La Côte d’ivoire congédie à son tour l’armée française. (La Croix – 01/01/25)

La Côte d’ivoire congédie à son tour l’armée française
Le bataillon d’infanterie de marine de Port-Bouet, en décembre 2019.LUDOVIC MARIN / AFP

Par Thomas Hofnung,

 Le président ivoirien Alassane Ouattara a annoncé, lors de ses vœux télévisés du 31 décembre, la rétrocession de la base militaire française d’Abidjan et le « retrait concerté et organisé » des forces de l’ancienne puissance coloniale de son pays. Un départ qui signe définitivement la fin d’une époque pour les armées françaises en Afrique.

Le dernier clou dans le cercueil, ou peu s’en faut. Lors de ses vœux télévisés, mardi 31 décembre, le président ivoirien Alassane Ouattara a annoncé la rétrocession de la base militaire française d’Abidjan et le départ des forces de l’ancienne puissance coloniale. Un « retrait concerté et organisé », a-t-il précisé. Avec ce départ imminent, « dès janvier » a dit le chef de l’État ivoirien, une page se tourne définitivement pour l’armée française en Afrique.

En quelques années, celle-ci a déjà dû quitter précipitamment le Mali, le Burkina Faso, le Niger. Il y a quelques semaines, le Tchad et le Sénégal ont également annoncé leur décision de congédier les troupes françaises. De l’ancien maillage militaire établi par Paris au lendemain des indépendances, au début des années 1960, ne subsisteront bientôt plus que les bases de Djibouti, dans l’est du continent, et du Gabon, dans l’ouest.

Mais pour combien de temps encore ? Le bail avec Djibouti, où s’est rendu le président Macron juste avant Noël, a certes été récemment renouvelé. Paris tient plus que tout à conserver une emprise dans ce carrefour hautement stratégique, situé à la confluence de la Corne de l’Afrique, de la mer Rouge et de la péninsule arabique.

En revanche, la présence militaire française au Gabon apparaît comme une survivance d’un passé révolu, celui d’une « Françafrique » où en échange de sa protection et d’avantages économiques Paris assurait la sécurité et la pérennité des dirigeants au pouvoir dans ses anciennes colonies.

Considérations électoralistes

Pour les dirigeants locaux, note Thierry Vircoulon, chercheur à l’Institut français des relations internationales (Ifri), congédier l’armée française est désormais devenu « le meilleur moyen de consolider à peu de frais leur popularité » auprès de leurs opinions tant le rejet de la présence militaire française est massif aujourd’hui en Afrique. Le pouvoir tchadien avait ainsi indiqué sa décision juste avant la tenue des élections législatives.

Mardi soir, Alassane Ouattara a d’abord annoncé le départ de l’armée française, avant d’égrener les nombreuses réussites du gouvernement. En octobre prochain, la Côte d’Ivoire élira son président. Au pouvoir depuis 2011, Alassane Ouattara, 83 ans, se représentera-t-il ? La campagne électorale est, en tout cas, bel et bien lancée.

Pour Paris, la potion est amère : l’Afrique de l’Ouest était la dernière zone du globe où la France pouvait encore changer le cours de l’histoire, comme elle le fit en intervenant en Côte d’Ivoire dans les années 2000, puis au Mali et dans le Sahel dix ans plus tard. « La France paye le coût politique de l’échec de l’opération Barkhane dans le Sahel », souligne Thierry Vircoulon.

Depuis la fin de la guerre froide, où la France jouait le rôle de « gendarme de l’Afrique », Paris aura tenté de réinventer le rôle de ses armées. Sans y parvenir. À la veille des annonces surprises du Tchad et du Sénégal, l’Élysée évoquait encore la transformation des bases militaires françaises en lieu de formation, afin de préserver un minimum de présence et d’influence dans ses anciennes colonies. La réponse des pays concernés tient en trois lettres : c’est « non ».

Source : https://www.la-croix.com/international/la-cote-d-ivoire-congedie-a-son-tour-larmee-francaise-20250101

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