Comment la criée de Brest affiche des tonnages records, malgré la crise de la pêche (OF.fr-20/05/24)

Brest est l’une des 13 criées de Bretagne. Située au troisième éperon du port de commerce, elle compte 110 acheteurs réguliers et 125 bateaux y débarquent leurs produits de la mer.
Brest est l’une des 13 criées de Bretagne. Située au troisième éperon du port de commerce, elle compte 110 acheteurs réguliers et 125 bateaux y débarquent leurs produits de la mer. | GUILLAUME SALIGOT, OUEST-FRANCE

La criée de Brest (Finistère) a vendu 2 715 tonnes de produits de la mer en 2023, un record depuis 1992. Loin des remous post-Brexit, la petite structure tient la marée en misant sur la diversification et la valorisation des produits. L’équipement monte en gamme, avec de gros investissements prévus cette année. Reportage.

Par Julia TOUSSAINT.

10 h, sur le port de Brest. Ciel gris, vent d’ouest, un crachin à vous faire rentrer la tête dans les épaules. Ronan Floc’h s’attarde sur l’éperon, papote avec les pêcheurs.  Ça fait partie du boulot. Ils ont souvent des choses à redire, mais on finit toujours par s’entendre ! , s’esclaffe le directeur d’exploitation de la criée, plein de bonhomie.

32 ans qu’il y travaille, 20 ans qu’il en a pris les commandes, et sa petite entreprise ne connaît pas la crise. Après 2022, 2023 a été une nouvelle année record pour la criée brestoise, avec 2 715 tonnes de produits de la mer vendus (+ 12 % en un an). Le prix moyen s’établit à 5,75 € le kilo, portant le chiffre d’affaires à 15 millions d’euros. Des résultats inégalés depuis 1992.

Ronan Floc’h, directeur d’exploitation de la criée de Brest. | GUILLAUME SALIGOT, OUEST-FRANCE
Sur le podium, des espèces les plus vendues à la criée en 2023 : la lotte, le poulpe et l’araignée. | GUILLAUME SALIGOT, OUEST-FRANCE

Diversité de l’offre

Pourtant, on entend partout que la pêche va mal, non ?  Il y a plein de beaux produits dans la mer , objecte le gérant, en pointant du menton les bacs rouge et blanc remplis de lottes, merlans, aiglefins, araignées et autres ormeaux de Molène. Toute la diversité du Parc marin d’Iroise et des eaux poissonneuses de la Manche.

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C’est l’une des plus-values de cet établissement :  On n’est pas mono produit , pointe Ronan Floc’h. 2023 a été une année exceptionnelle pour le poulpe, même s’il a fallu « s’adapter » pour trouver des débouchés à ce produit peu prisé des Français. Les lottes ont été débarquées en nombre,  et on a eu une belle saison de coquillages .

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Tri manuel

C’est l’heure du tri dans l’entrepôt. Cotte jaune à bretelles sur le dos, deux employés s’attaquent à une cargaison de rougets barbets. Ils estiment la taille et la qualité à l’œil, ne prennent pas plus de deux secondes par poisson.  Ça ne s’explique pas, c’est du ressenti , écourte l’un d’eux.

Les bacs sont ainsi organisés par calibre. Les poissons aux écailles râpées sont mis de côté pour être vendus un peu moins cher, les beaux spécimens sont valorisés.  Ce tri à la main, ça fait toute la différence , estime le responsable de la criée.

La criée de Brest emploie une quinzaine de salariés, pour la pesée, le tri, les ventes… | GUILLAUME SALIGOT, OUEST-FRANCE
Le tri des arrivages d’ormeaux. | GUILLAUME SALIGOT, OUEST-FRANCE

Précieuses langoustes

Ici, 95 % des enchères se font par internet, à raison de trois ventes par semaine. Mareyeurs, grandes surfaces, restaurateurs… Brest compte 110 clients réguliers.  On doit être les yeux des acheteurs , image Ronan Floc’h. Philippe Perrot, vice-président du comité des pêches du Finistère, confirme : « À Brest, ils sont très à cheval sur la qualité. Tellement que, parfois, ça embête les pêcheurs ! »

Pour Philippe Perrot toujours, la criée tire son épingle du jeu en proposant  du haut de gamme et des produits de niche . Comme la coquille saint jacques de la rade de Brest, qui finit sur les tables de grands restaurants. Mais la reine de la place, c’est bien la langouste rouge : 32 tonnes ont été écoulées la saison dernière, dont plus de 8 tonnes lors de la traditionnelle vente de Noël. À 47,82 € le kilo en moyenne, c’est le produit le plus cher.

700 000 € d’investissements

125 bateaux ont débarqué à la criée brestoise en 2023. Des côtiers pour la plupart, et peu de chalutiers. Ainsi, le port de Brest a peu souffert du plan de sortie de flotte post-Brexit, qui a envoyé 46 navires bretons à la casse, et réduit le tonnage de grosses criées comme Lorient ou Le Guilvinec. « Enfin, ça sert à rien de comparer, balaye Ronan Floc’h. Les criées sont différentes et complémentaires. »

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Il préfère s’étendre sur les perspectives de sa structure : 700 000 € d’investissements, cette année, pour faire monter l’équipement en gamme, avec une machine à glace (595 000 €), une grue de déchargement (65 000 €) et un renouvellement des viviers (35 000 €). Plus une calibreuse à poissons en location annuelle, dont l’acquisition est prévue pour 2025.

La criée possède aussi son propre vivier, qui élève notamment des araignées de mer. | GUILLAUME SALIGOT, OUEST-FRANCE

 C’est une criée rénovée, performante et très diversifiée , résume Daniel Cueff, vice-président de la Région Bretagne.

La criée de Brest emploie une quinzaine de personnes, « mais on continue à recruter », précise Ronan Floc’h, qui estime qu’ il reste du potentiel pour se développer et faire venir de nouveaux bateaux .

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Source: https://www.ouest-france.fr/mer/peche/comment-la-criee-de-brest-affiche-des-tonnages-records-malgre-la-crise-de-la-peche-9cf1599a-094c-11ef-8dbf-6d0effde8a28

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