
Le gouvernement démissionnaire valide par décret la possibilité pour les employeurs de contrôler les arrêts de travail de leurs employés.
Par Nicole BERNARD.
Nous sommes le 5 juillet. Deux jours avant le 2nd tour des élections législatives, alors que la défaite électorale du gouvernement est annoncée par tous les observateurs. Ce gouvernement, aujourd’hui démissionnaire, est alors extrêmement occupé.
Parmi les centaines de décrets publiés, un texte, entre autres, mérite qu’on s’y arrête : un décret où le gouvernement fixe les règles permettant aux employeurs de contrôler les arrêts de travail de leurs salariés.
Le raisonnement est très simple : les patrons ont intérêt à ce qu’il y ait le moins possible d’arrêts de travail. Donc, si on veut dépenser moins d’argent pour les arrêts de travail, il suffit de leur confier le contrôle.
C’est pourquoi le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024 prévoyait une suppression des indemnités journalières si le contrôle patronal était défavorable !
Raisonnement imparable. Mais totalement contraire aux fondements de la Sécurité sociale. Rappelons que l’article 22 b de l’ordonnance du 19 octobre 1945 stipule que « l’assurance maladie comporte l’octroi d’indemnités journalières à l’assuré qui se trouve dans l’incapacité physique constatée par le médecin traitant de continuer ou de reprendre le travail ».
Bien sûr que c’est le médecin qui doit constater et non l’employeur (ou le médecin de l’employeur dont l’indépendance est problématique).
Disposition pourtant rejetée par le conseil Constitutionnel
Le gouvernement a déjà essayé de transférer à l’employeur le contrôle des arrêts de travail. C’était dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 (imposé par l’article 49.3). Mais, le conseil constitutionnel – même lui — a rejeté ces dispositions.
Qu’à cela ne tienne. Le décret vient de paraître. Il organise le contrôle par l’employeur.
En particulier, pour faciliter le travail des médecins travaillant pour les employeurs, le décret ne leur impose pas de se déplacer chez l’assuré. Ils peuvent convoquer l’assuré dans leur cabinet. Cela va augmenter son rendement et… prouver que l’assuré n’est pas vraiment malade !
Et, surtout, il prévoit que l’employeur communique les résultats de son contrôle à la Sécurité sociale… pour qu’elle sévisse !
Bref, le 5 juillet, le gouvernement met tout en place pour transférer le contrôle des arrêts de travail aux employeurs… Il fallait que ce soit fait avant le résultat des élections législatives !
Et ces gens-là nous parlent de démocratie !
°°°
Source: https://infos-ouvrieres.fr/2024/08/30/les-arrets-de-travail-controles-par-lemployeur/
URL de cet article: https://lherminerouge.fr/les-arrets-de-travail-controles-par-lemployeur-io-fr-30-08-24/