En Bretagne, tour de chauffe des pêcheurs excédés contre les « technocrates de Paris et Bruxelles » (OF.fr-29/03/23)

Face-à-face tendu entre une trentaine de pêcheurs du Guilvinec (Finistère) et du Morbihan et Lamya Essemlali, présidente de l’ONG (organisation non gouverne- mentale) Sea Shepherd France, dans le pays de Quimperlé, ce mercredi 29 mars.

À la veille des deux journées d’action nationale « Filière morte », jeudi 30 et vendredi 31 mars, les marins-pêcheurs bretons ont multiplié les opérations – parfois tendues – dans toute la Bretagne, de Saint-Brieuc à Saint-Malo en passant par le pays de Quimperlé ou Kervignac, près de Lorient.

Pas de halles à marées, pas de criées, pas de poissonneries ouvertes. Ce jeudi 30 et ce vendredi 31 mars, c’est toute une filière qui sera à l’arrêt pour soutenir les pêcheurs en colère, à l’appel du comité national des pêches. L’opération vise à montrer « ce que serait une Bretagne sans pêche ».

Conséquences du Covid, du Brexit, du prix de l’énergie… Face « aux crises à répétition », la pêche bretonne estime « avoir su relever la tête et avancer », selon ses représentants départementaux et régional. Mais la décision récente de la Commission européenne d’interdire, d’ici à 2030, le chalutage de fond dans les aires marines protégées (12 % des eaux européennes), ne passe pas. D’ici mars 2024, chaque pays devra adopter des mesures pour « éliminer progressivement » cette pêche controversée.

« Des actions pacifiques »

À Saint-Malo, une quinzaine de bateaux de pêche sont entrés dans l’écluse avec banderoles de protestations, fumigènes craqués et sirènes hurlantes. Ils ont ensuite accosté dans le bassin Vauban, au pied des remparts et se sont regroupés sur le quai avant de rejoindre la criée.

« Les exigences de protection des ressources et de l’environnement, nous les partageons. Les actions entreprises par toute la filière sont nombreuses. […] Les zones de protection mises en place par les pêcheurs eux-mêmes sont plus nombreuses que jamais, s’indignent, dans un communiqué, les présidents des comités des pêches Olivier Le Nézet (Morbihan et Bretagne), Yannick Le Calvez (Finistère), Grégory Métayer (Côtes-d’Armor) et Philippe Orveillon (Ille-et-Vilaine). Mais tout ce travail de terrain est écrasé par des décisions brutales prises par des technocrates à Paris ou à Bruxelles. »

Alors que depuis une semaine, la profession multiplie les démonstrations de force dans toute la Bretagne, les quatre représentants appellent à des « actions pacifiques, symboliques et coordonnées sur l’ensemble de la filière » et se « désolidarisent d’avance de toute autre forme d’action et de violence », comme le saccage, vendredi 24 mars, des bureaux de l’organisation de producteurs « Pêcheurs de Bretagne », à Lorient (Morbihan).

« Faut se calmer, les gars »

Près de 200 pêcheurs se sont rassemblés devant la préfecture de Saint-Brieuc (Côtes-d’Armor). Un brasier a été allumé devant le bâtiment.

Rassemblement sur le port de Saint-Malo (Ille-et-Vilaine), péage gratuit à La Gravelle (Mayenne) puis opération escargot de Laval (Mayenne) à Rennes (Ille-et-Vilaine)… À la veille des journées d’action nationales, le tour de chauffe des pêcheurs, ce mercredi, a parfois été tendu. Lors du rassemblement de près de 200 pêcheurs devant la préfecture de Saint-Brieuc (Côtes-d’Armor), l’un d’eux a dû calmer des jeunes très remontés qui lançaient des fumigènes en direction des policiers : « Faut pas faire ça, les gars, faut se calmer sinon le préfet ne va pas nous recevoir. » Un brasier a néanmoins été allumé devant le bâtiment avant d’être éteint, préalable à toute discussion exigé par le préfet des Côtes-d’Armor, Stéphane Rouvé.  

Devant l’usine agroalimentaire Cité Marine (250 salariés), à Kervignac, près de Lorient (Morbihan), les pêcheurs ont aussi allumé des feux pour obtenir l’arrêt de la production durant deux jours. Eric Le Hénaff, le PDG, a dû accepter de fermer l’usine ce vendredi. « C’est inédit, indique le dirigeant, mais on veut montrer qu’on est solidaires aussi. »

« Déjà que 100 % de votre poisson est importé. Ça serait un geste fort envers la pêche française », a estimé David Le Quintrec, porte-parole des pêcheurs en colère du Morbihan.

« Les pêcheurs se trompent de cible »

Celui-ci est soutenu par les conseillers régionaux Rassemblement national (RN), Patrick Le Fur et Florent de Kersauson. « Nous avons fait une dizaine de propositions notamment sur les éoliennes, le carburant, les quotas de pêche. Elles ont été validées par David Le Quintrec et Sébastien Le Prince (Finistère). Nous les soutenons et nous ne les manipulons pas. Penser qu’ils sont manipulés, c’est faire un affront aux pêcheurs », a indiqué Patrick Le Fur, réagissant ainsi aux propos du président du conseil régional de Bretagne, Loïg Chesnais-Girard la veille.

Dans la matinée, un face-à-face tendu s’était aussi déroulé, sous le regard d’une douzaine de gendarmes, entre une trentaine de pêcheurs du Guilvinec (Finistère) et du Morbihan et Lamya Essemlali, présidente de l’ONG (organisation non gouvernementale) Sea Shepherd France. Celle-ci n’était pas présente à son domicile, dans le pays de Quimperlé, quand les pêcheurs se sont invités pour la deuxième fois de la semaine. Mais elle n’a pas esquivé la discussion et s’est rendue sur place. Dans la semaine, elle avait estimé que «  les pêcheurs se trompent de cible en faisant de Sea Shepherd un bouc émissaire ».

Laetitia JACQ-GALDEANO avec les rédactions de Quimperlé, Saint-Brieuc, Saint-Malo et Lorient.

Source: https://www.ouest-france.fr/mer/peche/en-bretagne-tour-de-chauffe-des-pecheurs-excedes-contre-les-technocrates-de-paris-et-bruxelles-5bb09f2a-ce3f-11ed-bbf3-e1e726281547

URL de cet article: https://lherminerouge.fr/en-bretagne-tour-de-chauffe-des-pecheurs-excedes-contre-les-technocrates-de-paris-et-bruxelles-of-fr-29-03-23/

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