. « J’ai vécu d’autres événements traumatisants, en particulier le décès de ma mère, alors que j’étais un jeune adolescent. Ces agressions sont passées au second plan. » Elles ont progressivement refait surface, au fil des révélations d’affaires de pédophilie impliquant des hommes d’Église. La récente affaire Notre-Dame de Bétharram, puis la création d’un collectif d’anciens élèves du collège Saint-Pierre du Relecq-Kerhuon victimes de violences, ont fait office de déclic. « Tout cela a fait émerger des choses en moi. Et je souhaite aussi faire descendre l’enseignement catholique de son piédestal, lutter contre le fameux « pas de vagues » que je connais bien, ayant moi-même été professeur dans l’enseignement catholique pendant 26 ans », affirme-t-il, déterminé.
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« Je ne pense pas être la seule victime »
Marié et père de famille, il n’a, dans un premier temps, parlé de cette démarche qu’à son épouse. « Elle est croyante mais me soutient. De toute manière, elle sait que je suis décidé à aller au bout. Je n’en ai parlé à personne d’autre dans mon entourage car je ne voulais pas que l’on me dissuade de le faire. »
En témoignant à visage découvert, il espère inciter d’éventuelles autres victimes des agissements du frère J. à se manifester auprès de lui, en vue de la création d’un éventuel collectif. « Il a été enseignant de 1942 à 1988 dans de nombreuses communes du Finistère. Je ne pense pas être la seule victime. » Il a informé l’enseignement catholique du dépôt de plainte, ainsi que le réseau La Mennais, auquel appartenait l’enseignant mis en cause.
« Nous avons honte »
« J’ai bien pris connaissance du témoignage de Stéphane Bidault. Nous avons profondément honte de ce qu’il s’est passé. Nous ne pouvons qu’encourager la libération de la parole et la dénonciation de ces faits », assure Yannick Houssay, frère provincial à la maison-mère La Mennais de Ploërmel. Ce dernier indique qu’il y a quelques années, au moins une autre personne a accusé le frère J. d’agressions similaires à celles subies par Stéphane Bidau
Le frère Yannick Houssay a conseillé à Stéphane Bidault de prendre contact avec la Commission reconnaissance et réparation, créée par la Conférence des religieux et religieuses de France, « même si nous avons conscience que ce qui a été commis à l’époque n’est pas réparable ». Suivant ces conseils, Stéphane Bidault a bien saisi le CRR, avec l’espoir d’obtenir une reconnaissance publique de son statut de victime.
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