Le premier ministre travailliste Keir Starmer a salué la désignation de Kemi Badenoch à la tête du Parti conservateur comme « un moment de fierté pour notre pays ».
Or tous les observateurs, même Le Monde journal de référence de la bourgeoisie, considèrent que cette nomination « marque un virage à droite ».
C’est le moins que l’on puisse dire.
Parmi les priorités de la direction conservatrice il y a la lutte contre l’immigration dont Kemi Badenoch affirme notamment qu’elle « n’était pas bonne » pour le pays et que « toutes les cultures ne se valent pas » pour justifier une politique migratoire plus agressive et raciste.
Elle affiche son positionnement très réactionnaire dans le débat lié notamment aux droits des personnes LGBT+ ou des minorités ethniques.
Elle s’est aussi dite « sceptique » sur l’objectif de neutralité carbone que s’est fixé le Royaume-Uni.
Selon elle le congé maternité est trop long. Lorsqu’elle était ministre des Femmes et de l’Égalité, elle a soutenu la restriction des droits des personnes trans et leur interdiction dans les lieux réservés aux femmes.
Elle considère que 10 % des fonctionnaires de l’administration sont tellement mauvais « qu’ils devraient se trouver en prison ».
Il faut savoir qu’en Grande-Bretagne après les gouvernements Thatcher et Blair de guerre contre les classes populaires, celles-ci vivent dans des conditions précaires dans tous les domaines. Par exemple un propriétaire peut obliger les occupants de son logement à le quitter, à partir de six mois après le début du bail, sans motif et sans recours. Les locataires ont deux mois pour vider les lieux (« no fault eviction » expulsion sans faute). Le Labour a promis de remédier à cette loi inique…Wait and see.
Synthèse du programme de Kemi Badenoch: elle voue un culte à une autre femme qui a dirigé le parti conservateur, Margaret Thatcher, la meurtrière de Bobby Sands, la matraqueuse des mineurs, la bouchère des Malouines.
Est-ce cela qui suscite « le fierté » de Starmer le Premier ministre travailliste? A moins que ce soit le fait qu’elle devient la première femme noire à diriger l’un des principaux partis politiques de Grande Bretagne? Le dernier Premier ministre conservateur en date était Rishi Sunak qui est d’origine indienne et cela ne l’a pas empêché d’avoir une politique raciste et anti-populaire, une austérité violente et une casse de ce qui subsiste des services publics.
En fait on assiste en Grand Bretagne ce à quoi nous assistons partout y compris en France : la droite, talonnée par l’extrême-droite néofasciste, croit pouvoir faire face à cette concurrence en adoptant le discours de son rival. Aux dernières législatives l’extrême-droite Reform UK du vétéran du Brexit Nigel Farage a connu une progression sensible. La panique s’empare donc de la droite qu’il n’est pas nécessaire de trop bousculer pour qu’elle adopte des accents fascisants qu’elle a connu en d’autres temps.
Badenoch considère que ses prédécesseurs conservateurs ont « abandonné la libre entreprise et les marchés libres » en faveur d’une approche dans laquelle le parti « parlait à droite, mais gouvernait à gauche », ce qui a causé sa perte. On connait…
Elle éructe contre les « dérives wok », le « wokisme », nouvelle tarte à la crème des droites extrêmes et des extrêmes droites. Cette thématique permet aussi de camoufler le bilan social calamiteux des conservateurs.
Parallèlement cette droite extrême est à la manœuvre. Ainsi Paul Marshall, un homme d’affaires milliardaire ayant amassé une fortune à la tête de fonds spéculatifs, fondateur de GB-News, la Fox-News ou la C-News britannique, vient de frapper un grand coup en mettant la main sur le prestigieux hebdomadaire The Spectator, très influent au sein de la droite britannique.
La mutation des droites en extrême-droites et, en tous les cas, l’union des droites devient l’axe stratégique des bourgeoisies dans toute l’Europe, jusqu’aux institutions de l’UE avec la constitution d’un axe Bruxelles-Rome.
Antoine Manessis
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