
Un plan qui frappe toutes les conquêtes de la classe ouvrière : la Sécurité sociale, les congés payés, les services publics, le Code du travail. Un plan pour lequel le président du Medef, Patrick Martin, a déclaré : « C’est lucide, courageux et équilibré. »
Par Pierre VALDEMIENNE.
La crise qui étreint les sommets de l’impérialisme américain s’approfondit : le Wall Street Journal, le journal quasi-officiel du capital, qui appartient au puissant groupe de média News Corp, vient de publier une correspondance pour le moins embarrassante entre le président des États-Unis et le pédocriminel Jeffrey Epstein.
Donald Trump a en réponse attaqué le journal pour diffamation et réclame 10 milliards de dollars. En réaction, le quotidien a maintenu ses informations. De quoi faire dire au journal l’Opinion (21 juillet) que le locataire du Bureau ovale « traverse actuellement l’une des périodes les plus troubles de sa présidence » , avec « 69 % des Américains (qui) pensent qu’on leur cache la vérité » et un « malaise inédit » dans le camp républicain.
C’est dans ce contexte que le président des États-Unis a appelé à « surveiller de très près » l’élection à venir à la mairie de New York : après avoir menacé publiquement et directement Zohran Mamdani, candidat des Socialistes démocrates d’Amérique (DSA) qui a remporté récemment la primaire démocrate, en déclarant devoir « l’arrêter » , Trump a menacé de suspendre les fonds fédéraux de New York si celui-ci est élu maire.
Le président des États-Unis a effectivement de quoi être inquiet car le candidat DSA a reçu récemment des soutiens de poids pour sa campagne : le syndicat 1199 SEIU du secteur de la santé, qui compte 400 000 membres ; le syndicat UFT du secteur de l’enseignement, qui représente près de 200 000 membres (dont environ 75 000 enseignants) ; la section locale 802 de la Fédération américaine des musiciens, le plus grand syndicat local de musiciens professionnels au monde ; ou encore l’organisation juive Jewish Voice for Peace.
D’autant qu’après Zohran Mamdani à New York, c’est le tour d’Omar Fateh, candidat DSA, de remporter la primaire démocrate aux élections municipales de Minneapolis.
« Un plan de rigueur comme la France n’en a jamais connu depuis un demi-siècle » (l’Opinion)
C’est dans ce contexte qu’en France, le gouvernement Macron-Bayrou a présenté son plan de guerre il y a une semaine ; « un plan de rigueur comme la France n’en a jamais connu depuis un demi-siècle », selon le journal financier l’Opinion (16 juillet).
Un plan qui, pour financer l’« effort de guerre », frappe toute la population laborieuse : les jeunes, les salariés du privé, les fonctionnaires, les retraités.
Un plan qui frappe toutes les conquêtes de la classe ouvrière : la Sécurité sociale, les congés payés, les services publics, le Code du travail. Un plan pour lequel le président du Medef, Patrick Martin, a déclaré : « C’est lucide, courageux et équilibré. » (LCI, 16 juillet). Pas étonnant dans la mesure où le Premier ministre a donné satisfaction à toutes les demandes du patronat, à commencer par ne pas toucher aux centaines de milliards d’aides publiques déversées tous les ans aux entreprises (211 milliards pour la seule année 2023 selon un rapport de la commission d’enquête sénatoriale).
Les partisans de la non-censure contraints de menacer Bayrou
Dès les annonces, ce plan a suscité une levée de boucliers, y compris auprès de celles et ceux qui jusqu’à présent avaient soutenu le Premier ministre en refusant de le censurer.
Le premier secrétaire du Parti socialiste (PS), Olivier Faure, a ainsi déclaré sur X : « Les choix budgétaires présentés par François Bayrou sont profondément injustes. Sur les bases actuelles, la seule perspective possible, c’est la censure ! » Ce qui n’empêche pas François Hollande de demander au gouvernement de « chercher des compromis » qui permettraient d’« écarter le risque de la censure » (Le Monde, 17 juillet).
De son côté, Marine Le Pen, présidente du Rassemblement national (RN), après en avoir rajouté sur les mesures réactionnaires et xénophobes relatives aux « vraies économies » à faire sur « l’immigration » et « la bureaucratie à l’hôpital ou dans l’enseignement », a déclaré sur X : « Si François Bayrou ne revoit pas sa copie, nous le censurerons. » En clair, pour ne pas censurer, elle demande à Bayrou d’en faire encore plus contre les travailleurs immigrés et leur famille, et d’amplifier la destruction du système de santé et de la fonction publique.
Même du côté de ses « soutiens naturels », ça ne passe pas
Dans Le Monde (22 juillet), le rapporteur général du futur projet de loi de finances, le centriste Charles de Courson, déclare : « En l’état, ce budget ne passera pas ».
Même du côté de ses « soutiens naturels », ça ne passe pas : « L’effort doit être en priorité sur la baisse des dépenses de l’État, et pas sur les contributions demandées au monde du travail et aux retraités. Dans ce plan, il y a factuellement les deux. » déclare l’entourage de Laurent Wauquiez cité par Le Figaro. Pour sa part, Xavier Bertrand, président LR des Hauts-de-France, a jugé que la « justice » et le « bon sens » étaient « cruellement » absents du plan.
Le journal Le Figaro (16 juillet) anticipe même qu’« un désaccord de fond sur le budget pourrait constituer une raison suffisante pour claquer la porte du gouvernement, avant que celui-ci ne tombe sous une censure ».
Immédiatement après l’annonce du plan, un sondage Ifop réalisé ce dimanche révèle qu’Emmanuel Macron et François Bayrou forment le couple exécutif le plus impopulaire de toute l’histoire de la VeRépublique : en 8 ans d’exercice du pouvoir, le chef de l’État n’était jamais descendu sous la barre des 20 % de popularité.
La censure, c’est ce sur quoi le Premier ministre a achevé son long discours de présentation des mesures du plan. Échaudés par les innombrables « combinazione », les volte-face, les reniements, les proclamations mensongères de victoire ou recul obtenus, les fausses concessions et les pirouettes de dernière minute, intrinsèques à la VeRépublique, nous attendrons de pouvoir juger, faits en main, de ce qu’il adviendra de toutes ces déclarations. Ce d’autant qu’il faut noter que, par-delà les déclarations, feintes ou même sincères, ouvertement ou tacitement, Netanyahou continue de bénéficier de toutes les aides et appuis nécessaires pour continuer à exterminer les Palestiniens, les parquant dans des zones pour les condamner à littéralement mourir de faim et de soif, en organisant la mort de femmes, d’hommes et d’enfants, par l’utilisation méthodique de la famine. Horreur à ciel ouvert telle que même la société israélienne s’en trouve profondément fracturée.
« Tout doit être fait pour arrêter cette folie » (Manuel Bompard)
Pour sa part, et fidèle à l’orientation de rupture, Manuel Bompard, député et coordinateur de la France insoumise (LFI), a déclaré sur X : « Tout doit être fait pour arrêter cette folie qui va précipiter le pays dans la misère et dans l’impasse économique. Nous le censurerons et tous ceux qui refusent de le faire en seront complices. Et nous appelons à la mobilisation de tous pour s’y opposer. »
De leur côté, les dirigeants des confédérations, après s’être vus vendredi dernier, ont décidé de se revoir le 1er septembre pour discuter d’un appel à mobiliser au plan interprofessionnel. Instruits en particulier par les récentes propositions de mobilisations sur les retraites, on peut d’ores et déjà diagnostiquer, que, même dans l’unité, des journées d’action à répétition, savamment espacées dans le temps, ne seront pas de nature à bloquer cette offensive majeure.
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