
La municipalité, menée par la maire Isabelle Assih, a présenté son rapport d’orientations budgétaires, ce jeudi 30 janvier 2025. Pour consentir à l’effort demandé par l’État, qui n’a toujours pas de budget, la Ville de Quimper (Finistère) va vendre des biens. Et supprimer des postes. « Il s’agit de résoudre des équations impossibles », fustige la majorité.
Par Marion GONIDEC.
« Cet homme, le président de la République, est un Ovni. N’oublions pas que c’est lui a provoqué cette crise politique. » D’emblée, ce jeudi 30 janvier 2025, à l’heure du DOB, le débat d’orientations budgétaires, le ton est donné. Comme les autres collectivités, Quimper doit trouver de l’argent, résoudre « d’impossibles équations ». Et Jacques Le Roux, rapporteur du DOB et adjoint aux finances, s’arrache les cheveux. À l’heure où les parlementaires, réunis en commission mixte paritaire, tentent d’aboutir à une version commune du budget de l’État.
« C’est une grave erreur ce qui est demandé aux collectivités. La baisse des capacités financières des communes aura une répercussion sur les services publics, l’investissement et l’emploi. Cela va produire du chômage », martèle l’adjoint aux finances qui assure que la municipalité veut « garder le cap et le plus de projets possibles ».
« Effet ciseau »
Sur les 52 milliards d’effort budgétaire demandé, deux milliards incombent aux collectivités. Qu’est-il encore possible de supprimer, en fonctionnement, en investissement, ou de lisser dans le temps en modifiant le phasage des projets du Plan Pluriannuel d’investissement (PPI) ?
1 million à trouver
Quimper devra, d’après les dernières projections, mettre au pot entre 1 million et 1,2 millions d’euros. À la fois pour les contributions à la CNRACL (Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales) qui augmentent significativement et en soutien au fonds gouvernemental, rebaptisé fonds Dilico (pour dispositif de lissage conjecturel des collectivités territoriales).
Dans la version Barnier du fonds, Quimper aurait dû provisionner 1,4 million d’euros.
« On n’y arrivait pas, rappelle Isabelle Assih, dans les hypothèses Barnier, c’était extrêmement angoissant. » Finalement, dans cette « version adoucie », Quimper a provisionné 600 000 euros. Où trouver l’argent ? « L’enjeu est d’avoir des services publics qui fonctionnent mais de pouvoir avoir de l’épargne de gestion pour investir. Or nous avons beaucoup à faire, un patrimoine vieillissant, des urgences », résume la maire.
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« Pas de baisse des subventions aux associations »
« Nous n’allons pas taper sur une politique publique mais répartir les économies. Et je l’ai déjà annoncé, nous préserverons les subventions aux associations. C’est de la cohésion sociale, des emplois », indique Isabelle Assih, qui précise également que la fiscalité locale n’augmentera pas (hors augmentation obligatoire des bases). « Les taux n’ont pas augmenté l’an dernier, ils n’augmenteront pas cette année », assure la première édile.
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Six bâtiments publics vendus aux enchères cette année
« Pour des raisons économiques et d’habitat, nous allons nous séparer d’un certain nombre de biens », justifie la maire. Sur les 248 bâtiments principaux recensés, « deux tiers seraient aujourd’hui vétustes », selon un diagnostic cité par Isabelle Assih.
Dans un premier temps, six vont être vendus aux enchères, cette année. Parmi eux, une maison au 41, rue de Kerfeunteun, autrefois utilisée par le mouvement d’éducation populaire Les petits débrouillards, une maison à côté du 53, l’ancien espace associatif qui se trouve à proximité de la salle Michel-Gloaguen. Ou encore le 2 rue du Stivell, le 63 rue de la Providence, près du Cinéville… Les enchères, qui « commencent à des prix très bas » seront menées par Agorastore. « Nous aurons le choix de l’acheteur, car l’objectif est bien de faire du logement », précise Jacques Le Roux.
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Des postes non remplacés ?
La Ville cherche des gains de productivité. Ainsi, les trottinettes des agents d’entretien, pensées pour la prévention des troubles musculaires squelettiques (TMS) pourraient aussi servir un autre but, élargir le périmètre de gestion des agents. « Nous allons avoir de plus en plus d’espaces à gérer, autour de la salle, de la gare », conjecture la majorité. « L’idée n’est pas de supprimer des postes mais de maîtriser la masse salariale. »
Ainsi, au lieu de la projection de 4,5 % d’augmentation pour 2025, la Ville souhaite maintenir « la masse salariale à 3 % ». Concrètement ? « Cela représente une dizaine de postes – pour 634 ETP (équivalent temps plein) – qui pourraient ne pas être remplacés. Mais ça ne se fera pas au rabot, pas s’il y a de la souffrance au travail », assurent Isabelle Assih et Jacques Le Roux. La maire rappelle également la création de deux postes supplémentaires de policiers municipaux.
La tribune de Penvillers, la grande salle, les halles… Lors de la présentation du DOB, Jacques Le Roux, adjoint aux finances, a affirmé que la majorité ne renonce pas, dans un climat budgétaire pourtant instable et très contraint, aux grands projets structurants pour la Ville. Quid des droits de mutation, de la perception de la TVA ? Il existe de nombreuses incertitudes pour ce premier conseil de l’année.
« Nous assistons à un véritable concours Lépine de propositions antisociales, lâche le communiste Bernard Jasserand en écho au contexte national. Derrière chaque euro arraché aux collectivités, c’est de la vie des habitants dont il s’agit. Pourtant, il existe des alternatives, taxer les superprofits, instaurer un impôt sur la fortune climatique. »
La gestion de la Ville fustigée par l’opposition
Pour l’élu, il est inacceptable de faire porter le chapeau aux collectivités dont le budget doit être obligatoirement à l’équilibre. Contrainte soulignée par Jacques Le Roux en introduction du conseil. Matthieu Stervinou, aux solidarités, revient sur le caractère « inédit » de ce mandat traversé par les crises et réaffirme une vision pour la majorité, à un an des municipales.
« On peut s’en prendre à l’État mais la majorité municipale est responsable de la situation de la Ville, avant le gouvernement, fustige Guillaume Menguy, conseiller d’opposition. Vous prenez régulièrement des décisions. La décision de ne pas rénover les halles mais d’en construire des nouvelles, ça coûte de l’argent. Les reports successifs, aussi. Quel est le budget des travaux de la future place Saint François ? » « Les 5 millions pour les abords de la grande salle, c’est un gros budget. Il serait intéressant de préciser la part ville et communautaire ? », interroge encore Guillaume Menguy.
Un air préélectoral ?
« Vous êtes d’une constance désarmante, vous faites toujours portez les critiques sur les autres », ironise pour sa part Claire Lévry-Gérard. « Cette année encore, vous confirmez les coûts de fonctionnement et l’endettement de la ville. Dans ce rapport, vous n’avez pas de visibilité mais vous y allez quand même », cingle l’élue d’opposition qualifiant la gestion de la ville de « désinvolte ».
« La dette du pays est énorme, c’est 50 milliards aujourd’hui, demain, c’est 100 milliards. Nous allons arriver dans un nouveau paradigme sans marge de manœuvres. Aller jusqu’à huit ans d’endettement, me semble déraisonnable. Et il n’y a d’ailleurs pas de propositions en ce sens », intervient Ludovic Jolivet, ancien maire de Quimper, qui signe son retour en séance municipale. Comme un air préélectoral ? Le budget de la Ville devrait être adopté le 6 mars… À moins que…
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