
Macron et tous ses soutiens poursuivent leur politique meurtrière, après que des millions d’électeurs l’ont rejetée sans appel !
Par Nicole BERNARD.
Le 18 juillet (le 18 juillet !!), la Caisse nationale d’assurance maladie, imperturbable, a voté les propositions d’économies pour la loi de financement de la Sécurité sociale pour… 2025. La direction a trouvé une écrasante majorité pour poursuivre la politique de casse puisqu’il n’y a que 3 voix contre (celles de la CGT après discussion interne). Tous les autres syndicats, ainsi que les mutuelles et personnes qualifiées, ont voté pour ou « ont pris acte ». Le patronat s’est abstenu pour obtenir davantage.
Les économies, votées par presque tout le monde, portent sur les hôpitaux, les arrêts de travail et les transports sanitaires ! Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes…
Bien évidemment, la Cnam n’a pas décidé d’elle-même du PLFSS 2025. Elle est, comme d’habitude, le bureau d’études du gouvernement.
Le gouvernement démissionnaire est donc en train de travailler à la loi de financement de la Sécurité sociale 2025 dont il attend des milliards d’économies supplémentaires pour pouvoir continuer à exonérer les patrons de leurs cotisations sociales.
Combien de temps cela va-t-il durer ? Combien de temps cela peut-il durer ?
Et d’abord, pourquoi une loi de financement de la sécurité sociale ?
Dans un récent numéro du Monde, un journaliste s’interroge : « Le PLFSS a un caractère un peu moins impérieux que le projet de loi de finances. Car il n’est pas un texte d’autorisation de crédits. »
Très juste ! Pas plus aujourd’hui qu’hier, il n’y a besoin d’une quelconque loi de financement pour que la Sécurité sociale paye les prestations qu’elle doit à ses bénéficiaires. Les droits sont codifiés dans le Code de Sécurité sociale, pas dans la loi de financement.
Pendant 51 ans, de 1945 à 1996, il n’y a pas eu de loi de financement de la sécurité sociale
Pendant 51 ans, aucun budget de la sécurité sociale n’a été voté par le Parlement. Pendant 51 ans, la Sécurité sociale a payé les prestations qu’elle devait à ses assurés et ayant droits et financé les hôpitaux et services de santé sans y être « autorisée » par un quelconque budget.
Conformément à l’article 1er de l’ordonnance du 4 octobre 1945 (oui, en 1945) qui stipule : « Il est institué une organisation de la Sécurité sociale destinée à garantir les travailleurs et leurs familles contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gain, à couvrir les charges de maternité et les charges de famille qu’ils supportent ».
GARANTIR ? COUVRIR ? Qu’est-ce que cela veut dire ?
« Garantir », cela veut dire que ce sont des droits, qui ne peuvent être assujettis à aucune condition financière !
« Couvrir », cela veut dire que les prestations doivent couvrir les dépenses des ménages. C’est la raison pour laquelle les moyens financiers résident dans les cotisations assises sur les salaires et gains dont le niveau peut varier en fonction des besoins.
C’est totalement contradictoire avec toute idée d’un budget définissant l’enveloppe acceptable de dépenses ! Budget, d’ailleurs, totalement dénué de fondement. En effet, qui, en décembre 2019, date du vote de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2020, pouvait prévoir que trois mois après, l’épidémie de Covid entraînerait des soins par définition imprévus.
Ou alors, il ne s’agit plus de « garantir » et de « couvrir » mais de tout autre chose ? (cf. encadré ci-dessous) En clair de contraindre à des économies pour répondre aux besoins du patronat qui n’a jamais, jamais accepté la Sécurité sociale.
Alors, d’où viennent les LFSS ?
Le 15 novembre 1995, à 17 heures, le Premier ministre de Jacques Chirac, Alain Juppé, engage la responsabilité de son gouvernement sur un plan qui constituait, selon ses propres mots « un changement structurel, une novation sans exemple dans l’histoire de notre protection sociale depuis 30 ans »1.
« Seul l’appel à la responsabilité de chacun peut apporter la solution pour tous » assène le Premier ministre.
L’appel à la responsabilité de chacun commence par la définition d’une enveloppe financière opposable à tous, aux malades, aux médecins, aux retraités, aux familles. Enveloppe à ne pas dépasser.
Non seulement le déficit se reporte d’une année sur l’autre mais la population est rendue collectivement responsable par la création de ce que Juppé appelle « la dette sociale » que nous payons, tous, depuis 1996 au moyen d’une taxe supplémentaire, la Contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS)2.
Ce « changement structurel » s’ordonne autour de l’adoption, chaque année, par le Parlement d’une loi de financement de la Sécurité sociale qui fixe le budget à ne pas dépasser.
« En démocratie, il incombe au Parlement, de se prononcer », pérore Alain Juppé. « Il doit pouvoir fixer les objectifs des politiques de protection sociale, les ressources financées par l’impôt. » Sauf en cas d’article 49.3 !
Quel rapport avec la Sécurité sociale qui n’est pas une « politique sociale » mais une institution garantissant des droits ? Quel rapport avec cette institution dont « la couverture des charges est assurée par des cotisations assises sur l’ensemble des salaires ou gains perçus par les bénéficiaires » (Art. 30 de l’ordonnance du 4 octobre 1945)3 ?
On mesure la contre-révolution brutale que représente ce plan dans lequel c’est l’État qui décide si la sécurité sociale paye ou non les prestations ! D’autant que, il inclut, pour que les choses soient bien claires :
– La remise en cause des régimes spéciaux de retraite ;
– le remplacement progressif des cotisations « ouvrières » par la CSG qui s’impose à tous, actifs, retraités, malades, etc. ;
– la création des agences régionales d’hospitalisation pour fermer des établissements hospitaliers
C’est un plan de guerre contre la principale conquête de 1945
Le Cac 40 remonte, les marchés applaudissent. La CFDT, qui n’a jamais soutenu la Sécurité sociale (son ancêtre, la Confédération française des travailleurs chrétiens, avait d’ailleurs refusé de soutenir l’ordonnance du 4 octobre 1945) appuie le plan Juppé.
Tout semble aller pour le mieux.
Et pourtant, le 28 novembre 1995, à l’appel de la CGT et de Force ouvrière, la masse des ouvriers, des salariés, des fonctionnaires déboule pour le retrait du plan Juppé.
Les cheminots, les ouvriers de la RATP, les salariés de différentes catégories rentrent dans la grève. Une grève formidable dont tous ceux qui l’ont vécue se souviennent.
Le choc a été indubitable. Au point que Juppé devra reculer et retirer sa réforme des régimes spéciaux.
Par contre, il maintient le cœur de son plan : l’obligation de respecter un budget préétabli pour la Sécurité sociale et, en octobre 1996, le Parlement votera la première loi de financement de la Sécurité sociale.
La grève générale a déstabilisé le gouvernement Juppé
Chirac dissout le 21 avril 1997 l’Assemblée nationale. Les élections donneront la majorité au PS et au PCF. Jacques Chirac nomme Lionel Jospin, du PS, pour constituer le gouvernement.
Malheureusement, la nouvelle majorité PS-PCF se refusera à abroger les ordonnances Juppé, consolidant les lois de financement de la Sécurité sociale dont nous subissons depuis presque 30 ans les conséquences catastrophiques.
Car les faits sont là : en 30 ans, les conséquences des lois de financement ont été dramatiques. Tous les ans, les gouvernements, quelle que soit leur couleur politique, ont remis en cause des acquis de la Sécurité sociale.
Avec les lois de financement, les remboursements ont été diminués (derniers en date, le remboursement des soins dentaires), des franchises ont été imposées pour sanctionner financièrement ceux qui ont le plus besoin de soins, les indemnités journalières ont été remises en cause, les hôpitaux ont été sommés de diminuer leurs dépenses, etc… Chaque année, des acquis ont été remis en cause.
N’est-il pas temps de dire : ça suffit ! N’est-il pas temps d’en finir avec cette machine à détruire les droits de la Sécurité sociale que sont les lois de financement ?
Quand bien même, en 1997, le PS et le PCF s’étaient refusés à le faire, la vraie solution, conforme aux intérêts des travailleurs et du peuple serait d’abroger immédiatement les ordonnances Juppé et d’en revenir aux principes de 1945, acquis des puissantes mobilisations pour des revendications vitales, contre les patrons et leurs représentants.
UNE BAISSE PROGRAMMEE DES DEPENSES DE SANTE Le 9 juin 1988 était sorti le rapport Chotard, du nom du président du CNPF (l’ancêtre du Medef, ndlr). Un rapport qui stipule que « La baisse des prélèvements obligatoires doit être poursuivie et accentuée ». Et comme les moyens sont destinés à diminuer… les prévisions de dépenses sont d’ores et déjà à la baisse. Donc, « il conviendra de réduire les capacités hospitalières excédentaires ». |
°°°
URL de cet article: https://lherminerouge.fr/en-plein-ete-le-gouvernement-demissionnaire-prepare-une-nouvelle-loi-de-financement-de-la-securite-sociale-io-fr-16-08-24/