
« Il devient urgent maintenant qu’on s’organise concrètement (…). C’est pourquoi je serai présente au meeting international contre la guerre le 5 octobre prochain » : la parole à Astrid Petit, sage-femme, responsable CGT dans la santé.
Par la rédaction d’IO
La presse a révélé, les instructions ministérielles pour adapter les hôpitaux à la guerre. Quelle est ta réaction ?
Astrid Petit : Il serait demandé aux ARS de sensibiliser, dès à présent, « aux contraintes d’un temps de guerre marqué par la raréfaction des ressources, l’augmentation des besoins et la survenue d’éventuelles rétroactions sur notre territoire ».
Inquiétant mais aussi tout à fait cynique ! On est déjà tous les jours en situation de « raréfaction des ressources » dans les hôpitaux !
L’accès aux urgences a été « régulé » pendant tout l’été (pré-appel obligatoire au 15), ce qui n’a pas empêché qu’elles saturent quand même. À Caen, il manque 15 médecins aux urgences. À Agen-Nerac, l’ARS vient de déclencher
un plan blanc pour réquisitionner des urgentistes épuisés (jusqu’à 92 heures de travail par semaine !). Partout les personnels dénoncent des conditions intenables qui les poussent à la démission. Les sages-femmes de Mayotte sont en droit de retrait depuis le 14 août car elles n’en peuvent plus. Sur les 170 prévues, il n’en reste aujourd’hui que 43 en service (dont 7 réservistes). Le bloc opératoire de Cayenne a déprogrammé des dizaines d’interventions cette semaine, à la demande des médecins eux-mêmes, en raison du manque de personnels. La situation dans les hôpitaux psychiatriques est alarmante… Bref, ça craque de partout.
On ne parvient déjà pas à faire face aux besoins de la population, qu’est ce qui se passerait s’il fallait en plus déporter les soignants pour prendre en charge un afflux de soldats blessés ? Cela veut dire mettre la population en très grand danger.
Quelles réactions chez les hospitaliers, les syndiqués, dans ta fédération ?
Les hospitaliers et beaucoup de syndicats font le lien entre la situation actuelle dans nos établissements, l’augmentation exponentielle du budget des armées, et les 5 milliards d’économies supplémentaire que le gouvernement veut faire sur la santé dans son prochain budget : ils sont en train de préparer la guerre et c’est la population qui va payer (en euros et en vies). On n’en veut pas.
Dans les hôpitaux, il y a régulièrement des rassemblements, des services en grève… qui parviennent parfois à faire reculer les plans d’économies. Par exemple, à Laval cet été, les personnels et la population ont bloqué un plan de suppression de cinquante postes qui devait s’appliquer dès la rentrée, en occupant l’hôpital. Mais tout le monde a en tête ce n’est que partie remise et la question d’y aller tous ensemble est posée.
Lorsque le mouvement « Bloquons tout le 10 septembre » a surgi après les annonces du budget Bayrou, de nombreux syndicats CGT de la santé ont immédiatement informé la fédération qu’ils le préparaient. C’est pourquoi la direction fédérale appelle aujourd’hui tous ses syndicats à y « répondre avec le plus de force possible » pour défendre l’hôpital, le social et le médico-social « dès le 10 septembre ». Et, ce qui est tout à fait inhabituel, la fédération appelle à participer aux « assemblées citoyennes ».
On sent une vraie attente des collègues autour du mouvement du 10 septembre, et la conscience que ça fait déjà trembler l’édifice avec la possibilité que Bayrou parte le 8 septembre. On ne veut pas se retrouver comme en 2023 au moment de la réforme des retraites, à être baladés de journées d’action en journées saute-mouton.
Au final, ce qu’on a devant nous c’est quand même qu’ils préparent de plus en plus concrètement la guerre. L’instruction aux ARS de préparer les hôpitaux à un conflit armé en est l’illustration. Les peuples, les travailleurs, les syndicats n’y ont aucun intérêt. Il devient urgent maintenant qu’on s’organise concrètement nous aussi pour les empêcher d’aller jusqu’au bout. C’est pourquoi je serai présente au meeting international contre la guerre le 5 octobre prochain au Dôme de Paris et je discute avec mes camarades et collègues pour qu’elles et ils y participent.
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