
Il est déjà difficile de prendre rendez-vous avec un cardiologue, mais la situation va s’aggraver de façon dramatique dans les cinq prochaines années, prévient le Pr Martine Gilard, du CHRU de Brest.
Quatorze mois d’attente, pour un rendez-vous en cardiologie au CHRU de Brest, si l’on n’y est pas déjà suivi ou arrivé par les urgences. Un an d’attente en moyenne pour une première consultation avec un cardiologue libéral en Bretagne, un délai moindre sur Brest, puisqu’il n’est en moyenne « que » de six mois. Le constat est alarmant, mais le pire est à venir prévient le Pr Martine Gilard, cardiologue au CHRU de Brest, qui a été de 2018 à 2022, présidente de la Société française de cardiologie.
Une moyenne d’âge de 61 ans
« Nous sommes environ 6 400 cardiologues en France, et la moyenne d’âge est de 61 ans. Une grande partie sera bientôt à la retraite. On va probablement perdre 1 500 à 2 000 cardiologues dans les cinq ans, or on ne forme que 180 cardiologues par an, on est loin du compte ! », précise celle qui s’est battue dans les ministères pour faire augmenter le nombre d’internes en cardiologie, sans succès.
« Il y a eu un manque de vision et d’anticipation de nos gouvernants. Depuis 20 ans dans les ministères, je ne vois que les fonctionnaires, pas les ministres ! Des fonctionnaires qui nous répondaient que toutes les spécialités médicales étaient concernées au même degré. Mais la cardiologie traite des patients victimes de maladies cardiovasculaires qui constituent la deuxième cause de mortalité en France ! ».
Le risque de devoir fermer des centres
De plus, le ministère, refusant d’augmenter le nombre d’internes, a pris sur le quota total des places pour de nouvelles spécialités. La cardiologie est donc passée de 220 internes par an à 180 internes.
« La situation est grave, il faut 800 cardiologues de garde chaque jour en France, avec 4 000 cardiologues ce sera très compliqué à organiser. Pour déboucher les infarctus, 1 100 cardiologues interventionnels travaillent dans 211 centres 24 heures sur 24. Le risque est de voir certains centres fermer faute de médecins et une population qui ne sera plus soignée de la même façon selon sa région. Ne pas traiter les problèmes cardiaques est une cause de mortalité. Je crains que la mortalité cardiovasculaire n’augmente dans les prochaines années ».
Auteur : Catherine Le Guen