
La confédération a dévoilé ce mardi son plan d’action pour l’industrie et l’environnement, qu’elle a soumis à la réaction des candidats aux européennes.
Par Stéphane GUERARD.
Pas facile de soutenir la transition écologique lorsque celle-ci sert de justification à des suppressions d’emploi, à des fermetures d’entreprise et à une mise à l’écart des syndicats des prises de décisions économiques. Après avoir traversé des turbulences ces dernières années pour articuler le vert et le rouge dans son corpus revendicatif, la CGT s’est confrontée à ces enjeux lors d’états généraux de l’industrie et de l’environnement organisés ce mardi 28 mai à Montreuil. Une journée très riche en débats, prélude au lancement d’un « plan d’actions syndicales face à l’impératif climatique », dont les 21 propositions ont servi de canevas à l’audition des listes candidates aux élections européennes.
Les écueils ne manquent pas sur le chemin de la « transition juste » que compte emprunter la Confédération générale du travail. Première difficulté : défendre l’emploi quand celui-ci est mis en cause par des changements de normes dont jouent les employeurs pour revoir les activités, les salaires.
« Le capital est responsable de la crise environnementale »
Pour la CGT métallurgie, Philippe Verbeke fait le point : « À Ascometal, les salariés vivent leur troisième redressement judiciaire en dix ans. Ils produisent pourtant de l’acier vert de très haute technologie. Quant à ArcelorMittal, qui a réalisé 25 milliards d’euros de bénéfices en trois ans, il fait de la surenchère entre les États européens pour faire prendre en charge 50 % des investissements nécessaires à la décarbonation de ses productions. »
Dans la chimie, les raffineurs d’ExxonMobil à Notre-Dame-de-Gravenchon (qui se nomme maintenant Port-Jérôme-sur-Seine, en Seine-Maritime), confrontés à un plan de suppression de 677 emplois, se désolent de la perte de production française de dérivés de pétrole, qui reviendront en importations de plastiques américains fabriqués à base d’hydrocarbures de schiste ou en provenance de Chine, où les normes sociales et environnementales sont nettement moins-disantes.
La défense de l’emploi est d’autant plus compliquée pour la CGT que ses projets alternatifs portés dans la centrale de Gardanne (Bouches-du-Rhône) ou dans celle de Cordemais (Loire-Atlantique) pour l’énergie ou dans la papeterie Chapelle-Darblais pour le papier recyclé peinent à trouver des interlocuteurs politiques et économiques qui donnent un avenir à ces sites industriels. « Je ne connais personne qui ait reçu le soutien d’un employeur pour parler transition. Rien ne passe sans le rapport de force », soutient Jean-Michel Roccasalva, élu CGT à la centrale de Gardanne.
Pour ne plus subir, « ne plus seulement être défensif » face aux 130 plans de licenciement en cours qu’a comptabilisé le syndicat, la CGT se dote d’outils. L’Ugict (Union générale des ingénieurs, cadres et techniciens) vient ainsi de lancer un « radar environnement travail » en ligne à destination des salariés comme de leurs représentants, qui « leur permet d’anticiper les enjeux de transformation écologique et ne plus subir », explique sa secrétaire nationale Fabienne Tatot. Nathalie Bazire, secrétaire confédérale, annonce la tenue d’états généraux régionaux pour élaborer des plateformes territoriales cégétistes.
Surtout, la confédération dévoile trois axes revendicatifs. Avec un leitmotiv : « Il n’est pas question de remettre en question la transition sociale et environnementale. Le capital est responsable de la crise environnementale. Il doit payer. C’est ça la définition d’une transition juste », assume Sophie Binet.
La sécurité sociale professionnelle au prisme des enjeux climatiques
Pour la secrétaire générale de la CGT, cette transition juste passe par de nouveaux droits en faveur des salariés, afin de rompre avec les dumpings fiscaux, sociaux et environnementaux sur lesquels joue le patronat pour remodeler l’appareil productif, en tirant les droits vers le bas.
Revendication traditionnelle de la centrale syndicale, la sécurité sociale professionnelle est ainsi réadaptée aux enjeux climatiques avec la proposition du maintien du contrat et des droits des travailleurs afin de leur permettre de se former le temps de la transformation de leur entreprise.
La confédération appelle aussi à la reprise en main des décisions par une puissance publique interventionniste, capable de sortir l’énergie et les transports de la concurrence du marché, à même aussi de nationaliser les entreprises stratégiques.
Dans ce contexte, les propositions des représentants des listes de gauche ont plus facilement capté l’attention de 700 militants présents à Montreuil. « Entendre le candidat « Les Républicains » (François-Xavier Bellamy) reprocher à la CGT de ne pas avoir invité l’extrême droite est très grave, retient quant à elle Sophie Binet. Toutes les digues sautent avec ce rapprochement de la droite et de l’extrême droite, soutenues par le capital. »
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