
Un pacte de haine contre les musulmans
«C’est important pour nous d’être là car vous avez le même ennemi que nous». Jordan Bardella, président du plus grand parti d’extrême droite français, fondé par des nazis et des pétainistes, a posé ces mots devant de nombreuses caméras le 26 mars, lors de sa visite en Israël. Le journal Le Monde raconte que lors de son déplacement, Jordan Bardella et sa délégation ont pu entendre des détonations résonner depuis Gaza tout proche, et apercevoir les ruines fumantes du territoire palestinien. Ce qui donne un aspect d’autant plus inquiétant et lugubre sur le sort que réserve le RN à ses «ennemis» en France.
Mais ce renversement des valeurs a été plus loin : le représentant du RN a modifié son programme pour se rendre à l’Institut Yad Vashem, le mémorial pour les victimes juives de la Shoah construit à Jérusalem. L’héritier du pétainisme sur le lieu de commémoration des victimes du nazisme. Symboliquement, l’inversion est absolue.
Marion Maréchal, autre représentante de l’extrême droite française, était elle aussi l’hôte d’honneur d’Israël. «J’ai été invitée par le gouvernement à participer à une grande Conférence internationale sur la lutte contre l’antisémitisme, où j’interviendrai jeudi sur les Frères musulmans et la menace qu’ils représentent pour nos sociétés. Mêmes ennemis. Mêmes drapeaux de la terreur. Même idéologie. Pour Israël comme pour la France, l’islamisme est une menace existentielle». Ce sont les mêmes mots que Bardella : «mêmes ennemis». Dans l’ordre des priorités, l’extrême droite française déteste plus les musulmans que les juifs, et fait donc alliance avec Israël.
Sur la chaîne israélienne I24, Marion Maréchal est allée plus loin : «Si Jean-Marie Le Pen avait été davantage écouté sur la question de l’immigration, il y aurait probablement beaucoup moins d’actes antisémites en France». Sans être coupée ni contredite, elle a donc réhabilité sur un plateau télé israélien l’un des politiciens les plus antisémites de l’histoire française. Jean-Marie Le Pen recevait encore, juste avant de mourir, des amis néo-nazis dans son château.
En parallèle, Emilio Meslet, grand reporter à l’Humanité, s’est vu à quelques heures de l’ouverture de la conférence de Jérusalem contre l’antisémitisme retirer son accréditation presse. Il avait pourtant été accrédité quelques jours plus tôt pour l’évènement. Les autorités israéliennes choisissent donc d’exclure un journal de gauche et de recevoir avec les honneurs des fascistes français.
Car le «même ennemi», dans la tête de Bardella comme de Netanyahou, désigne aussi la gauche, la démocratie et les valeurs progressistes. En Israël, le Premier Ministre applique une politique raciste, autoritaire, militariste, il dynamite les derniers contre-pouvoirs et purge même ses propres services de renseignement. Dans son gouvernement, on trouve des fascistes, des homophobes et des fanatiques messianistes qui rêvent de «grand Israël» et veulent appliquer la loi divine. Un programme obscurantiste que rêverait d’imposer l’extrême droite française ici.
Dès le 7 octobre 2023, Eric Zemmour déclarait : «Le combat d’Israël est celui de notre civilisation». Pourtant, Eric Zemmour tient régulièrement des propos ouvertement révisionnistes. Il a réhabilité Pétain, présenté comme «sauveur des juifs de France» alors qu’il les a déportés. Il s’est entouré d’une milice néo-nazie pour la sécurité de ses meetings. Il a remis en cause l’innocence du commandant Dreyfus, cible emblématique des antisémites français il y a plus d’un siècle. Éric Zemmour est même allé jusqu’à vanter la «virilité» des nazis dans son livre «Le suicide français» : «Les soldats allemands qui défilent sur les Champs-Élysées sont impressionnants de virilité conquérante».
Son bras droit, Damien Rieu, ancien fondateur de Génération Identitaire, tweetait également dès le 8 octobre 2023 : «Israël est l’avant-poste de l’Occident. Ceux qui veulent la détruire veulent aussi nous détruire. Ils ne font aucune distinction». Marion Maréchal, déjà, estimait à l’époque que «L’extrême gauche et l’immigration extra-européenne nourrissent une cinquième colonne islamiste dans notre pays qui s’exprime à travers le soutien au Hamas». Finalement, soutenir Israël, assimiler les musulmans, la gauche et le terrorisme et expulser les arabes ne font qu’un.
Mais derrière cette alliance monstrueuse, la haine n’a fait que changer, temporairement, de cible principale. L’extrême droite n’a pas abandonné son antisémitisme séculaire, elle priorise juste les musulmans. Pour le moment seulement. Avant de s’occuper d’autres minorités, comme elle l’a toujours fait, juifs et juives compris.
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