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Alors que les résultats du constructeur au losange sont dans le rouge, le nouveau directeur général, François Provost, nommé le 30 juillet, a déjà annoncé un tour de vis budgétaire. Voici les mesures à craindre.
Par Cécile ROUSSEAU.
La tête est nouvelle mais les objectifs sont tout tracés. Le 30 juillet, le conseil d’administration de Renault SA a validé la candidature de François Provost au poste de directeur général du constructeur. Une nomination surprise pour le directeur des achats, des partenariats et des affaires publiques du groupe, X-Mines de 57 ans, qui avait rejoint la multinationale en 2002.
Son arrivée se percute avec la publication, jeudi 31 juillet, des résultats économiques dans le rouge pour la marque au losange (dont l’État est actionnaire à 15 %). Renault a vu son bénéfice ajusté, hors impact de Nissan, plonger de 69 % au premier semestre à 461 millions d’euros, notamment à cause d’un marché européen très compétitif.
Les syndicats alertent sur la casse sociale chez Renault
Comme annoncé début juillet, l’évolution comptable du traitement de Nissan et ses mauvais résultats impliquent une perte nette de 11,2 milliards d’euros dans ses comptes. Quant à sa marge opérationnelle, elle est de 6 %, en recul de 2,1 points.
Outre l’alliance chancelante avec son partenaire nippon et les tensions géopolitiques, le chiffre d’affaires du constructeur français (marques Renault, Dacia, Alpine), tombé au quinzième rang mondial, a tout de même atteint 27,6 milliards d’euros au premier semestre, en croissance de 2,5 % sur un an.
« Ils sont allés chercher le pire candidat, celui qui est en partie responsable de la stratégie menée par Luca De Meo, l’ancien directeur général dont il était le bras droit », observe David Leblond-Maro, délégué syndical central CGT.
Dans un communiqué, le syndicat n’a pas manqué de mettre en garde François Provost : « Contre toute tentation de rupture brutale ou de nouvelle casse sociale », précisant que 9 000 postes ont été supprimés depuis 2020. « Renault n’a pas besoin d’un énième plan à courte vue ou d’une logique financière guidée uniquement par le profit immédiat. L’entreprise a besoin d’une vision industrielle durable, qui mise sur les compétences de ses salariés et sur l’ancrage de sa production en France. »
Renault gèle ses embauches jusqu’en 2026
Si le nouveau directeur général s’est donné cent jours pour évaluer la situation, les premiers serrages de boulons ont été annoncés en interne. Comme le révèle Libération, un gel total des embauches est prévu partout dans le monde jusqu’au 31 décembre 2025. Le groupe a également indiqué avoir renforcé son plan de réduction des coûts, en frais administratifs, en production et en recherche et développement.
« Une baisse de 40 % des frais fixes nous avait déjà été imposée précédemment. Maintenant, quand on veut une paire de chaussures de sécurité, il faut que l’achat soit validé par le N + 5 », explique Richard Gentil, administrateur CGT. « François Provost nous a aussi dit : “On va expliquer aux sous-traitants comment faire des plans de compétitivité” », ajoute-t-il.
La stratégie « Renaulution », déjà pilotée par cet homme discret sous la direction de Luca De Meo (parti le 15 juin), donnant une orientation plus haute gamme au groupe, avait un temps sauvé les meubles.
Mais les créations de deux filiales, particulièrement celle d’Horse en 2024 à laquelle il a œuvré (coentreprise où Renault est en partenariat avec le constructeur chinois Geely et le géant du pétrole saoudien Aramco), vouée au développement des moteurs thermiques et hybrides, et celle d’Ampère pour les activités électriques, ont tout d’une usine à gaz. « Ampère a été montée uniquement pour être introduite en Bourse, mais ils n’ont jamais réussi », constate David Leblond-Maro.
Le pari risqué du tout-électrique
Pour Richard Gentil, ce découpage en business units donne lieu à des fonctionnements aberrants. « Je travaille à l’usine de Cléon (Normandie) et, à l’intérieur, les salariés ont plusieurs statuts : Renault, Ampère, Horse. C’est ingérable. »
Le virage tout-électrique de la multinationale, notamment en France, alors que ce sont les moteurs thermiques qui tirent encore le marché, pourrait mener tout le monde dans le mur : « Certaines usines sont au chômage technique, souligne l’administrateur CGT. Après un bon démarrage, le marché de la voiture électrique stagne même s’ils espèrent le relancer avec la Renault 5 Five. Mais si on continue avec le tout-électrique, on va planter les usines françaises à Douai, Maubeuge… »
Alors que François Provost veut privilégier la valeur (les ventes) sur le volume, le nombre de voitures écoulées n’a cessé de chuter jusqu’à atteindre 2,3 millions de véhicules l’année passée. Tout en multipliant les partenariats à l’étranger, l’homme avait géré le dossier de la Fonderie de Bretagne, filiale de Renault laissée sur le bord de la route avant d’être reprise par un autre secteur. Autant de faits d’armes soufflant un vent d’inquiétude pour la suite.
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