La cellule Déméter peut continuer à surveiller les écologistes, selon le Conseil d’État (reporterre-7/11/24)

Cette cellule avait été créée par le ministère de l’Intérieur en octobre 2019. – © Thibaud Moritz/AFP

La gendarmerie pourra continuer de surveiller les « actions de nature idéologique » initiées par des organisations écologistes, animalistes ou antispécistes concernant l’agriculture. Et ce, même si ces activités sont parfaitement légales. Le Conseil d’État a validé, par une décision rendue jeudi 7 novembre, cette activité de la cellule de renseignement de la gendarmerie baptisée Déméter.

Cette cellule avait été créée par le ministère de l’Intérieur en octobre 2019. Sa mission, officialisée par une convention avec les syndicats agricoles FNSEA et Jeunes agriculteurs, est de lutter contre les « atteintes au monde agricole ». Il s’agit donc de prévenir le vol de matériel agricole… mais aussi de surveiller les activités des associations dénonçant les conséquences écologiques — ou sur les animaux d’élevage — de l’agriculture industrielle.

C’est cette dernière fonction de surveillance idéologique qui avait été contestée par l’association L214, soutenue par ses consœurs Pollinis et Générations futures. Un jugement du tribunal administratif de Paris avait, en février 2022, demandé l’arrêt des activités idéologiques de la cellule. Le ministère avait fait appel. La justice avait décidé de s’en remettre à l’avis du Conseil d’État, qui vient donc d’être connu.

« Cela ne porte pas atteinte à la liberté d’expression »

Dans sa décision, l’institution estime que « les missions de recueil d’informations confiées à la cellule Déméter, y compris en tant qu’elles consistent à mieux connaître la structuration et les modes d’action des organisations agissant légalement au nom de motivations écologistes, animalistes et antispécistes, n’excèdent pas celles que le ministre de l’Intérieur pouvait légalement confier à la gendarmerie nationale ». Pour lui, cette surveillance « ne saurait légalement porter atteinte à la liberté d’expression ou à la liberté de réunion », et ne vise pas « à intimider ou à dissuader l’expression ou le partage d’opinions ».

Interrogatoires et convocations

Une décision qui laisse les trois associations requérantes perplexes. « Comment ne pas se sentir intimidé en étant potentiellement sous surveillance de la gendarmerie en permanence parce qu’on agit pour la défense des animaux ou de l’environnement, même si ce n’est pas le but recherché par la gendarmerie ? », réagissent-elles dans un communiqué.

Dans le cadre des actions de cette cellule, en décembre 2019, l’association Alerte pesticides Haute-Gironde avait dû répondre à un interrogatoire détaillé de la gendarmerie locale à propos du paisible après-midi de tables rondes sur les pesticides qu’elle organisait. En février 2020 dans le Tarn, une réunion de préparation de la semaine pour les alternatives aux pesticides avait vu débarquer les képis. En juin 2020, en Corrèze, les pandores déconfinés avaient convoqué le porte-parole de l’association Sources et Rivières du Limousin : il avait, lors d’une interview avec France 3, dénoncé des serres de tomates industrielles et mis un pied sur ce terrain privé. Enfin, dans le Gard, toujours en juin 2020, la gendarmerie avait fait circuler un questionnaire aux agriculteurs leur demandant de faire remonter les actes d’« agribashing ».

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Source: https://reporterre.net/Les-activites-ideologiques-de-la-cellule-Demeter-validees-par-le-Conseil-d-Etat

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