La parole à Josè Nivoi, membre du Collectif autonome des dockers de Gênes.
Depuis 2019, nous avons commencé une série de blocages contre le transport naval d’armes. Les premiers blocages que nous avions faits étaient contre la guerre au Yémen. C’étaient des bateaux qui passaient par le port de Gênes et se rendaient en Arabie saoudite. C’étaient des armes qui, en 2019, étaient utilisées contre la population yéménite. Nous avons également bloqué d’autres bateaux qui se dirigeaient vers la Turquie, les armes étaient utilisées contre les populations du nord de la Syrie.
Le 8 mai 2021, nous avons bloqué avec les ports de Livourne et de Naples des chargements d’armes israéliennes, et ce grâce à une coordination que nous avons créée entre les différents ports d’Italie.
Ce 16 octobre, nous avons lu l’appel des syndicalistes palestiniens et nous avons commencé à nous activer pour bloquer les chargements d’armes et la logistique israélienne.
Le 10 novembre, nous avons organisé un blocage du port de Gênes, contre la compagnie israélienne Zim.
Nous avons bloqué pendant sept heures le transport des armes en direction d’Israël en soutien au peuple palestinien et à la résistance palestinienne. Sept jours après, nous avons suivi ce bateau jusqu’au port de Salerne où on a bloqué encore.
Nous faisons ce type d’actions car nous croyons à l’internationalisme et à la solidarité internationale.
En 2019, on a décidé de sortir de la théorie et d’entrer dans la pratique avec des actions. Un des autres facteurs est la question éthique et morale car penser que nos heures de travail créent des morts dans d’autres populations au Yémen ou en Palestine, c’est de la folie. Il y a aussi la question de la sécurité, quand ces bateaux entrent dans le port de Gênes. On a en tête les images de la grande explosion sur le port de Beyrouth, qui montre ce qui peut arriver avec une détonation.
Une bataille politique et syndicale
C’est une bataille politique mais aussi syndicale, car les moyens donnés pour les armes enlèvent des moyens aux budgets de santé publique, de l’école et augmentent l’âge de départ en retraite.
Dans toutes ces actions que nous avons menées, l’État italien n’est pas resté là à nous regarder. Pendant deux ans, ils ont cherché à nous accuser d’être une association de délinquants.
Le 25 février 2021, ils ont organisé une grande opération avec 70 policiers qui ont débarqué dans les maisons de cinq d’entre nous. Le chef d’accusation retenu était « blocage de marchandises de première nécessité » comme peuvent l’être la farine, le lait… Cela qualifiait donc le marché d’armes entre l’Italie et des pays belligérants comme de la marchandise de première nécessité ! Évidemment, ces accusations sont tombées, car alors que l’État italien nous accusait d’être des délinquants, nous avons porté nous-mêmes une série d’accusations.
En Italie, il existe la loi 185 de 1990 qui interdit le trafic et l’expédition d’armes envers des pays qui utilisent comme résolution finale un acte de guerre. C’est une loi qui rappelle aussi l’article 11 de notre Constitution qui limite l’utilisation des armes. Ce qui a permis une forte sensibilisation c’est quand le 25 février de cette année [2023, Ndlr] nous avons organisé une grande manifestation avec près de 10 000 personnes, des travailleurs, des militants syndicaux et des citoyens, où pour la première fois nous avons réussi à traverser complètement le port et la zone industrielle du port de Gênes.
Nous avons pu voir alors une forte solidarité des travailleurs des autres pays. Nous considérons qu’il est nécessaire de créer de larges réseaux. Ainsi, pour la question palestinienne, nous avons vu plusieurs ports européens également bloquer le transport d’arme.
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