Contractuels, heures sup’, élections : des tensions perdurent à l’hôpital de Nivillac (OF.fr.10/01/23)

Des salariées, en discussion, avec Stéphanie Le Rohellec, trésorière de l’union départementale CGT Santé et Virginie Coupanec, elle aussi de l’UD.

Après un mouvement social mi-novembre, nouvelle grève en vue ce jeudi 12 janvier 2023 à l’hôpital de Nivillac (Morbihan). Des personnels pointent un faible nombre de titulaires, des heures sup’récupérées plutôt que payées, et les élections professionnelles qui n’ont pu avoir lieu.

« Les problèmes que l’on rencontre… ? Pfff, par où commencer ? », lâche Muriel (1), une des soignantes du petit hôpital de Nivillac, à l’extrémité Sud-Est du Morbihan, où un préavis de grève a été déposé pour ce jeudi 12 janvier 2023, avec rassemblement du personnel à 14 h 30. « Surtout, il y a beaucoup de contractuels », résume Réjane, qui elle non plus ne préfère pas donner son vrai prénom « par peur des représailles ». L’an dernier, à la même époque, l’établissement avait aussi connu une journée de grève.

« 63 % de contractuels »

« Vous êtes 63 % de contractuels. Alors qu’en moyenne, dans les hôpitaux du Morbihan, c’est plutôt un tiers du personnel », soulignent Stéphanie Le Rohellec, trésorière de l’union départementale CGT Santé et Virginie Coupanec, elle aussi de l’UD. Ces contractuels ne sont pas titulaires de la fonction publique et n’ont donc « pas de prime, sachant que cette prime compte pour la retraite ».

« La prime aide-soignante représente environ 10 % du salaire mensuel. Ça nous fait donc dans les 150 €/mois en moins », déplore Caroline. Les titulaires ont aussi un échelon automatique tous les 2 ans pendant que certaines n’ont pas été augmentées depuis 5 ans, 9 ans… « Certaines sont contractuelles depuis 15 voire 20 ans car cet hôpital ouvre très peu de postes à titularisation », complète Muriel. « Certes, six personnes ont été titularisées récemment, mais il y avait neuf postes… »

Burn-out, turnover

Claudie dépeint de fréquents arrêts de travail, des burn-out, « beaucoup de turnover d’intérimaires », des agents rappelés sur leurs congés, des cumuls d’heures supplémentaires à rattraper « car la direction refuse de payer les heures sup’…», et une communication « de plus en plus compliquée avec le directeur ». « Un groupe « qualité de vie au travail » avait été créé en 2022, mais des propositions qu’on y faisait étaient refusées. Ça n’avançait à rien. Il reste 3 personnes sur 26 dans ce groupe », glissent ses collègues. « Heureusement qu’à côté de ça, les lieux sont bien, et l’effectif suffisant pour s’occuper correctement des personnes âgées », pondèrent les soignantes.

Comme l’an passé, le dernier épisode des élections professionnelles leur semble symbolique, dans cet hôpital qui n’a plus de délégués CGT et CFDT depuis quatre ans « parce que le directeur les a poussés à bout », explique Stéphanie Le Rohellec. Une liste CGT de 14 volontaires avait été déposée fin octobre 2022 pour l’élection du CSE (comité social et économique). Retoquée par le directeur car elle ne comportait que des femmes. « Forcément, il y a à peine 10 hommes dans l’établissement ! » remarquent les soignantes dépitées. « Alors que les 14 auraient été motivées, la direction a préféré faire un tirage au sort. Les gens tirés au sort ont peur de se faire démonter », lâche Lisa. L’UD CGT santé envisage un recours en justice contre cette « élection ». « C’est le seul hôpital du Morbihan qui n’avait pas de liste pour le CSE. Même Belle-Île-en-Mer, un des plus petits, a deux syndicats ! »

(1) tous les prénoms des membres du personnel ont été changés.

(2) Centre hospitalier Basse Vilaine : soins de suite et de réadaptation (26 lits dont 4 en soins palliatifs), Ehpad (66 places dont 14 en unité Alzheimer) et soins à domicile (84 personnes aidées).

La direction vise « 7 à 14 titularisations d’ici 2024 »

À Nivillac, le centre hospitalier Basse Vilaine, à vocation gériatrique, fait partie du groupement hospitalier Brocéliande Atlantique.

De son côté, la direction reconnaît qu’en pourcentage de titulaires, « on est en dessous des autres hôpitaux, je n’en disconviens pas », déclare Franck Hilton, directeur. Dans ses graphiques de 2019, les 150 personnels de son hôpital sont à 44,9 % des titulaires, contre par exemple 70 % pour le centre hospitalier de Vannes. « Plus on a de temps partiels, plus on a de contractuels car on ne peut pas titulariser les remplaçants de temps partiels. Or ici, 45 % du personnel est à temps partiel choisi » là où les autres hôpitaux sont plutôt à 11 %, 30 %… 40% pour Malestroit.

« On a aussi un budget à tenir. Mon but n’est pas d’avoir plus de titulaires, si c’est pour devoir diminuer l’effectif. » Julie Minguet, chargée des ressources humaines, rappelle aussi « qu’il y a eu trois titularisations en 2015, trois en 2022, six en ce début d’année (3 soignants, 3 techniques) pour 9 postes ouverts. On n’a pas énormément de demandes de titularisations. En 2015, on avait 20 candidats pour 3 postes, cette fois 13 pour 9. » La direction dit viser « 7 à 14 titularisations d’ici 2024 ». D’après elle, certains employés ne voudraient pas non plus être titularisés « car on peut y perdre financièrement, en repartant sur le 1er échelon du grade. Les contractuels peuvent aussi passer des échelons plus rapidement que les titulaires », poursuit la RH. « On a fait 28 avancements d’échelon en 2022. »

Face à l’engorgement des urgences, faut-il refuser l’accès à certains patients ?

« Pas forcément représentatifs »

Sur la récupération des heures sup’, un des points qui a entraîné l’arrêt du groupe de travail « qualité de vie », « on a pris le principe de récupérer, pour la santé de notre personnel car ce sont des métiers difficiles », explique Franck Hilton. « On va cependant tester le paiement de ces heures en cas de procédure dégradée (journée de 12 h) le week-end, aux soignants le demandant », ajoute Emmanuelle Rousseau, cadre supérieure de santé. La direction reconnaît que la majorité du groupe demandait le paiement « mais ils n’étaient pas forcément représentatifs de tout le personnel ». Le directeur met aussi en avant des enquêtes de satisfaction du personnel ayant de bons résultats, mais avec un faible taux de retour (33 réponses en 2022).

Pour Franck Hilton, ce nouvel appel à la grève est clairement lié à l’élection ratée du CSE qui s’est finie par tirage au sort. « On avait très bien travaillé avec ceux tirés AU sort en 2018. Y a-t-il moins de problèmes dans les hôpitaux ayant des syndicats d’ailleurs ? »

Sylvie RIBOT

source: https://www.ouest-france.fr/bretagne/nivillac-56130/contractuels-heures-sup-elections-des-tensions-perdurent-a-l-hopital-de-nivillac-7f8b6f92-8b55-11ed-8cd4-3e0a8eec1c0a

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