
Informations ouvrières a décidé de consacrer une dizaine d’articles dans ses prochains numéros sur la question de la laïcité pour aborder ce terme qui est utilisé aujourd’hui à des fins liberticides, totalitaires, racistes et xénophobes contre une partie de la population.
Par Christian EYSCHEN.
Diviser pour mieux régner a toujours été, pour les pouvoirs totalitaires, le moyen de se défendre contre le droit du peuple à disposer de lui-même.
Nous allons montrer, au fil des articles, que la loi « Séparatisme » du 24 août 2021 est totalement contraire à la laïcité et à la loi de 1905 de Séparation des Églises et de l’État et que cette loi est totalement liberticide et contraire à tous les principes démocratiques et républicains issus de la Révolution française de 1789.
Tout d’abord, commençons par une présentation de ce qu’est vraiment la laïcité.
La laïcité ne s’applique pas aux associations, mais uniquement à l’État et aux institutions
Qu’est-ce que la laïcité ?
Ce n’est pas une philosophie, même si elle a des bases philosophiques. Ce n’est pas une religion civile, justement parce qu’elle n’est pas une philosophie.
Elle n’est ni anti-religieuse, ni pro-religieuse, la laïcité ignore le questionnement philosophique.
La laïcité ignore le fait religieux ou athée, car elle est dans un ailleurs et dans une autre problématique. La laïcité, c’est un système politique qui organise la société.
Les citoyennes et citoyens pensent ce qu’ils veulent, mais quoiqu’ils pensent, ils ont tous les mêmes droits, ils sont égaux devant la loi.
L’État et les services publics sont en charge d’assumer, dans la réalité, les droits des citoyens sans se préoccuper de leurs conceptions de la vie et de l’après la vie. C’est ce qu’on appelle la sphère publique.
L’État ne peut avoir une opinion sur les opinions des personnes.
Venons-en au reste de la société
La sphère privée est composée de tout ce qui n’est pas la sphère publique de l’État, de l’administration, des services publics.
C’est là que doit être respecté l’Article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, qui fait partie du bloc de constitutionnalité de la République.
Celui-ci déclare : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la Loi. »
Les associations, les syndicats, les partis, les obédiences maçonniques, les religions sont là pour représenter des opinions, des envies, des avis, des besoins.
Toutes ces formes d’organisations privées des citoyens ont donc des points de vue, des analyses qui nécessairement sont différents les uns des autres. C’est ce qu’on appelle la démocratie, la libre confrontation des points de vue.
Mais pour que les points de vue puissent se discuter, il faut au préalable qu’il y ait des points de vue et qu’ils puissent s‘exprimer librement. C’est la liberté d’opinion et d’expression.
Par définition, on ne peut donc imposer aux associations, syndicats, partis, obédiences maçonniques… d’être neutres, comme une page blanche. Ces opinions sont une conception des choses, ces pages sont remplies d’avis, elles contribuent à formuler une conscience humaine, des consciences humaines.
Vouloir leur imposer un contrat d’engagements dit « républicains » ou même « de laïcité », comme certaines chartes le veulent dans des collectivités territoriales, c’est leur imposer une idéologie d’État, une religion civile.
Les associations sont par définition différentes. Leur imposer un même modèle et de mêmes engagements est antidémocratique par nature, car c’est nier leur nature spécifique qui est d’avoir une opinion, un avis, un point de vue, nécessairement différent des autres et de l’État.
Répétons-le : la laïcité s’applique aux institutions, et non aux associations de droit privé, sinon il n’y a plus de liberté d’association et d‘opinion.
Les contrats d’engagement républicain (CER) et les chartes de la laïcité sont liberticides. Elles doivent donc disparaître (script d’une vidéo réalisée par la Libre Pensée)
La loi « Séparatisme » est une négation de la démocratie et de la laïcité
– Parce qu’elle fusionne en un seul modèle totalitaire les associations, partis, syndicats, religions qui étaient auparavant régis par des lois différentes : 1884 pour les syndicats, 1901 pour les associations et partis, 1905 pour les associations religieuses. Avec la loi « séparatisme », toutes ces formes d’organisations doivent se plier au modèle imposé par les différents gouvernements Macron.
– Parce qu’elle impose une véritable idéologie d’État qui dicte aux organisations et aux citoyens ce qu’ils doivent penser, dire, et faire au nom des « valeurs républicaines » que l’État est incapable de définir. « Liberté – Égalité – Fraternité » ne sont pas des valeurs, mais des principes qui imprègnent les lois et leurs applications.
Aujourd’hui quand une association veut obtenir une aide de la puissance publique (État et collectivités publiques) pour subvenir à son existence et ses actions (salles pour se réunir, subventions, etc.), elle doit impérativement signer un Contrat d’Engagement Républicain qui la lie à une idéologie qu’elle doit mettre en œuvre.
– Parce qu’elle permet au gouvernement en permanence de dissoudre les associations qui refusent cette idéologie d’État. Depuis 2017 (élection de Macron à la présidence de la République), plus de 40 décrets de dissolution d’associations ont été pris, dont une trentaine depuis la loi « Séparatisme ».
– Parce qu’une organisation (associations, syndicats, partis, religions) est tenue responsable des propos d’un seul de ses membres et qu’elle peut être dissoute pour cela. C’est la responsabilité collective de sinistre mémoire qui fait sa réapparition. C’est l’arme par essence des fascistes, des nazis, des totalitaires contre tous ceux qui ne partagent pas leurs conceptions et qui entendent résister à leurs menées répressives. C’est l’arme contre tous ceux qui « pensent autrement, alors que leur respect est le fondement de la liberté », selon l’heureuse formule de Rosa Luxembourg.
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Pour en savoir plus dans l’immédiat, nous vous recommandons de télécharger gratuitement le n°14 de la collection « Arguments » de la Libre Pensée sur « Communautarisme et Séparatisme » qui fait un point détaillé sur ces questions importantes, dont le monde médiatico-politique parle sans jamais savoir de quoi il est réellement questionPrésentation : Derrière le discours d’Emmanuel Macron aux Mureaux le 2 octobre 2020. La mise en scène commençait par un tweet du Président de la République : « Nous ne tolérerons jamais ceux qui remettent en cause les lois de la République ». Ah bon ? Alors nous sommes entrés en dictature ?On a le droit en démocratie de remettre en cause les lois, d’en vouloir d’autres, de vouloir les abroger et même, au nom de l’objection de conscience de refuser d’appliquer celles que l’on estime contraires à sa conscience. Le Président de la République avait naguère indiqué que « ceux qui parlent de dictature n’ont qu’à l’essayer ». Visiblement, on est en train de le faire.Le Président de la République a présenté son discours par cette formule : « Ce qui est en cause, c’est notre capacité de vivre ensemble ». Allait-il parler de la pauvreté, des SDF, du chômage, de la crise économique, du racisme, de la destruction des services publics, de l’argent-roi ? Tout cela empêche pourtant grandement notre capacité de vivre ensemble, voire de vivre tout court pour beaucoup.Que nenni, Maraud ! Ce qui nous empêche de vivre ensemble, c’est « le séparatisme musulman ». Fallait le trouver ! Tout son discours a été uniquement consacré à l’Islam, c’est un discours de guerre civile pour que les gens s’affrontent entre eux. Sont ainsi désignés à la vindicte populaire les 4 millions de nos concitoyens d’origine arabo-musulmane, coupables de laisser faire le « radicalisme islamiste ». C. E. |
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