
Alors que le mécanisme est voué à disparaître à la fin de cette année, syndicats d’EDF, élus, experts et citoyens ont affûté leurs armes pour défendre un véritable service public de l’énergie, loin des déficiences du dispositif.
Par Marie TOULGOAT.
La mort de l’Arenh est annoncée et chacun veut planter le clou dans le cercueil. Alors que l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique vivra ses derniers instants le 31 décembre de cette année, le Conseil national de l’énergie (CNE) a voulu dresser le bilan de ce mécanisme né en 2010 de la loi Nome, ce 5 juin à l’Assemblée nationale. Il ne fait guère d’étincelles.
« L’Arenh revient à biberonner une concurrence faussée dans le secteur de l’électricité, qui est pourtant un bien de première nécessité », pointe Gwenaël Plagne, secrétaire CGT du comité social et économique central d’EDF. Le dispositif permet à des fournisseurs d’électricité alternatifs de se fournir auprès de l’opérateur historique à un prix fixe et décorrélé des coûts de production, 42 euros par MWh, dans la limite de 100 TWh/an alloué au dispositif.
« En cinq ans, le prix de l’électricité a bondi de 60 % »
Né des demandes de Bruxelles de libéraliser l’électricité et de porter un coup fatal au monopole historique d’EDF, l’Arenh a totalement dérégulé le secteur de l’énergie, s’accordent à dire les participants au colloque. En ouvrant le secteur à des concurrents non productifs, la loi Nome a entraîné une grande volatilité des prix, à l’origine de la crise énergétique des années passées, forçant le gouvernement à accoucher du bouclier forfaitaire pour éponger les dégâts. Bailleuse sociale en Île-de-France et invitée du CNE, Carine Delahaie voit chaque jour chez ses locataires les conséquences directes de cette dérégulation. « En cinq ans, le prix de l’électricité a bondi de 60 %. Pour certains locataires, au chômage, très précaires, je vais devoir annoncer des charges jusqu’à 900 euros », souffle-t-elle.
L’Arenh a également conduit à un affaiblissement d’EDF, forcée à brader son énergie à bas coût à ses concurrents, voire à en acquérir à prix d’or sur les marchés pour la revendre à perte, lorsque sa production ne permettait plus de suivre la cadence de cette concurrence acharnée. « Nous estimons le préjudice pour EDF de l’Arenh à 20, 25 milliards d’euros. Mais ce n’est que la face émergée de l’iceberg et cela fait des années que l’on demande une analyse financière fine de cette concurrence faussée », insiste Gwenaël Plagne.
Si le CNE et ses invités s’accordent sur les préjudices de l’Arenh, une question subsiste : à quoi ressemblera le secteur de l’énergie une fois que la disparition du dispositif sera actée ? « Rester dans une logique de marché est une erreur fondamentale qui nous mènera à une nouvelle crise énergétique. Je prône un service public de l’électricité avec un monopole public », assène Fabien Gay, sénateur communiste et directeur de l’Humanité. Première pierre à l’édifice d’une électricité échangée à prix juste, les électrons devront être vendus à un montant fixé sur leurs coûts de production, et non sur les aléas du marché, répètent syndicats, élus et experts. Un tel projet ne semble toutefois pas coïncider avec les velléités ultralibérales de l’Union européenne et du gouvernement, qui serait plus enclin à maintenir l’électricité dans un marché libéralisé.
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