Censure ou sauvetage de Macron-Bayrou ? (IO.fr-20/12/24)

François Bayrou et Emmanuel Macron lors d’une réunion du Conseil national de la refondation à Craon, le 10 octobre 2022 (photo AFP).

Vendredi 13 décembre, François Bayrou était nommé Premier ministre. Dans la continuité de Macron qui avait reçu les partis (sauf la France insoumise) pour tenter de négocier un pacte de non-censure, Bayrou a entamé des « concertations » avec le PS, le PC et les Verts.

Par Rosalie ALBANI.

Dès le lendemain, fidèle à la position qu’elle avait déjà tenue face à Macron, la France insoumise annonçait dans un courrier de sa présidente de groupe Mathilde Panot ne pas se rendre à Matignon : « Il ne peut être question de participer ni à un gouvernement de grande coalition ni de négocier un quelconque accord de non-censure. Monsieur Bayrou connaît nos positions. Nous connaissons les siennes. Nous ne participerons pas à la comédie visant à faire croire que Monsieur Bayrou pourrait faire demain le contraire de ce qu’il a toujours fait. Nous nous opposerons à son gouvernement. Nous le censurerons car nous n’acceptons pas que le président de la République refuse de reconnaître le résultat des urnes (…) ». 

Mathilde Panot met en évidence la seule alternative qui s’offre aux forces du NFP : la censure ou le sauvetage de Macron-Bayrou.

Côté PCF, « nous jugerons sur pièces », a expliqué Fabien Roussel en demandant au nouveau Premier ministre de s’engager à ne pas utiliser le 49.3. En effet, lors de la réunion à l’Élysée des différents responsables politiques, Roussel et Bayrou étaient tombés d’accord sur ce principe.

Même demande du côté des socialistes sur le 49.3. Le PS demande également dans ce courrier adressé à François Bayrou, et adopté à l’unanimité par le bureau national du parti, « la garantie que [le] gouvernement ne se placera en aucune manière sous la dépendance du Rassemblement national, ni ne reprendra à son compte son programme xénophobe ».

Une sorte de lettre au père Noël en somme, c’est de saison…

La tentation du compromis est grande mais ce n’est pas si simple. Les socialistes ont été obligés de préciser « qu’ils ne participeront pas au nouveau gouvernement » et « qu’ils demeureront dans l’opposition ». Du côté des Verts, « pas de censure a priori » mais des « a priori de censure » pour Marine Tondelier.

Sans le dire, tous se heurtent au mandat, celui donné par des millions d’électeurs lors des dernières élections législatives sur la base du programme de rupture du Nouveau Front populaire. Et à une mesure en particulier : l’abrogation de la réforme des retraites.

Les Échos du 17 décembre rappelle que Bayrou avait approuvé le report de l’âge légal de 62 à 64 ans et une accélération de l’allongement de la durée de cotisations, pointant du doigt un système de retraites « gravement et dangereusement déséquilibré ». Celui qui voyait également d’un bon œil la mise en place d’une « retraite par points » avait aussi défendu l’idée d’une « très légère augmentation des cotisations patronales. » « Une proposition qui pourrait intéresser le Parti socialiste, explique les Échos, qui envisage désormais de geler la montée en charge du report de l’âge légal jusqu’en 2027 tout en maintenant l’augmentation de la durée de cotisation ».

Le tout serait organisé avec les syndicats lors d’une « conférence de financement ». C’est ce que défendait Fabien Roussel la semaine dernière à l’Élysée tout comme la secrétaire générale de la CGT Sophie Binet et… François Hollande.

L’ex-président a souhaité sur BFMTV que le nouveau gouvernement de François Bayrou convoque « une conférence sociale, avec les partenaires sociaux, pour rediscuter d’un certain nombre de paramètres de cette réforme (…). Ensuite, ça sera en 2027 que la question des retraites sera de nouveau posée. La seule méthode que je connaisse à ce stade, ce n’est pas d’exiger une abrogation. (…) Il faut qu’il y ait une suspension peut-être. » Si on pose l’abrogation comme un motif justifiant la censure, « effectivement la censure est mécanique, puisque le gouvernement ne veut pas s’engager dans cette voie ». Visiblement, ce n’est pas le programme du NFP auquel il doit son élection de député qui l’étouffe…

Les socialistes tétanisés par une présidentielle anticipée

Même Lionel Jospin a été sorti de sa retraite lundi 16 décembre pour venir au secours « de la gauche » sur France Inter. Écologistes, socialistes et communistes doivent contribuer « à ce que ce gouvernement, dont ils ne partagent pas les options, dure ». « On peut s’opposer par bien d’autres manières que par la censure, sinon il n’y aurait pas eu seulement deux censures en 60 ans », insiste celui qui a mis en place les pires mesures anti-ouvrières main dans la main avec Jacques Chirac, comme la privatisation d’EDF.

Encore et toujours, tourner le dos au programme de rupture et à la France insoumise axée sur la censure et la destitution de Macron.

« Les socialistes ont un temps de retard sur Jean-Luc Mélenchon dans la préparation d’une présidentielle anticipée, n’ayant pas en réserve de candidat naturel » explique l’Opinion. “Ils sont tellement tétanisés d’avoir à affronter une présidentielle avant 2027 qu’ils préfèrent redonner de l’oxygène à Macron” se désole le coordinateur de la France insoumise, Manuel Bompard. Un cadre du MoDem, le parti de Bayrou, lui répond à distance : “Il n’y aura pas de dissolution jusqu’en 2027 si les socialistes ne jouent pas aux cons. D’ici là, ils ont le temps de se refaire la cerise. Ils ostracisent LFI, et nous, on va les aider à embarquer les écologistes en leur filant à manger.” Le pacte de non-censure n’est, ni plus ni moins que la formalisation de cet échange de bons procédés ».

Mais entre vouloir et pouvoir, il y a un pas…

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Source: https://infos-ouvrieres.fr/2024/12/20/censure-ou-sauvetage-de-macron-bayrou/

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