Lecornu sauvé par le PS : la construction d’un nouveau pôle politique (ContreAttaque-17/10/25)

«Arrêtez avec l’histoire du NFP !» Olivier Faure, 16 octobre, BFM

Jeudi 16 octobre : 271 députés votent pour la motion de censure déposée par LFI contre le gouvernement Lecornu. Il ne manque que 18 voix pour renverser le Premier ministre. La quasi-totalité des députés du Parti Socialistes lui ont apporté leur soutien, et sauvent donc son gouvernement.

Pourtant, personne n’aurait parié il y a encore une semaine sur son maintien. Même les meilleurs spécialistes de la vie politique ne voyaient pas comment, mathématiquement, ce Premier ministre qui avait démissionné au bout d’une nuit, avant d’être renommé de façon pathétique, et qui a composé un gouvernement plus minoritaire et isolé que jamais, pouvait encore tenir. En effet, étant donné la composition du gouvernement, à droite toute, personne ne pensait que le PS puisse valider cette mascarade, ne serait-ce que par stratégie électorale. Comment les socialistes auraient pu, à quelques mois des élections municipales, trahir intégralement le mandat du Nouveau Front Populaire qui leur a permis de survivre, et servir de bouée de sauvetage à un régime en phase terminale ? Et pourtant, ils l’ont fait !

L’histoire est cyclique. En 2012, on oublie souvent que le Parti Socialiste disposait de tous les pouvoirs. À l’époque, il vient de gagner la présidentielle haut la main contre Sarkozy, il a une large majorité à l’Assemblée Nationale et il est même majoritaire au Sénat, ce qui est rarissime et qui lui aurait permis de voter des avancées sociales sans difficulté. Le PS a même le pouvoir dans la plupart des régions et des grandes villes. Il est hégémonique, la population a voté à gauche, la voie est libre.

Que va faire le PS ? L’une des politiques les plus violentes, autoritaires et anti-sociales de l’histoire de France. Casse méthodique du code du travail, baisse des retraites, état d’urgence, généralisation du LBD, loi sur la déchéance de nationalité… Dès le début de son mandat, le PS lance une attaque militarisée de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, puis assassine le jeune écologiste Rémi Fraisse dans le Sud-Ouest. Il nomme un fraudeur fiscal notoire, Jérôme Cahuzac, comme ministre des comptes publics, et un type de droite radicale, ultra-minoritaire au sein même du PS, Manuel Valls, aux postes clés. Le PS va même utiliser le 49.3 pour imposer la Loi Travail en 2016, car en dépit de sa majorité dans les urnes, il a décidé d’appliquer une politique tellement réactionnaire qu’il se retrouve en difficulté. Sur tous les plans, le quinquennat Hollande ira beaucoup plus à droite que celui de Sarkozy, et crée ainsi la situation abominable que nous connaissons.

La bascule néofasciste ne date pas de Macron, elle a été organisée par Hollande et Valls. C’est sous ce quinquennat que les digues explosent. Et c’est lors de son mandat qu’Hollande propulse un obscur banquier sous cocaïne, que personne ne connaît, comme Ministre de l’économie. Il s’appelle Emmanuel Macron, il utilise ce poste en or pour organiser, avec l’argent public, des dîners de luxe à Bercy avec des grands patrons, et récolte des fonds pour sa campagne. Macron n’est qu’une émanation du PS. Finalement, il est logique que Macron soit sauvé 10 ans plus tard par le parti qui l’a créé.

Même quand on s’attend au pire de la part du PS, on arrive quand même à être surpris et déçu. Le 16 octobre, après ce coup de théâtre, des journalistes tentent de poser des questions sur le NFP à Olivier Faure. Celui-ci leur lance avec dédain : «Arrêtez avec l’histoire du NFP !» Ne jamais respecter le mandat des électeurs est tellement banal dans ce parti que cette simple question irrite le chef du PS. Bizarrement, cette séquence ne tournera pas en boucle à l’écran, on ne traitera pas Faure d’autocrate, de tyran, de chef d’une secte. Ce traitement est réservé à LFI.

Voici donc ce que le PS va valider : un budget 2026 d’une extrême violence, qui va pénaliser l’écrasante majorité de la population, et préserver les ultra-riches. Les diverses allocations, dont l’allocation logement, les aides à la garde d’enfant, le RSA, la prime d’activité et autres seront «gelées». Cela veut dire qu’elles vont baisser : quand on fait stagner une allocation alors qu’il y a de l’inflation, vous la diminuez en valeur réelle. Les allocations familiales, la prime de naissance ou à l’adoption, l’allocation de rentrée scolaire, l’allocation forfaitaire pour le décès d’un enfant, l’indemnité journalière… diminuent. Le RSA également, de même que l’allocation adulte handicapé. C’est une fragilisation des plus fragiles.

Les exonérations sociales salariales seront supprimées pour les apprentis pour tout nouveau contrat conclu à partir de cette date. Cela veut dire que les apprentis seront moins payés ou tout simplement pas embauchés, alors qu’ils subissent déjà une précarité terrible et des conditions de travail insécurisantes. Les tickets resto et chèque-vacances, qui sont des compléments de salaires, ne seront plus exonérés de taxes, ce qui veut dire que les patrons en donneront moins à leurs salariés. Les mutuelles seront surtaxées, ce qui se répercutera sur leurs coûts pour les particuliers. La sécurité sociale étant abîmée, on force les gens à avoir une mutuelle, qui désormais est de plus en plus chère.

Surtout, les «franchises médicales» vont doubler, c’est-à-dire la somme non remboursée chez un médecin, pour un médicament ou un transport médical. Une attaque de la sécu de plus. Enfin, dans ce projet, les ultra-riches sont totalement épargnés, plus encore que dans le plan proposé par Bayrou au début de l’été. La situation est donc pire encore qu’il y a trois mois !

En échange de ce plan d’austérité qui représente 31 milliards de coupes dans les dépenses publiques, un «décalage» de quelques mois de la réforme des retraites. Et le pire, c’est que cette fameuse suspension risque d’être annulée : la mesure devra être votée au sein du budget brutal que nous venons de détailler, et a ensuite de forte chance d’être supprimée par le Sénat ou censurée par le Conseil Constitutionnel. La seule «concession», minable, mise en avant par le PS a donc très peu de chance de se réaliser.

Les socialistes sont-ils profondément stupides ? C’est une hypothèse qui tient la route. Mais le plus logique, c’est qu’ils font le pari d’une recomposition politique. Le PS rejoint le bloc «central» avec les macronistes et LR, dans l’objectif d’une nouvelle coalition centriste et «raisonnable» aux prochaines élections. Il veut occuper l’espace qui sera laissé vacant par le départ inéluctable de Macron, par exemple avec Glucksmann, qui en est la pâle copie. À en juger par le soutien de la meute médiatique au PS et à Glucksmann, ce plan pour maintenir l’ordre et poursuivre le saccage est un pari à prendre au sérieux.

Quoiqu’il en soit, pour les partis de gauche, ne pas considérer le PS comme un ennemi politique à faire disparaître au plus vite, et continuer à les voir comme des «partenaires», ne serait-ce qu’un jour de plus, serait une erreur fatale.

°°°

Source: https://contre-attaque.net/2025/10/17/lecornu-sauve-par-le-ps-la-construction-dun-nouveau-pole-politique/

URL de cet article: https://lherminerouge.fr/lecornu-sauve-par-le-ps-la-construction-dun-nouveau-pole-politique-contreattaque-17-10-25/

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *