Dans le golfe du Morbihan, « les îles sont des territoires vulnérables » face au dérèglement climatique (LT.fr-27/09/22-11h53)

L’île d’Arz, dans le golfe du Morbihan.
Dans le golfe du Morbihan, les îles sont les premières confrontées aux conséquences du dérèglement climatique. Mouncef Sedrati, enseignant-chercheur géomorphologie littorale et géologie marine à l’Université de Bretagne Sud, suit l’évolution du littoral face au changement climatique.

À quels risques sont confrontées les îles du golfe du Morbihan ?

L’érosion littorale est un phénomène naturel d’autoalimentation. Le littoral emprunte le sédiment dans un endroit et le positionne ailleurs, sous l’effet des vagues et des courants. En théorie, ce système est équilibré. Mais l’action anthropique, avec l’artificialisation du littoral, l’empêche. L’érosion est accentuée car nous avons figé le littoral en établissant une nouvelle frontière entre nous, humains, et la mer. Et en défendant nos frontières, nous aggravons la situation.

Cette érosion renforce le risque de submersions marines, c’est-à-dire le débordement exceptionnel de masses d’eau par rapport à une limite territoriale. Elles peuvent être conjoncturelles, avec un fort coefficient de marée et un vent significatif.

En parallèle de l’érosion des côtes, il y a l’élévation du niveau de la mer. Le Giec prévoit une élévation de plusieurs dizaines de centimètres d’ici la fin du siècle. Faut-il la craindre dans le golfe ?

La montée du niveau de la mer est indiscutable. Ici aussi, il y a l’empreinte humaine qui accentue le réchauffement climatique, induisant la montée des eaux. Cette élévation est un phénomène naturel quand elle se déroule sur des dizaines de milliers d’années, de façon imperceptible. Mais elle est accentuée par nos émissions de CO2.

Quelle est votre plus grande source d’inquiétude pour les îles du golfe ?

Concernant les scénarios du Giec, je ne suis ni optimiste, ni pessimiste. Ils sont basés sur des modèles scientifiques poussés, on n’y échappera pas. Ce qui m’inquiète le plus, ce n’est pas l’élévation du niveau marin, parce qu’elle est actée, mais plutôt le dérèglement climatique, qui a des conséquences météorologiques. On ne maîtrise plus les saisons. Avant, l’hiver était la période la plus dynamique, avec quelques tempêtes, des vagues plus importantes. Ce fonctionnement est caduc. Plus il y a de tempêtes et plus elles sont fortes, plus il y a d’érosion littorale et de risques de submersion.

En voit-on déjà les effets sur les îles du golfe ?

De manière générale, les systèmes insulaires sont les territoires littoraux les plus fragiles à l’échelle mondiale. Les îles du golfe sont donc des territoires vulnérables pour l’érosion littorale et l’élévation du niveau marin. Les dégâts peuvent déjà être observés sur les îles. Que ce soit sur l’île d’Arz ou sur l’île-aux-Moines, l’évolution du linéaire côtier sur ces îles est indéniable. Selon les scénarios du Giec, l’île d’Arz deviendrait un archipel. Mais on peut également avoir des submersions avec des tempêtes. Les deux phénomènes se conjuguent et vont en s’accélérant.

Quelles solutions s’offrent aux municipalités ?

On ne peut pas tout préserver, ni tout endiguer. Combattre la mer, il ne faut pas que ce soit systémique. Il faut donc prévoir du recul stratégique, mais également intervenir avec des solutions fondées sur la nature. On ne doit pas rester au niveau de la prise de conscience, il faut que les politiques, les gestionnaires et les scientifiques travaillent à une phase de transition. Les scénarios de l’île d’Arz et de l’île-aux-Moines ne sont pas les mêmes, alors qu’elles sont très proches. Pour que les scientifiques trouvent des solutions locales, il faut financer la connaissance et le suivi des systèmes littoraux.

Sacha Ruello-Jossic

source: https://www.letelegramme.fr/morbihan/vannes/dans-le-golfe-du-morbihan-les-iles-sont-des-territoires-vulnerables-face-au-dereglement-climatique-27-09-2022-13187783.php

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